15ème législature

Question N° 434
de M. Olivier Faure (Nouvelle Gauche - Seine-et-Marne )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > réfugiés et apatrides

Titre > accueil des réfugiés

Question publiée au JO le : 20/12/2017
Réponse publiée au JO le : 20/12/2017 page : 6834

Texte de la question

Texte de la réponse

ACCUEIL DES RÉFUGIÉS


M. le président. La parole est à M. Olivier Faure, pour le groupe Nouvelle Gauche.

M. Olivier Faure. Monsieur le Premier ministre, il fait froid, très froid. Comme chaque hiver, chacun d'entre nous est attentif à ce que cette météo ne soit pas la cause de nouveaux drames humains. Le Président de la République s'est engagé à ce que plus personne ne dorme dans la rue ou dans les bois avant la fin de cette année.

M. Michel Herbillon. C'est loin d'être le cas !

M. Olivier Faure. C'est la raison pour laquelle, monsieur le Premier ministre, à la suite de vingt-cinq associations, notamment Emmaüs, la Fédération des acteurs de la solidarité – la FNARS – et la Fondation Abbé Pierre, nous vous interpellons au sujet de la circulaire signée le 12 décembre par votre ministre de l'intérieur, qui contredit totalement l'objectif de mise à l'abri des familles. En prévoyant d'organiser un tri des personnes migrantes…

Un député du groupe REM . Ce n'est pas vrai !

M. Olivier Faure. …à l'intérieur des centres d'hébergement, vous remettez en cause un droit fondamental, comme vous l'a rappelé hier le Défenseur des droits, Jacques Toubon.

Ce droit, c'est l'accès inconditionnel aux centres d'hébergement. Ces lieux, comme nos hôpitaux, sont le sanctuaire de notre humanité. Dans ces lieux, le seul critère est l'appartenance au genre humain. En organisant ces contrôles, vous renvoyez à la clandestinité et à la rue des familles entières, non seulement des personnes migrantes, mais aussi des êtres brisés qui, après des mois ou des années d'errance, redoutent toute forme de contrôle.

Vous ne pouvez pas à la fois donner la consigne de détruire les abris de fortune et restreindre l'accès à des centres d'hébergement…

M. Éric Straumann. Vous auriez fait la même chose !

M. Olivier Faure. …dont les capacités d'accueil sont trop limitées, comme vous l'ont rappelé hier sept maires de grandes villes, notamment Martine Aubry et Alain Juppé.

M. Fabien Di Filippo. Quelles références !

M. Olivier Faure. Monsieur le Premier ministre, je vous demande donc de mettre fin à ce « en même temps » qui fait prononcer au Président de la République des discours généreux à Bruxelles qui n'ont malheureusement aucune traduction concrète une fois qu'il est de retour à Paris. (Applaudissements sur les bancs du groupe NG et quelques bancs du groupe REM.).)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Faure, l'objectif du Gouvernement est clair : il s'agit d'améliorer considérablement l'accueil, le traitement des demandes, et l'intégration des personnes bénéficiant du statut de réfugié. En la matière, monsieur le président, reconnaissez avec moi que l'on peut faire beaucoup mieux qu'aujourd'hui.

M. Régis Juanico. Nous avions fait des progrès !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Je veux bien reconnaître avec vous que la situation est meilleure aujourd'hui qu'elle ne l'était il y a dix ans, mais, dans ce cas, reconnaissez avec moi qu'elle n'est pas satisfaisante et qu'il faut aller plus loin. C'est exactement l'objectif du Gouvernement : nous voulons faire en sorte que l'accueil des personnes demandant à bénéficier du statut de réfugié soit plus efficace, que le traitement de leurs demandes soit plus rapide et que, une fois la demande validée, ils soient accueillis dans de meilleures conditions, notamment pour l'apprentissage du français, et bénéficient d'une meilleure intégration dans notre pays.

M. Olivier Faure. Ce n'est pas la question !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Cet objectif est clair et net.

Dans le même temps, nous voulons que les étrangers qui ne sont pas en situation régulière en France, soit parce qu'il n'ont aucun titre à s'y trouver, soit parce que, ayant sollicité le statut de réfugié, ils ont vu leur demande rejetée et que, au terme du processus qui leur permet de contester cette décision, ils se sont vu refuser le droit qu'ils invoquaient, soient reconduits chez eux ou dans le pays par lequel il sont entrés pour la première fois dans l'Union européenne.

C'est la raison pour laquelle je dis que notre politique est marquée par un souci d'équilibre : meilleure efficacité s'agissant de l'accueil des réfugiés ; meilleure efficacité aussi en matière de reconduite de ceux qui ne sont pas en situation régulière en France.

M. Olivier Faure. Ce n'est pas la question !

Mme Mathilde Panot. Il s'agit de la circulaire !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Il se trouve que, dans les structures d'accueil et d'hébergement d'urgence, tout le monde est mélangé : certains sont des demandeurs d'asile ; d'autres sont des demandeurs d'asile déboutés ; d'autres encore sont des étrangers en situation irrégulière qui n'ont même pas déposé de demande d'asile. Vous savez parfaitement que ces structures, dont nous allons par ailleurs développer le nombre de places afin d'améliorer l'accueil, sont « embolisées », comme on le dit parfois, par la lenteur avec laquelle nous traitons les demandes.

L'objectif de la circulaire que vous dénoncez…

Plusieurs députés du groupe NG . Pas que nous !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …n'est pas de revenir sur l'accueil inconditionnel.

Plusieurs députés des groupes NG et FI . Si !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président, je vous ai écouté avec attention, je suis certain que vous pouvez faire de même.

L'objectif de la circulaire que vous dénoncez est de revenir sur un accueil indifférencié.

M. Claude Goasguen. Comment ?

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Nous voulons faire en sorte que des équipes composées non pas de fonctionnaires de police, mais d'agents des préfectures et d'agents spécialisés, après avoir prévenu, vingt-quatre heures auparavant, les structures d'accueil, puissent venir non pas faire le tri, comme vous le dites, mais identifier ceux qui pourront bénéficier d'une procédure plus rapide et plus efficace.

Mme Danièle Obono. C'est incroyable !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. C'est le seul objet de la circulaire, monsieur le président. (Exclamations sur les bancs des groupes NG et FI.)

M. Olivier Faure. Non !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. C'est indispensable, vous le savez,…

M. Serge Letchimy. Ce sont des êtres humains !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …sinon nous ne pourrons pas traiter en priorité le cas de ceux qui ont vocation à être accueillis en France et à bénéficier du statut de réfugié. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.)

Je comprends, monsieur le président, que cette approche équilibrée puisse heurter ceux qui affirment qu'un étranger, y compris en situation irrégulière, a vocation à rester en France. (Exclamations sur les bancs des groupes NG et FI.)

M. Olivier Faure. Personne ne dit cela !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Je peux le comprendre, mais ce n'est pas notre objectif, ce n'est pas notre politique et ce n'est pas ce que nous allons mettre en place. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes REM, MODEM et UAI.)