15ème législature

Question N° 42903
de M. Dominique Potier (Socialistes et apparentés - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > consommation

Titre > Affichage provenance du lait dans les préparations commerciales pour nourrissons

Question publiée au JO le : 07/12/2021 page : 8633
Réponse publiée au JO le : 03/05/2022 page : 2958
Date de renouvellement: 29/03/2022

Texte de la question

M. Dominique Potier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la mention sur les emballages des Préparations Commerciales pour Nourrisson (PCN et non laits infantiles, loi 2006) de l'origine géographique des laits ayant servi à leur fabrication. À la suite d'une expérimentation Gouvernementale, la mention de l'origine « UE » ou « non-UE » du lait en bouteille ou en brique avait été imposée sur les emballages. Cette obligation était également étendue aux aliments en contenant suivant le décret n° 2016-1137 du 19/08/2011, en conformité avec les articles 9 et 26 du règlement UE n° 1169/2011 dont font partie les PCN et celles de suite, suivant l'article 6 du règlement de l'UE n° 2016/127 du 25/09/2015. Cependant, le Conseil d'État, saisi par le groupe laitier Lactalis, a annulé ce décret dans son arrêt n° 404651 du 10/03/2021, estimant que le lien entre la provenance et les propriétés des produits n'était pas établi. Pourtant, la qualité des PCN est un sujet d'inquiétude légitime pour les citoyens et les professionnels de la petite enfance, d'où l'importance d'une information claire de la part de l'industrie alimentaire. Par ailleurs, selon une étude récemment publiée dans le British Medical Journal le 14 octobre 2021 (Helfer B, Leonardi-Bee J, Mundell A et al., Conduct and reporting of formula milk trials: systematic review BMJ 2021; 375:n2202), « les essais sur les préparations pour nourrissons manquent d'indépendance ou de transparence et les résultats publiés sont biaisés par des rapports sélectifs ». En effet, après une analyse détaillée de 125 essais sur les PCN publiés depuis 2015, les chercheurs ont constaté que seuls 17 (14 %) d'entre eux avaient été menées indépendamment des fabricants de PCN. Les chercheurs ont conclu à « la nécessité d'un changement substantiel dans la conduite des essais sur les préparations pour nourrisson afin de mieux protéger les participants contre les préjudices et de préserver les consommateurs des informations trompeuses ». D'autre part, les recherches les plus actuelles le confirment, le lait maternel est le seul aliment complètement adapté au nourrisson. L'allaitement maternel répond à tous ses besoins (physiques, dont la croissance du cerveau, psycho-affectifs, relationnels) notamment au sein des familles défavorisées où il joue le rôle d'un véritable ascenseur social, à condition que les mères soient accompagnées et soutenues. Il est fortement recommandé par l'OMS et sur un temps suffisamment long, six mois au moins. Or selon une étude menée en 2018 sur huit maternités de l'AP-HP, si 70 % des mères souhaitent allaiter exclusivement leur nouveau-né à l'entrée de la maternité, 50 % le sont réellement et seuls 25 % des enfants le sont encore à l'âge de six mois. De plus, ce sont en majorité des enfants de mères de milieux sociaux élevés ou instruits tandis que les nouveau-nés de familles défavorisées sont nourris avec des PCN. Les enfants de milieux vulnérables sont ainsi affectés de façon disproportionnée : en premier lieu parce qu'ils sont moins allaités, en second lieu par les problèmes de qualité des PCN que l'absence de traçabilité géographique risque d'aggraver. Il demande quelles mesures entend adopter le Gouvernement pour assurer la traçabilité des Préparations Commerciales pour Nourrissons et ainsi améliorer leur qualité et quelle politique il entend par ailleurs mener pour que toutes les femmes qui le souhaitent puissent allaiter leurs enfants.

Texte de la réponse

La promotion de l'allaitement figure parmi les objectifs spécifiques du programme national nutrition santé (PNNS) depuis 2001. Le haut conseil de la santé publique a défini notamment comme objectif spécifique pour le PNNS 4 2019-2023 d'augmenter de 15 % au moins le pourcentage d'enfants allaités à la naissance pour atteindre un taux de 75 % et d'allonger de 2 semaines la durée médiane de l'allaitement total, soit la passer de 15 à 17 semaines. Il est ainsi recommandé d'allaiter jusqu'aux 6 mois de l'enfant. Une durée inférieure reste néanmoins bénéfique à sa santé et à celle de la mère. L'objectif est à la fois d'inciter les femmes à choisir, à la naissance de leur enfant, l'allaitement maternel exclusif, de les aider à surmonter les éventuelles difficultés de l'initiation de l'allaitement et de faciliter son maintien dans la durée. Santé publique France a également élaboré, en septembre 2021, les nouvelles recommandations alimentaires pour les 0-3 ans et promeut l'allaitement maternel généralisé au travers de différents supports : campagne de communication sur la diversification alimentaire, brochure sur l'alimentation des tout-petits, sites « mangerbouger.fr » et « 1000-premiers-jours.fr ». La décision d'allaiter appartient aux parents de l'enfant. Toutefois, en l'absence d'allaitement ou en complément de celui-ci avant 6 mois, seules les préparations pour nourrissons ou les préparations de suite, autorisées par la réglementation, peuvent couvrir les besoins nutritionnels de l'enfant (préparation pour nourrisson ou « lait 1er âge », en poudre, diluée dans de l'eau, de la manière indiquée par le fabriquant). Les exigences spécifiques en matière de composition et d'information applicables aux préparations pour nourrissons et aux préparations de suite sont strictement définies par la réglementation européenne. Le règlement (UE) 609/2013 du Parlement européen et du Conseil du 12 juin 2013, règlement cadre en matière de denrées destinées à des populations vulnérables et le règlement délégué (UE) 2016/127 de la Commission concernant les exigences spécifiques en matière de composition et d'information applicables aux préparations pour nourrisson et préparations de suite établissent des principes et des règles de composition visant à garantir que ces denrées spécifiques sont à la fois sûres et nutritionnellement adaptées aux nourrissons. Des règles spécifiques sont par ailleurs établies en matière de résidus de pesticides et de contaminants afin de préserver cette population. La composition nutritionnelle des préparations pour nourrissons a fait l'objet d'une enquête de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en 2019 qui montre qu'elle est globalement bien maitrisée par les fabricants. Concernant l'exigence de traçabilité des produits, celle-ci est imposée au plan européen, notamment par le règlement (CE) 178/2002 du Parlement européen et du Conseil établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire et s'applique aux préparations pour nourrissons. Cette obligation est toutefois indépendante des règles régissant l'indication de l'origine des produits. Si l'expérimentation mise en œuvre en France ne concernait pas les préparations pour nourrissons et préparations de suite, les opérateurs concernés ont la possibilité d'indiquer de manière volontaire les dispositions mises en œuvre depuis 2017 afin de répondre au besoin d'information exprimé par le consommateur. La France a d'ores et déjà exprimé, à de nombreuses reprises au niveau européen, sa demande d'une obligation harmonisée de l'étiquetage de l'origine du lait et du lait dans les produits laitiers, ainsi que d'autres produits. À ce titre, le Gouvernement se félicite que la Commission européenne prépare actuellement une révision du règlement (UE) 1169/2011 relatif à l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, dans l'objectif annoncé d'étendre la liste des produits pouvant bénéficier d'une indication obligatoire de l'origine ou de la provenance. Une consultation publique sur ce sujet a d'ailleurs été ouverte jusqu'au 7 mars 2022 sur le site de la Commission européenne.