Reconnaissance par la France du génocide des ouighours par la RPC
Question de :
Mme Isabelle Valentin
Haute-Loire (1re circonscription) - Les Républicains
Mme Isabelle Valentin interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la reconnaissance par la France du génocide des ouighours par la République populaire de Chine. Il est avéré que depuis 2016 le parti communiste chinois ordonne des déportations massives de population dans des camps sur le seul motif de leur appartenance religieuse. Ainsi et selon plusieurs témoignages, on estime que des millions de personnes auraient été internées et que la plupart d'entre elles auraient été torturées. Il est à présent établi que le gouvernement chinois viole les termes de la Convention des Nations Unies de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide, comme un certain nombre d'experts l'ont démontré dans le rapport du Newlines Institure for Strategy and Policy. L'indignation s'est élevée dans le monde entier, ce qui a conduit les gouvernements américains, canadiens et néerlandais notamment à reconnaître ce génocide. En conséquence de ce qui précède, elle lui demande donc que la France reconnaisse officiellement le génocide des ouighours et d'en tenir compte dans les relations diplomatiques que le pays entretient avec la République populaire de Chine.
Réponse publiée le 29 mars 2022
S'agissant de la situation au Xinjiang, la France a dénoncé à de multiples reprises les pratiques injustifiables désormais abondamment documentées par des rapports académiques étayés et des témoignages de la société civile. Le Gouvernement exprime publiquement ses inquiétudes, par des déclarations officielles, tant sur la dégradation de la situation des droits de l'Homme en Chine, notamment au Xinjiang, que sur des situations individuelles, telles que celle de la joueuse de tennis Peng Shuai. Nos préoccupations sont également exprimées dans les enceintes multilatérales, telles que le Conseil des droits de l'Homme et la 3e Commission de l'Assemblée générale des Nations unies (AGNU). Lors des entretiens bilatéraux entre Paris et Pékin, le sujet des droits de l'Homme en Chine, et tout particulièrement au Xinjiang, est systématiquement évoqué, jusqu'au plus haut niveau. Nous relayons auprès des autorités chinoises nos plus graves préoccupations, partagées par l'opinion publique française, quant à l'ampleur et la gravité des violations au Xinjiang, et appelons à y mettre fin. Sur le plan national, la France s'est engagée, de manière pionnière, pour un renforcement du cadre législatif régissant la conduite responsable des entreprises, notamment au regard du travail forcé, avec l'adoption, le 27 mars 2017, de la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre. Par ailleurs, une stratégie nationale d'accélération pour éliminer le travail des enfants, le travail forcé, la traite des êtres humains et l'esclavage contemporain, en France et dans le monde, a été lancée en octobre dernier. À l'échelon européen, la France a contribué à l'adoption, le 22 mars dernier, de sanctions européennes à l'encontre de responsables et d'entités chinoises impliqués dans les graves violations des droits de l'homme dont est victime la minorité ouïghoure au Xinjiang. Nous avons également soutenu le renouvellement, le 6 décembre dernier, de ces mesures historiques, qui constituaient une première depuis les sanctions adoptées à la suite des événements de Tiananmen en 1989. Au niveau international, la France s'est également saisie du sujet, comme le 21 octobre 2021, en 3e Commission de l'AGNU, lorsque nous avons coordonné la rédaction d'une déclaration conjointe transrégionale, prononcée au nom de 43 pays faisant mention du caractère généralisé et systémique des violations des droits de l'Homme au Xinjiang. S'agissant de la reconnaissance et de la condamnation du caractère génocidaire des violations des droits de l'Homme perpétrées au Xinjiang à l'égard des minorités musulmanes, cette qualification relève des juridictions, en regard en particulier de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948. Il ne revient pas au Gouvernement de s'exprimer au sujet de la caractérisation juridique de la situation. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s'en est remis à la sagesse des Parlementaires, lors de l'adoption, le 20 janvier, de la proposition de résolution portant sur la reconnaissance et la condamnation du caractère génocidaire des violences politiques systématiques à l'encontre des Ouïghours. Dans le cadre de la présidence du Conseil de l'Union européenne (UE), la France continue de promouvoir le dialogue exigeant mené au niveau européen avec la Chine sur le respect des droits de l'Homme, notamment au Xinjiang. En outre, la France a porté le projet de directive relative au devoir de diligence des entreprises, publié par la Commission européenne le 23 février 2022, dont l'objectif est de prévenir les risques d'atteintes aux droits de l'Homme et à l'environnement qui pourraient survenir dans les activités des entreprises et le long de leurs chaînes d'approvisionnement. La France travaillera avec ses partenaires tchèques et suédois, qui lui succéderont à la présidence du Conseil de l'UE, afin d'assurer la continuité du traitement du sujet à partir de juillet prochain. Enfin, comme l'a rappelé le Président de la République le 19 janvier devant le Parlement européen, il n'y aura pas d'accord global sur les investissements entre l'UE et la Chine, tant que la Chine n'aura ni ratifié les conventions de l'Organisation internationale du travail (OIT) interdisant le travail forcé, ni levé les sanctions adoptées par la Chine à l'encontre d'Eurodéputés, d'institutions européennes et de représentants du monde académique.
Auteur : Mme Isabelle Valentin
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 25 janvier 2022
Réponse publiée le 29 mars 2022