Pénurie d'approvisionnement en matières premières agricoles
Publication de la réponse au Journal Officiel du 3 mai 2022, page 2957
Question de :
M. Pascal Brindeau
Loir-et-Cher (3e circonscription) - UDI et Indépendants
M. Pascal Brindeau attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'actuelle pénurie d'approvisionnement en matières premières agricoles. Depuis plusieurs semaines, agriculteurs et coopératives agricoles font état d'importants problèmes d'approvisionnement en matières premières indispensables à la production agricole. Ainsi, plusieurs fournisseurs de carburant ne sont plus en mesure de répondre aux appels d'offres pour des commandes groupées, arguant de stocks insuffisants dans les dépôts de carburant. De même, les fournisseurs de gaz ne semblent plus en mesure de fournir les agriculteurs qui ont besoin de gaz, notamment pour l'utilisation des séchoirs à maïs. Ces pénuries touchent également les engrais azotés qui ont besoin d'énergie, en particulier gazière, pour être produits. Dans ce contexte, les usines de fabrication d'engrais azotés ont réduit leur fabrication par crainte de mévente, en raison de prix de vente trop élevé pour les agriculteurs, entraînant une augmentation des prix de l'azote, multiplié par presque trois en un an. Enfin, la situation de pénurie touche très fortement les approvisionnements en produits phytosanitaires. Devant une telle situation qui ne manque pas d'inquiéter le monde agricole au plus haut point, il souhaite connaître le détail des éléments ayant conduit à cette situation de pénurie et les mesures que le Gouvernement envisage pour remédier à cette situation et préserver le revenu des agriculteurs ainsi que la compétitivité de l'agriculture française.
Réponse publiée le 3 mai 2022
Ces derniers mois, la hausse du prix des engrais azotés s'expliquait principalement par une demande dynamique et par la hausse des prix de l'électricité et du gaz. En outre, les matières premières nécessaires à la fabrication des engrais azotés connaissent des hausses de prix, notamment le méthane et l'ammoniac. Pour autant, à ce jour, aucune pénurie n'a été constatée, que ce soit pour les carburants non routiers, le gaz ou les engrais. La problématique d'approvisionnement des agriculteurs est principalement due à la difficulté rencontrée par les entreprises de logistique à trouver des chauffeurs disposant de la certification nécessaire au transport de matières dangereuses (carburants, gaz ou engrais). À ce contexte déjà fortement haussier est venu s'ajouter la guerre en Ukraine, la Russie étant un des principaux fournisseurs de l'Union européenne d'engrais azotés, et de gaz pour alimenter les unités de production d'engrais azotés sur le sol de l'union européenne, qui oblige à travailler plus encore de manière préventive sur la sécurisation des approvisionnements en engrais dans les mois à venir. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est mobilisé pour trouver des solutions concrètes afin, d'une part, de faciliter, en lien avec le ministère chargé des transports, la livraison des engrais azotés et, d'autre part, de mobiliser les voies et moyens permettant de limiter la pression sur le prix des engrais azotés, notamment en engageant des actions au niveau européen. Ainsi, afin d'augmenter le nombre de créneaux de livraisons disponibles pour permettre l'approvisionnement des agriculteurs dans l'attente des produits concernés, des autorisations exceptionnelles de circulations peuvent être accordées au cas par cas au niveau local. Pour répondre aux conséquences de la crise ukrainienne, le Gouvernement a annoncé un plan de résilience, dont l'un des axes vise à sécuriser dans les mois qui viennent l'approvisionnement d'engrais en quantité suffisante par une diversification des origines, à en développer la production sur le territoire national et européen et à développer la mobilisation optimale de la ressource et l'usage des engrais organiques. Un plan souveraineté azote sera mis en œuvre à moyen terme afin de privilégier la production d'engrais vert et le développement de filières de valorisation d'engrais organique. La forte hausse du prix des engrais a des conséquences directes sur les coûts de production des agriculteurs. Toutefois, la hausse générale du prix des matières premières et de la demande alimentaire mondiale se traduit aussi par une hausse des prix de céréales et des oléagineux qui ont atteint des records historiques. L'augmentation des charges en engrais amoindrit l'effet positif de cette hausse. Cependant, pour ce qui concerne les filières animales, la structure des coûts de production est dominée par l'alimentation animale où prévalent les céréales et oléoprotéagineux, dont les cours sont en forte augmentation ainsi que, ipso facto, leurs coproduits, dont les tourteaux. Pour cette raison, le plan de résilience prévoit une aide exceptionnelle de 489 millions d'euros pour faire face à l'augmentation du coût de l'alimentation animale dans les élevages, dont les critères d'attribution sont fixés en concertation avec l'ensemble des acteurs concernés. Pour les exploitations en difficulté pour payer leurs cotisations sociales du fait d'une hausse des charges liées au conflit, une enveloppe exceptionnelle de prise en charge de cotisations sociales de 150 millions d'euros a également été débloquée. La loi dite « EGALIM 2 », promulguée en octobre 2021, impose une prise en compte des coûts de production dans les prix d'achat des produits agricoles par l'aval de la filière. Les dispositions de cette dite loi impliquent une répercussion automatique des hausses des coûts de production sur les prix d'achat des matières premières agricoles, selon une formule librement définie par les parties. Ainsi, grâce à le loi EGALIM 2, les agriculteurs ne supportent plus seuls les hausses des coûts de production, grâce à l'application de la « cascade des prix », notamment via les mécanismes de contractualisation, de non-négociabilité de la matière première agricole ou de non-discrimination tarifaire. L'État est extrêmement vigilant quant au respect de la mise en œuvre de cette loi. Les services de contrôle sont d'ores et déjà pleinement mobilisés, tout comme le médiateur des relations commerciales et le médiateur de la coopération agricole. En outre, le comité de règlements des différends commerciaux agricoles, institué par la loi, vient tout juste d'être constitué. Par ailleurs, en raison de la guerre en Ukraine et de ses conséquences sur le renchérissement des coûts de productions pour l'amont agricole, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation et la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie des finances et de la relance, chargée de l'industrie, ont demandé une réouverture des contrats grâce à la clause de renégociation ainsi que des dispositions adaptées en termes de pénalités logistiques. Un cycle de réunions avec l'ensemble des acteurs a d'ores et déjà été engagé en ce sens, sous l'égide des ministres.
Auteur : M. Pascal Brindeau
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 28 février 2022
Dates :
Question publiée le 30 novembre 2021
Réponse publiée le 3 mai 2022