Couverture statistique sur le territoire de la COM de Saint-Martin
Question de :
Mme Claire Guion-Firmin
Saint-Barthélemy et Saint-Martin (1re circonscription) - Les Républicains
Mme Claire Guion-Firmin attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la nécessité pour la Collectivité d'outre-mer (COM) de Saint-Martin de pouvoir bénéficier dans les meilleurs délais d'une couverture statistique de qualité. Devenue COM en 2007, et même si aucune disposition, communautaire ou nationale, n'implique son exclusion statistique du territoire économique de la République française, Saint-Martin est sortie du périmètre INSEE au 1er janvier 2008 et ne dispose pas des moyens lui permettant de créer son propre service statistique. Aussi, des données essentielles telles que l'indice des prix, les chiffres du commerce extérieur, l'illettrisme, les taux de mortalité infantile ou de pauvreté ne sont pas connus à Saint- Martin, et faute d'antenne INSEE, la COM se trouve, depuis plus de dix ans, dans un « angle mort » des politiques publiques. Après le passage du cyclone Irma le 6 septembre 2017, cette absence d'outil complexifie encore l'analyse de l'évolution de la situation économique, démographique, sociale, environnementale et sanitaire du territoire. L'amélioration de l'outil d'évaluation statistique à Saint-Martin s'avère donc essentielle, d'autant que l'Union européenne exige des statistiques annuelles dans le cadre des Programmes opérationnels. Cette carence en matière de statistiques ne permet toujours pas à la RUP Saint-Martin d'obtenir la qualification de région NUTS 2, ce qui l'a empêché de devenir autorité de gestion des fonds UE sur la période 2014-2020 et ce qui menace de se reproduire pour les PO 2021-2027. Elle lui demande si la création d'une antenne INSEE à Saint-Martin, ou, a minima, le renforcement des effectifs de l'INSEE Guadeloupe, avec des missions fléchées et des agents dédiés à Saint-Martin, est prévue par le Gouvernement.
Réponse en séance, et publiée le 28 novembre 2018
STATISTIQUES DANS LA COLLECTIVITÉ D'OUTRE-MER DE SAINT-MARTIN
M. le président. La parole est à Mme Claire Guion-Firmin, pour exposer sa question, n° 415, relative aux statistiques dans la collectivité d'outre-mer de Saint-Martin.
Mme Claire Guion-Firmin. Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, j'appelle l'attention du ministre sur la nécessité et l'urgence, pour la collectivité d'outre-mer de Saint-Martin, de bénéficier dans les meilleurs délais d'une couverture statistique de qualité. Vous n'ignorez pas que Saint-Martin, devenue collectivité d'outre-mer en 2007, est sortie du périmètre de l'INSEE – Institut national de la statistique et des études économiques – au 1er janvier 2008, alors même qu'aucune disposition, communautaire ou nationale, n'implique telle exclusion de ce territoire de la République française. Aussi, des données essentielles telles que l'indice des prix, les chiffres du commerce extérieur, l'illettrisme, les taux de mortalité infantile ou de pauvreté ne sont pas connues à Saint-Martin, et faute d'antenne INSEE, le territoire se trouve, depuis plus de dix ans, dans un angle mort des politiques publiques.
Vous connaissez la situation de Saint-Martin : ravagé le 6 septembre 2017 par le passage de l'ouragan Irma, le territoire est en pleine reconstruction – un chantier immense et coûteux, qui prendra des années. L'absence d'outil statistique rend encore plus complexe l'analyse de l'évolution de la situation économique, démographique, sociale, environnementale et sanitaire de Saint-Martin. L'amélioration de cet outil s'avère d'autant plus essentielle que l'Union européenne exige des statistiques annuelles dans le cadre des programmes opérationnels – PO. Vous le savez, cette carence en matière de statistiques ne permet toujours pas à la région ultrapériphérique – RUP – de Saint-Martin d'obtenir, dans la nomenclature des unités territoriales statistiques, la qualification de région NUTS 2. Cette situation, qui empêche Saint-Martin de devenir autorité de gestion des fonds européens sur la période 2014-2020, risque de se reproduire pour les PO 2021-2027. Dans ce contexte, nous ne pouvons plus nous contenter d'irrégulières et incomplètes enquêtes CEROM – Comptes économiques rapides de l'Outre-mer.
Ma question est donc la suivante : la création d'une antenne de l'INSEE à Saint-Martin ou, au moins, le renforcement des effectifs de l'INSEE Guadeloupe, avec des missions fléchées et des agents dédiés à Saint-Martin, est-elle prévue par le Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du numérique.
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État chargé du numérique. Madame la députée, tout le ministère est conscient de la nécessité de disposer de données de qualité dans tous les territoires d'outre-mer. Là où il est responsable de la production des statistiques, l'INSEE y consacre déjà beaucoup plus de moyens, proportionnellement au nombre d'habitants, qu'à n'importe quel territoire métropolitain. La mission de l'inspection générale des finances, début 2018, après le passage du cyclone Irma, a analysé la situation de Saint-Martin en matière de statistiques.
Saint-Martin n'est pas sorti du périmètre de la statistique publique : c'est par exemple la seule collectivité d'outre-mer à faire l'objet d'enquêtes annuelles de recensement par l'INSEE. Il s'agit de la principale source d'information, au niveau géographique – en France métropolitaine et dans les DOM –, sur la population, le marché du travail, les conditions de logement ou encore les déplacements. En décembre 2016, l'INSEE avait notamment réalisé une synthèse détaillée sur la situation économique de la collectivité de Saint-Martin, intitulée « Saint-Martin, terre d'accueil et de contrastes » ; là encore, c'est la seule collectivité à bénéficier d'une telle attention de la part de l'INSEE. Par ailleurs, une estimation du PIB de Saint-Martin est réalisée tous les cinq ans environ, la dernière publication ayant eu lieu cette année.
Cinq ans, cela peut paraître long et il existe bien sûr des marges de progression. L'INSEE propose de conduire en priorité un travail d'expertise afin de déterminer si les sources d'information mobilisables permettraient une détermination annuelle robuste du PIB de Saint-Martin, avec une interprétation possible des variations observées. Le sujet est néanmoins complexe, car aujourd'hui la faiblesse, tant quantitative que qualitative, des données ne permet pas de garantir cette publication annuelle.
S'agissant de l'indice des prix à la consommation, l'organisation mise en œuvre à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna mériterait d'être étudiée pour Saint-Martin : elle s'appuie sur un observatoire local des prix, sous la responsabilité des services de la préfecture et éventuellement l'appui d'un institut territorial de statistique créé par la collectivité, pour constituer un indice des prix adapté aux contraintes et aux besoins locaux. Si nécessaire, l'INSEE prend l'engagement d'apporter un appui méthodologique à la production de ces statistiques.
Par ailleurs, la collectivité de Saint-Martin dispose d'antennes locales des URSSAF, de Pôle emploi, de la Caisse nationale des allocations familiales, des finances publiques, des douanes ou encore de l'agence régionale de santé – autant d'instances qui, outre leurs services à la population, sont aussi productrices de nombreuses données et informations utiles à la connaissance du territoire et à la conduite des politiques publiques.
En revanche, il n'est pas prévu d'ouvrir une antenne de l'INSEE à Saint-Martin ; il n'y en a dans aucune collectivité d'outre-mer. Les moyens affectés à la direction interrégionale Antilles-Guyane de l'INSEE, qui s'occupe de Saint-Martin, sont bien dimensionnés, dans le respect des cadrages issus de la loi de finances.
Auteur : Mme Claire Guion-Firmin
Type de question : Question orale
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 novembre 2018