15ème législature

Question N° 40210
de M. Dominique Potier (Socialistes et apparentés - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie, finances et relance
Ministère attributaire > Économie, finances et relance

Rubrique > eau et assainissement

Titre > Enjeux de l'irrigation agricole et commande publique

Question publiée au JO le : 20/07/2021 page : 5672
Réponse publiée au JO le : 05/10/2021 page : 7395

Texte de la question

M. Dominique Potier appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur les enjeux de l'irrigation pour l'agriculture face aux aléas climatiques et aux épisodes de sécheresses récurrents. L'irrigation agricole représente aujourd'hui près de 6 % de la SAU et touche près de 15 % des exploitations, notamment dans le sud et le centre de la France. Optimiser l'usage de l'eau pour économiser cette ressource est un défi à trois niveaux : celui de la consommation humaine, celui de la sécurisation des récoltes de biens alimentaires et enfin celui du maintien du cycle de fertilité des sols. Dans ce contexte, il convient de considérer les savoir-faire industriels en matière de canalisations comme un élément stratégique pour la souveraineté alimentaire du pays. Il apparaît donc paradoxal, au vu de ces éléments, que le fort taux de subventions françaises et européennes des investissements liés à l'irrigation agricole ne soit pas conditionné à un minimum de critères prenant en compte la responsabilité sociale et environnementale. Dans les faits, les associations syndicales autorisées (ASA) et sociétés d'aménagement régionales (SAR), en charge de la gestion des infrastructures de l'irrigation collective - qui représente 40 % des situations - achètent majoritairement des canalisations bon marché auprès des firmes étrangères, selon un critère de prix décisif qui ne retient pas les exigences de qualité et durabilité attendues pour de tels équipements. Alors que les donneurs d'ordre privilégient encore aujourd'hui trop souvent des produits issus de pays dont les marchés nous sont interdits, le soutien public à l'achat de canalisations devrait également aller de pair avec la mise en œuvre du principe de réciprocité commerciale, qui fait l'objet d'un projet de règlement européen depuis 2012 et sur lequel le Conseil de l'Union européenne vient enfin d'adopter une position commune. L'objectif d'une nouvelle conditionnalité des aides publiques à l'irrigation serait donc un double signal: écologique car favorisant des process plus vertueux; économique et social car privilégiant les savoir-faire industriels, notamment incarnés par Saint-Gobain PAM. Pour cette raison, il l'interroge sur les mesures d'accompagnement que le Gouvernement entend mettre en œuvre auprès des ASA et des SAR, en matière de commande publique, au regard des enjeux sanitaires, sociaux et environnementaux propres au secteur de l'eau.

Texte de la réponse

Dans une communication du 13 août 2019 relative aux orientations sur la participation des soumissionnaires et des produits de pays tiers aux marchés publics de l'Union européenne, la Commission européenne a mis en avant l'importance de l'utilisation d'exigences sociales et environnementales dans les marchés publics afin de rétablir les conditions d'une concurrence équitable entre les offres de l'Union européenne et les offres de pays tiers, tout en contribuant à la promotion du développement durable.  S'inscrivant pleinement dans cette démarche, le Gouvernement est à l'initiative de plusieurs évolutions récentes du droit de la commande publique, dont l'objectif est de développer de manière significative l'achat durable dans notre pays, ce qui permettra notamment de renforcer l'accès à la commande publique des opérateurs économiques les plus vertueux face à la concurrence de soumissionnaires de pays tiers moins exigeants en matière de développement durable. Le Gouvernement a conçu le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, avec pour objectif de franchir une étape nouvelle pour une meilleure prise en compte du développement durable dans la commande publique, en reprenant notamment les propositions de la convention citoyenne pour le climat en la matière. Ainsi, l'article 35 de loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets prévoit, dans un délai fixé par décret, et au plus tard en 2026, une obligation pour les acheteurs publics de fixer des clauses et des critères environnementaux dans leurs marchés publics, mais aussi une obligation de principe de prise en compte des considérations relatives au domaine social ou à l'emploi dans les conditions d'exécution pour les marchés dont le montant serait supérieur aux seuils européens. Cet article impose également aux acheteurs, dans le cadre de la préparation d'un marché public, de prendre en compte des objectifs de développement durable dans les spécifications techniques permettant de définir le besoin. L'article 36 de la loi prévoit, en outre, la mise à disposition par l'État, au plus tard le 1er janvier 2025, d'outils opérationnels de définition de l'analyse du coût du cycle de vie, permettant aux acheteurs de prendre mieux en compte les externalités environnementales des prestations acquises. De plus, les nouveaux cahiers des clauses administratives générales (CCAG), entrés en vigueur le 1er avril 2021, comportent des clauses fixant des obligations environnementales aux titulaires des marchés publics et incitent les acheteurs à prévoir une clause d'insertion sociale. Enfin, le Plan national pour des achats durables 2021-2025 (PNAD), récemment soumis à une consultation publique, constitue un vecteur essentiel d'accompagnement des acheteurs, en fixant des objectifs et en prévoyant des actions concrètes en faveur de l'achat public socialement et écologiquement responsable. Ces outils peuvent être utilement mobilisés par les acteurs du secteur de l'eau dans le cadre de l'achat public afin de contribuer tout à la fois à la promotion du développement durable et à la mise en œuvre d'une concurrence équitable.