Apprentissage à l'étranger - mobilité internationale et non rémunération
Question de :
Mme Stéphanie Do
Seine-et-Marne (10e circonscription) - La République en Marche
Mme Stéphanie Do interroge Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion sur l'annonce faite en 2017 par sa prédécesseuse, Mme Muriel Pénicaud de « porter à 15 000 le nombre d'apprentis mobiles d'ici à 2022 ». Dans cette optique, l'enveloppe attribuée à Erasmus a été revue à la hausse et la réforme de l'apprentissage a pris en compte le facteur mobilité. Par conséquent, en 2018, la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel est venue élargir les règles de la mobilité internationale des apprentis en l'ouvrant aux pays hors Union européenne et en l'élargissant aux bénéficiaires d'un contrat de professionnalisation. Cette réforme dont la mise en application est entourée de nombreux textes réglementaires apporte un changement important : désormais, un apprenti ou un salarié en contrat de professionnalisation peut effectuer une partie de son contrat à l'étranger pour une durée maximale d'un an. Il ressort du cadre législatif actuel que, durant la période de mobilité d'un apprenti, la relation contractuelle entre l'employeur et l'alternant peut être différente selon qu'il s'agisse d'une mobilité « courte » ou d'une mobilité « longue ». Ainsi, depuis début 2020, les firmes françaises employant des alternants peuvent « mettre en veille » leur contrat pendant une période d'absence longue à l'étranger. À l'inverse, quand leur séjour hors de France ne dépasse pas quatre semaines, ils sont « mis à disposition » par leur employeur. Plus précisément, cette « mise en veille » a pour conséquence principale et directe une suspension pour l'apprenti, ou le salarié sous contrat de professionnalisation, du bénéfice de ses droits légaux ou conventionnels, droits dont il aurait donc bénéficié s'il avait exécuté son travail dans l'entreprise française. En outre, ce sont les dispositions légales et conventionnelles du pays d'accueil qui s'appliquent du fait que le centre de formation ou l'entreprise d'accueil deviennent seuls responsables de l'alternant. De ce fait, il apparaît qu'en amont de la mise en œuvre du projet de mobilité, il devient primordial pour les étudiants ne disposant pas de ressources d'effectuer les démarches nécessaires pour obtenir des aides et financements auprès des différents financeurs tels que les opérateurs de compétences de l'employeur, les organismes gérant des programmes européens comme Erasmus +, ou encore les collectivités territoriales. Toutefois, certains académies et professeurs universitaires s'élèvent contre ce système de financement basé sur l'obtention de subventions et d'aides et cela même s'il peut être complété, le cas échéant, par une rémunération accessoire ou une rémunération directe par l'entreprise étrangère. Selon eux, ce processus de « mise en veille » n'est pas adapté aux périodes académiques qui demandent bien souvent des déplacements à l'international supérieurs à quatre semaines pour pouvoir valider un parcours scolaire. Pire, ils voient dans cette suspension une aberration contraire à l'esprit du législateur qui a développé l'apprentissage comme une opportunité pour les jeunes, comme pour leurs employeurs, en permettant aux étudiants d'être rémunérés tout en développant des compétences utiles à l'entreprise employeuse. Il faut rappeler que la poursuite d'études à l'international est un atout pour ces entreprises, car elle permet à leurs apprentis de suivre des enseignements fournis par des partenariats internationaux, souvent prestigieux, qui offrent à ces étudiants un complément de formation et une montée en compétence non négligeable et même bien souvent primordiale pour la continuité de leurs études. Pour toutes ces raisons, elle lui demande d’apporter des éclaircissements sur ce choix de ne pas impliquer l'entreprise dans le financement du parcours scolaire des alternants dans le cadre de leur mobilité internationale. En ce sens, elle lui demande si elle pense que des adaptations du cadre législatif et réglementaire pourraient être envisageables sur cette question afin, par exemple, que soient distinguées les périodes faites « en entreprise », non rémunérées par l'entreprise employeuse initiale et les périodes scolaires rémunérées conformément au modèle classique de l'apprentissage et ce quel que soit le lieu du centre de formation de l’étudiant, qu’il soit situé en France ou à l'étranger.
Réponse publiée le 26 avril 2022
La loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » du 5 septembre 2018 a permis de poser un nouveau cadre juridique pour la mobilité à l'étranger des apprentis et des bénéficiaires de contrats de professionnalisation. Ces dispositions ont effectivement permis de créer deux types de mobilités, en fonction notamment de la durée de la période à l'étranger : la mobilité aboutissant à la mise à disposition de l'alternant au sein du pays d'accueil, la mobilité aboutissant à la « mise en veille » du contrat de l'alternant pendant la période de mobilité. L'article L.6222-42 du code du travail dispose que « Pendant la période de mobilité dans un Etat membre de l'Union européenne autre que la France ou hors de l'Union européenne, l'entreprise ou le centre de formation d'accueil est seul responsable des conditions d'exécution du travail de l'apprenti, telles qu'elles sont déterminées par les dispositions légales et conventionnelles en vigueur dans le pays d'accueil, notamment ce qui a trait : 1° à la santé et à la sécurité au travail ; 2° à la rémunération ; 3° à la durée du travail ; 4° au repos hebdomadaire et aux jours fériés (…) Pour les périodes de mobilité n'excédant pas quatre semaines, une convention de mise à disposition organisant la mise à disposition d'un apprenti peut être conclue entre l'apprenti, l'employeur en France, le centre de formation en France et le centre de formation à l'étranger ainsi que, le cas échéant, l'employeur à l'étranger. ». Ainsi, la mise en veille du contrat de l'apprenti pendant sa période de mobilité à l'étranger est obligatoire en l'état actuel de la loi, si cette mobilité est de plus de 4 semaines. Si la mobilité est d'au plus 4 semaines, l'employeur peut décider d'opter entre mise en veille du contrat ou mise à disposition de son apprenti. Autoriser le statut de « mise à disposition de l'alternant » pour les mobilités de plus de 4 semaines dès lors que le maitre d'apprentissage et l'alternant en conviennent, est aujourd'hui juridiquement impossible. Le Gouvernement, conscient des difficultés que peut engendrer l'obligation de mise en veille du contrat de travail de l'alternant, souhaite rendre possible, par une modification législative, la mise à disposition pour les mobilités de plus de 4 semaines et lever ce frein qui n'avait pas été identifié au moment de la réforme de l'apprentissage. Cette modification de la loi sera proposée dès qu'un vecteur législatif le permettra.
Auteur : Mme Stéphanie Do
Type de question : Question écrite
Rubrique : Formation professionnelle et apprentissage
Ministère interrogé : Travail, emploi et insertion
Ministère répondant : Travail, emploi et insertion
Dates :
Question publiée le 15 février 2022
Réponse publiée le 26 avril 2022