15ème législature

Question N° 43871
de M. Bernard Perrut (Les Républicains - Rhône )
Question écrite
Ministère interrogé > Comptes publics
Ministère attributaire > Comptes publics

Rubrique > drogue

Titre > Les dangers du marché parallèle de vente de tabac

Question publiée au JO le : 01/02/2022 page : 586
Réponse publiée au JO le : 31/05/2022 page : 3278
Date de changement d'attribution: 21/05/2022

Texte de la question

M. Bernard Perrut alerte M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics, sur le marché parallèle de vente de tabac qui met en danger consommateurs et buralistes. En 2021, les ventes de tabac ont reculé de 6,2 % en volume par rapport à 2020, année marquée par les restrictions sanitaires liées à la covid-19 qui ont tari la consommation parallèle du tabac (achats transfrontaliers, à la sauvette). Cette situation met ainsi en lumière les difficultés auxquelles sont notamment confrontés les services des douanes pour contrôler l'achat de tabac à l'étranger, en ligne ou dans des épiceries frauduleuses, faisant perdre chaque année à l'État près de 6 milliards d'euros de taxes et redevances tout en mettant en danger les consommateurs qui se tournent vers des produits de contrebande et contrefaçon encore plus nocifs. Le réseau de buralistes est ainsi gangrené par le marché parallèle - qui ne cesse d'augmenter et qui représenterait aujourd'hui plus de 30 % des ventes de tabac -, avec pour conséquence directe de provoquer la fermeture de certains bureaux de tabac dont les chiffres d'affaires dépendent en grande partie des ventes de cigarettes. En tant que dernier réseau de commerces de proximité dans les zones rurales, l'utilité sociale des buralistes est pourtant essentielle dans les territoires où ils assurent des services de proximité irremplaçables : presse, bazar, retrait colis, photocopie. Celle-ci doit être préservée. C'est pourquoi face à cette situation, il souhaite connaître les mesures supplémentaires qu'entend prendre le Gouvernement pour limiter cette consommation parallèle et soutenir ces commerces essentiels d'utilité locale, avec notamment le lancement d'une réflexion sur la politique fiscale de la France en la matière et sa possible harmonisation au niveau européen.

Texte de la réponse

En première analyse, il importe de souligner que le chiffre de la baisse des ventes de produits du tabac ne reflète pas la seule évolution du marché parallèle. En ce sens, l'objectif contenu dans le cadre du plan national de lutte contre le tabac et réaffirmé en février 2021 par le Président de la République dans le cadre de la présentation de la stratégie nationale décennale de lutte contre le cancer, reste de faire des enfants d'aujourd'hui, dès 2032, la première « génération d'adultes sans tabac ». Ainsi, le Gouvernement mène, à cette fin et depuis 2017, une politique ambitieuse de lutte contre le tabagisme. Pour lutter contre le contournement des mesures de santé publique qui porte atteinte aux ressources fiscales et qui alimente des réseaux de trafic, nuisant à la sécurité publique et fragilisant le réseau des buralistes, la lutte contre la contrebande et les trafics illicites de produits du tabac reste une priorité forte de la douane. Les services douaniers sont mobilisés et agissent dans le cadre du plan de lutte contre les trafics illicites de produits du tabac, sur l'ensemble du spectre des fraudes. En tout premier lieu, ils interviennent dans le champ des achats transfrontaliers, qui concernent un grand nombre d'infracteurs, introduisant de petites quantités en provenance du territoire d'États frontaliers. Pour faire face à ce type de trafic, la douane mène de très nombreux contrôles qui nécessitent la mobilisation d'importantes ressources pour faire face au flux, avec des quantités saisies relativement faibles. En 2021, les douaniers ont effectué 18 284 constatations d'infractions relatives au tabac (soit, en moyenne, une cinquantaine d'infractions constatées par jour). Ces contrôles ont lieu sur les routes, dans les ports, les aéroports, les trains ou encore sur les lignes de transport maritime de voyageurs. Ensuite, des trafics dits « fourmis » de petites et moyennes importances, alimentés avec des produits provenant d'États frontaliers ou de pays tiers par plusieurs vecteurs comme les voyages par avion ou par le fret express et postal, requièrent une présence sur les voies d'approvisionnement comme dans les agglomérations où ces produits sont mis en vente. Ils font également l'objet d'une surveillance sur internet par Cyberdouane, service spécialisé, ainsi que par un réseau déconcentré expérimental de lutte contre la fraude douanière sur internet, placé dans certaines directions régionales des douanes. Pour la partie la plus organisée, les organisations transnationales mettent en œuvre des trafics de quantités plus importantes de produits du tabac menés par des réseaux organisés. Ce type de trafics nécessite des enquêtes et des opérations lourdes pour réaliser des saisies décisives et démanteler des réseaux. C'est notamment la mission des effectifs de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), ainsi que du service d'enquêtes judiciaires des finances (SEJF). Par ailleurs, pour rendre plus efficaces les sanctions fiscales et pénales prises suites aux constatations douanières, et ainsi augmenter leur effet dissuasif, le législateur a parallèlement décidé de les aggraver dans le cadre de la loi de finances pour 2022, notamment celles prévues à l'article 1791 ter du code général des impôts. Pour compléter ces dispositifs, la France plaide depuis plusieurs mois au niveau européen pour une harmonisation, par le haut, des niveaux de fiscalité frappant les produits du tabac dans les différents États membres. En outre, afin de soutenir l'activité économique des buralistes, commerçants d'utilité locale, plusieurs dispositifs ont été mis en place. Ainsi, le Protocole d'accord, conclu le 2 février 2018 entre l'État et la Confédération des buralistes, et son avenant, signé le 22 octobre 2020, ont renforcé le soutien à l'activité des buralistes les plus fragiles, notamment dans les zones rurales et frontalières, par la pérennisation de certains dispositifs d'aides (remise compensatoire, complément de remise), l'augmentation de la prime de diversification des activités de 2 000 à 2 500 euros, ainsi que la création d'un fonds de transformation des buralistes, doté d'un budget de 100 millions d'euros sur la période 2018-2022. De nombreux dispositifs d'aides ont vu leur périmètre élargi au titre de l'année 2022 (rehaussement des seuils d'éligibilité au complément de remise et à la prime de diversification des activités, ouverture du dispositif de remise compensatoire aux débits saisonniers, etc). Enfin, depuis le 1er janvier 2022, la remise nette versée aux buralistes a de nouveau été augmentée et a été portée à 8,1 %. Depuis la signature du protocole en 2018, cette remise a ainsi progressé de + 0,40 point. Cet engagement fort en faveur d'une hausse de la rémunération des buralistes témoigne du soutien de l'État vis-à-vis du réseau des buralistes.