15ème législature

Question N° 40820
de M. Loïc Prud'homme (La France insoumise - Gironde )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > hôtellerie et restauration

Titre > Interrogation sur les recommandations du CNRC pour les cantines scolaires

Question publiée au JO le : 31/08/2021 page : 6477
Réponse publiée au JO le : 03/05/2022 page : 2947
Date de renouvellement: 15/03/2022

Texte de la question

M. Loïc Prud'homme alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la réécriture du GemRCN et de l'arrêté de 2011 par le Conseil national de la restauration collective (CNRC). Si les fréquences de viande devraient être réduites, ce sur quoi le député restera vigilant, il semble difficile pour l'instant de réduire également les fréquences de service des produits laitiers. Actuellement la recommandation est d'un produit laitier par repas, cependant le GemRCN ne prend pas en compte les portions de fromage servies en plat et insuffisamment en entrée, ni le lait qui est proposé en boisson pour accompagner le repas et il encourage à en servir un supplémentaire au goûter. Il y a donc actuellement une surreprésentation des produits laitiers et fromages dans les recommandations, alors même qu'ils ne représentent que la moitié des apports en calcium mais une partie importante des apports en protéines et acides gras saturés, l'un et l'autre consommés de manière trop importante par les enfants (Avis de l'ANSES, juin 2017. Étude individuelle nationale des consommations alimentaires 3). La balance nutritionnelle est donc déséquilibrée dans les recommandations actuelles et entrave l'objectif de transmissions d'habitudes alimentaires saines des cantines. Il conviendrait de prendre en compte plus précisément l'avis du Haut Conseil à la santé publique relatif à la révision des repères alimentaires pour les enfants âgés de 0-36 mois et de 3-17 ans (octobre 2020), qui doit servir de repère scientifique au CNRC. Celui-ci précise notamment qu'il faut limiter à 3 produits laitiers par jour la consommation des enfants et augmenter la consommation de fruits. Cela doit donc conduire à limiter à 1 le nombre de produit laitier au déjeuner (fromage et boisson compris) et 0 au goûter, au profit d'un fruit, en raison des carences en fibres des enfants. Le HCSP souligne également la légitimité des sources alternatives de calcium pour les enfants qui ne consomment pas de lait pour des raisons de goût ou d'intolérance. Cette précision permettrait, si elle était prise en compte par les nouvelles recommandations, d'autoriser les cantines à substituer une partie des produits laitiers animaux par des produits végétaux, beaucoup moins polluants et plus sains s'ils sont de qualité (sans additifs, sucre etc.) : « En effet, bien que les produits laitiers soient des sources importantes de calcium, d'autres groupes alimentaires peuvent être également des sources intéressantes : légumineuses, légumes, fruits à coque, eaux riches en calcium, boissons végétales enrichies en calcium » - HCSP, octobre 2020. Les discussions actuelles sur la réécriture des recommandations du GemRCN et de l'arrêté de 2011 ne semblent pas prendre suffisamment en compte ces préconisations scientifiques, ni l'urgence environnementale et M. le député s'inquiète du poids que peuvent avoir des représentants d'intérêts privés sur les recommandations qui seront écrites, vis-à-vis desquelles ils sont en conflit d'intérêt. Il demande que ces recommandations soient écrites en ne prenant en compte que l'intérêt de la santé des enfants ainsi que les impératifs environnementaux qui influeront également sur leur santé et bien-être futurs. Il lui demande s'il compte favoriser la prise en compte des recommandations scientifiques du HCSP et faire en sorte qu'elles soient enfin respectées en réduisant la mise en valeur des produits laitiers à leur strict minimum (un produit laitier ou équivalent par repas) et en mettant au même niveau, sur le fond et la forme des préconisations, les alternatives végétales.

Texte de la réponse

Les recommandations nutritionnelles en restauration scolaire, précédemment établies dans le cadre du groupe d'étude des marchés de restauration collective et nutrition (GEM-RCN), sont en cours d'actualisation dans le cadre du groupe de travail « nutrition » du conseil national de la restauration collective (GT Nutrition du CNRC). Ce groupe de travail est composé de représentants de l'administration, des collectivités territoriales, des professionnels de la restauration collective, des professionnels de santé, des interprofessions agricoles, de l'industrie agroalimentaire, des parents d'élèves et d'associations environnementales. Ces travaux permettront l'actualisation de l'arrêté du 30 septembre 2011 relatif à la qualité nutritionnelle des repas servis dans le cadre de la restauration scolaire, en intégrant également les dispositions législatives récentes comme le menu végétarien hebdomadaire ou l'interdiction de la viande de synthèse issues de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Le travail mené dans ce cadre est basé sur l'expertise scientifique de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) [avis du 23 décembre 2019 relatif à l'actualisation des repères alimentaires du programme national nutrition santé (PNNS) pour les enfants de 4 à 17 ans] et du haut conseil de la santé publique (HCSP) (avis du 30 juin 2020 relatif à la révision des repères alimentaires pour les enfants de 0-36 mois et 3-17 ans). L'Anses alerte dans son avis sur les prévalences élevées d'apports trop faibles en calcium chez les enfants de 10 à 17 ans (de 57 % chez les garçons de 13-15 ans à 80 % chez les filles de 16-17 ans). L'agence indique que « chez les adultes comme chez les enfants, le groupe d'aliments qui contribue majoritairement à la couverture des besoins en calcium est celui des produits laitiers ». En ce qui concerne les produits laitiers, l'avis de l'Anses indique que « les produits laitiers constituent le levier le plus pertinent pour faciliter la couverture du besoin des enfants en calcium mais qu'il existe des alternatives, notamment chez les enfants qui consomment peu de produits laitiers », et que « le calcium des végétaux est généralement moins biodisponible que celui apporté par les aliments d'origine animale ». Le HCSP a ainsi traduit ces recommandations en repères alimentaires, avec la recommandation générale de consommer 3 produits laitiers par jour. La précision suivante est également apportée : « pour les enfants qui, pour des raisons de goût ou d'intolérance digestive ne consomment pas de lait, ils peuvent trouver des apports en calcium suffisants à l'intérieur des autres produits laitiers (yaourts, fromages) ou dans les sources alternatives de calcium. En effet, bien que les produits laitiers soient des sources importantes de calcium, d'autres groupes alimentaires peuvent être également des sources intéressantes : légumineuses, légumes, fruits à coque, eaux riches en calcium, boissons végétales enrichies en calcium ». Enfin, dans l'enquête Esteban de Santé Publique France, qui visait à fournir des données fiables d'évolution de la situation nutritionnelle en France, la moitié des garçons et les 2/3 des filles consommaient moins de 3 produits laitiers par jour en 2015. Ainsi, la prévalence d'inadéquation des apports en calcium étant élevée, et la recommandation de consommation de produits laitiers actualisée non respectée pour plus de la moitié des enfants, la consommation de produits laitiers dans les cantines doit être encouragée, de manière suffisante et limitée. La fréquence recommandée d'un produit laitier par repas semble ainsi pertinente pour 3 repas dans la journée. Ainsi, en fonction des repas servis en restauration scolaire (petit déjeuner, déjeuner, goûter ou dîner), seuls 3 repas devront comprendre un produit laitier. Si les sources de calcium végétales sont identifiées comme intéressantes dans les expertises scientifiques, elles ne sont citées que pour les enfants qui ne consomment pas de produits laitiers, et ne constituent pas une recommandation spécifique. La consommation de légumineuses, légumes et fruits à coque est dans tous les cas recommandée car des repères de consommation spécifiques sont définis pour ces groupes alimentaires. Ainsi, le principe d'équivalence entre les produits laitiers et les sources végétales de calcium en restauration scolaire ne semble pas pertinent au regard de l'expertise scientifique disponible. Enfin, l'Anses sera saisie à la fin des travaux du GT Nutrition du CNRC sur le sujet pour s'assurer que les critères retenus pour l'actualisation de l'encadrement règlementaire des fréquences de services en restauration scolaire sont en conformité avec les recommandations nutritionnelles.