15ème législature

Question N° 42777
de M. Fabrice Brun (Les Républicains - Ardèche )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > eau et assainissement

Titre > Gestion du stockage hivernal de l'eau

Question publiée au JO le : 30/11/2021 page : 8518
Réponse publiée au JO le : 08/02/2022 page : 811

Texte de la question

M. Fabrice Brun alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la nécessité d'anticiper la gestion du stockage hivernal de l'eau. Avec ses nouvelles prévisions alarmantes, le dernier rapport du GIEC confirme une nouvelle fois l'élévation de la température terrestre en même temps que l'accélération du phénomène. Pour y faire face, il existe un élément essentiel : la gestion de l'eau. Mais les pouvoir publics l'ont-ils suffisamment anticipé ? La recherche de solutions demande du temps, qu'il s'agisse de la gestion de l'eau ou par exemple de la réintroduction de cépages indigènes en viticulture, qui doivent s'effectuer tout en veillant à ne pas uniformiser les terroirs et la typicité des vins. La sécheresse est un aléa qui impacte toutes les cultures. Elle est la conséquence d'une modification de la distribution des pluies démontrée scientifiquement depuis 2008 et l'augmentation des températures. L'irrigation, loin des schémas d'intensification des années 70 80, est désormais la première des assurances récoltes, le premier des outils de sécurisation du parcours professionnel de l'agriculture ou de l'éleveur. L'enjeu est à la fois d'économiser l'eau mais aussi d'augmenter les ressources en eau, sur fond de dérèglement climatique pour sauvegarder la souveraineté alimentaire. Mais une question se pose, celle de la modalité de la ressource en respectant les enjeux de la transition écologique. À l'image de la mise en œuvre de la politique de rétention d'eau l'hiver qui est une réponse concrète, il demande quelles mesures le Gouvernement entend mettre en œuvre pour développer le stockage hivernal de l'eau du pays pour conforter à la fois les revenus agricoles et la souveraineté alimentaire du pays.

Texte de la réponse

L'agriculture est l'un des secteurs particulièrement exposé aux modifications hydrologiques, et il est important de réduire sa vulnérabilité face à un risque accru de manque d'eau dans le contexte du changement climatique. En témoignent les conséquences de la sécheresse qui, depuis plusieurs années, touche de nombreux départements. En cohérence avec les orientations du Gouvernement en matière de gestion durable de l'eau, portées par l'instruction du 7 mai 2019 sur les projets de territoire de la gestion de l'eau (PTGE), la durabilité environnementale et économique doit conduire à privilégier la sobriété des usages, sans s'interdire, là où cela s'avère nécessaire, l'augmentation de la disponibilité de la ressource en eau, notamment pour l'agriculture. Le stockage en période de hautes-eaux, en déplaçant dans la saison la pression sur la ressource, peut permettre d'atténuer l'impact des prélèvements sur les milieux aquatiques, tout en favorisant la résilience de l'agriculture. En complément des actions de sobriété, le stockage peut être mobilisé afin de se substituer à une ressource en déficit à l'étiage, voire dans certains cas, de développer l'irrigation sur des territoires bénéficiant d'une ressource substantielle en période de hautes-eaux et sur lesquels l'agriculture est particulièrement exposée aux effets du changement climatique. Dans le cadre du Varenne agricole de l'eau et de l'adaptation au changement climatique, un groupe technique spécifique a été constitué afin d'aborder la question de la « mobilisation des ressources en eau existantes ». L'augmentation des températures, la dispersion intra-annuelle des précipitations, la diminution du manteau neigeux ou encore le recul des glaciers, auront des conséquences sur la dynamique hydrogéologique des bassins versants, qu'il s'agit de bien anticiper lorsque l'on se fixe comme ambition la pérennité environnementale et économique à long terme des ouvrages de stockage. C'est dans cette perspective que le Varenne préconise de suivre et de valoriser les conclusions de l'étude à venir « impacts des prélèvements en cours d'eau hors étiage » portée par la haute école du paysage, de l'ingénierie et de l'architecture de Genève (HEPIA) en collaboration avec l'office français de la biodiversité (OFB) et l'institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE). Le cadre de financement des projets de stockage d'eau par les agences de l'eau a été rénové en 2019 pour donner plus de flexibilité à la gouvernance locale. Dans le cadre des négociations européennes sur la prochaine programmation de la politique agricole commune (PAC), la France a veillé à ce que les fonds européens FEADER (fonds européen agricole pour le développement rural) puissent continuer à être mobilisés afin d'accompagner le développement de l'hydraulique agricole. Il revient désormais aux régions, autorités de gestion du FEADER, de décider la mobilisation des crédits du FEADER à cette fin dans le cadre du projet de plan stratégique national de la PAC 2023-2027. Dans le cadre du plan de Relance, l'État a soutenu en 2021 trente-six projets d'infrastructures collectives pour un montant d'aide de 32 M€, et « France 2030 » aura vocation à poursuivre l'engagement de l'État pour soutenir des projets innovants et ambitieux d'optimisation de la ressource en eau. Par ailleurs, si l'adaptation de l'agriculture aux effets du changement climatique et la mobilisation durable des ressources en eau constituent le socle nécessaire à la durabilité de l'agriculture, l'augmentation à venir de l'intensité et de la fréquence des crises climatiques interroge l'efficience de l'actuel système assurantiel. À ce titre, les travaux du groupe dédié du Varenne ont conduit à la remise d'un rapport au ministre de l'agriculture et de l'alimentation fin juillet 2021, concernant la réfome de l'assurance récolte. Celle-ci vise à refonder la gestion des risques climatiques en agriculture, en créant un nouveau système universel basé sur davantage de solidarité nationale et tendant vers la généralisation de l'assurance récolte. Un projet de loi est actuellement examiné au Parlement, pour une entrée en vigueur de la réforme début 2023, concomittament à la mise en œuvre de la nouvelle PAC. Les travaux du Varenne agricole de l'eau et de l'adaptation au changement climatique se poursuivent. Ils permettront d'ici la fin du 1er semestre 2022 de faire émerger une feuille de route renouvelée et porteuse d'ambitions pour la gestion durable de l'eau en agriculture.