15ème législature

Question N° 43420
de M. Frédéric Reiss (Les Républicains - Bas-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales
Ministère attributaire > Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales

Rubrique > élus

Titre > Transparence des indemnités des élus

Question publiée au JO le : 11/01/2022 page : 124
Réponse publiée au JO le : 08/03/2022 page : 1499

Texte de la question

M. Frédéric Reiss interroge Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales au sujet de la transparence des indemnités des élus. Dans un objectif de transparence, la loi n°2019-1461 dite « engagement et proximité » a instauré l'obligation d'établir chaque année, avant l'examen du budget, un état présentant l'ensemble des indemnités dont bénéficient les élus siégeant au sein des organes délibératifs (articles 92 et 93 de la loi). Cette obligation aboutit à informer chacun des organismes de l'ensemble des indemnités perçues. Dans la pratique, cela amène cependant aussi à informer le grand public de l'ensemble des revenus d’un élu lorsque celui-ci n'exerce pas d'activité professionnelle en parallèle. Au-delà de l'objectif louable de transparence, cela aboutit donc aussi à une forme de non-respect de la vie privée pour ces élus qui voient tous leurs revenus personnels publiés, à l'inverse d'autres élus au sein de la même assemblée. Sensibilisé sur le sujet, il souhaite connaître sa position sur cette problématique, notamment au regard des dispositions de la Commission Nationale Informatique et Libertés, qui protège de façon très stricte les données à caractère personnel.

Texte de la réponse

Les articles 92 et 93 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique imposent de nouvelles obligations de transparence en matière d'indemnités perçues par les élus locaux. Sont ainsi concernés les communes (article L. 2123-24-1-1 du code général des collectivités territoriales, CGCT), les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP - article L. 5211-12-1 CGCT), les départements (article L. 3123-19-2-1 CGCT) et les régions (article L. 4135-19-2-1 CGCT). Aux termes de ces articles, il revient à ces collectivités et EPCI-FP d'établir chaque année un état récapitulatif des indemnités de toute nature dont bénéficient les élus siégeant à leur conseil, « au titre de tout mandat ou de toute fonction » exercé en leur sein d'une part, et d'autre part : au sein de tout syndicat mixte ou pôle métropolitain, au sein de toute société d'économie mixte/société publique locale. S'agissant de la compatibilité de ce dispositif avec le droit au respect de la vie privée, il convient de rappeler que les indemnités de fonction des élus locaux font l'objet d'une délibération votée par l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement concerné, qui est publiée et consultable par tout administré. Cette mesure de transparence consiste donc à titre principal à rassembler sur un même document des informations qui étaient déjà publiques, comme c'est le cas pour de nombreuses autres fonctions électives ou publiques (parlementaires, membres du conseil économique, social et environnemental, membres du Gouvernement, etc.). Elle ne constitue donc pas une obligation nouvelle de publicité. Son objet est, à titre principal, de renforcer la transparence applicable aux indemnités des élus locaux. Ce domaine relève de la compétence du législateur, conformément à l'article 34 de la Constitution aux termes duquel relèvent de la loi la fixation des garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques d'une part, ainsi que les conditions d'exercice des mandats électoraux d'autre part. La loi doit donc établir un dispositif conjuguant ces exigences. Dans sa décision n° 2013-675 DC du 9 octobre 2013 sur la loi relative à la transparence de la vie publique, le Conseil constitutionnel a été amené à se prononcer sur le caractère public des déclarations d'intérêts établies par les élus locaux. Il a ainsi rappelé que lorsque la publicité de telles déclarations porte atteinte au respect de la vie privée, elles ne peuvent être conformes à la Constitution que si elles sont « justifiées par un motif d'intérêt général et mises en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif » (point 13). En l'espèce, le Conseil notait qu'en prévoyant la publicité des déclarations d'intérêts des élus locaux, le législateur « a entendu permettre à chaque citoyen de s'assurer par lui-même de la mise en œuvre de garanties de probité et d'intégrité de ces élus », et, « s'agissant de personnes élues, l'atteinte portée au droit et au respect de la vie privée ne revêt pas un caractère disproportionné au regard de l'objectif poursuivi » (point 19). Le même raisonnement trouve à s'appliquer s'agissant de la transparence des indemnités de fonction des élus locaux. L'état récapitulatif des indemnités des élus n'a d'ailleurs pas à mentionner l'existence ou l'absence d'autres ressources (salaires, pensions, revenus patrimoniaux, etc.). Il en découle qu'il ne permet pas, à lui seul, de déterminer l'ensemble des revenus d'un élu. Au surplus, son contenu est moins large que celui prévu pour la déclaration d'intérêts qui est systématiquement rendue publique. Au cours des dernières années, le législateur a donc établi un ensemble de dispositions permettant de parvenir à un équilibre entre les obligations légitimes de déontologie, de probité et de transparence, et le droit des élus au respect de leur vie privée.