Contrebande de tabac
Question de :
M. Dominique Potier
Meurthe-et-Moselle (5e circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Dominique Potier attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la contrebande de tabac. Le volume des ventes de tabac en France a chuté de 6,2 % en 2021 par rapport à 2020. Cette baisse de volumes vendus en France s'explique avant tout par une importante progression de la contrebande de tabac étranger, bien moins cher. Aussi, la contrebande prolifère dans les régions frontalières, les douanes ne pouvant appliquer la restriction à une cartouche de cigarette achetée, faute d'être en capacité de contrôler chaque véhicule. Dans la région Grand Est, la proximité du Luxembourg suscite un trafic considérable, dont le confinement en 2020 a pu donner en creux une estimation de l'ampleur ; les ventes de tabac des buralistes à proximité des frontières, alors fermées, avaient augmenté de 44 %. Il est vraisemblable qu'auparavant près d'une cigarette sur deux provenait de la contrebande, dans ce segment de consommation. Le marché parallèle se déploie de plus sur les réseaux sociaux, avec des groupes de vente sur Facebook, contre lesquels l'action est encore insuffisante, faute de l'application de sanctions pénales. La contrebande de tabac affaiblit la politique française de lutte contre le tabagisme et représente un important manque à gagner pour les bureaux de tabacs. C'est pourquoi les associations de buralistes demandent une harmonisation fiscale européenne sur le tabac et l'interdiction totale d'acheter du tabac à l'étranger et sur les réseaux sociaux. Il lui demande comment le Gouvernement entend mettre fin à la contrebande de tabac, en ligne et aux frontières, pour des raisons de justice fiscale et de santé publique.
Réponse publiée le 10 mai 2022
La contrebande et les trafics illicites de produits du tabac portent atteinte à la politique de santé publique, nuisent aux finances publiques et sont générateurs de menaces pour la sécurité publique. C'est pourquoi le Gouvernement a fait de la lutte contre le trafic illégal de produits du tabac, sous toutes ses formes, une priorité d'action de la douane. C'est ainsi qu'en 2021 la douane a réalisé 18 284 constations (+18,4% en un an) ayant conduit à la saisie de 402,1 tonnes de tabacs de contrebande sur le territoire natyional (+41,3% en un an). Malgré la hausse des saisies concomitante sur le territoire national, il n'est pas exact d'avancer que l'intégralité de la baisse des volumes de produits du tabac livrés sur le territoire français, entre 2021 et 2020, est due à la seule évolution des phénomènes de contrebande de tabac étranger. Cette baisse s'explique en effet également par une variété de facteurs, comme la baisse de la consommation de produits du tabac et/ou du nombre de fumeurs, ou encore une substitution entre les produits du tabac manufacturés classiques et d'autres modes de consommation (comme la cigarette électronique ou le tabac dit « à chauffer »), ainsi que l'acquisition de traitements d'aide à l'arrêt du tabac (en hausse continue de 2014 à 2019, dernier exercice plein analysé). S'agissant de certaines régions frontalières, il a pu être constaté, avec les mesures de restriction de la circulation prises à l'occasion de la crise sanitaire du Covid 19, que les volumes de tabac vendus dans le réseau légal des débitants de tabac pendant la durée de ces mesures avaient connu une forte augmentation. Cette évolution corrobore le constat fait par les services douaniers d'une forte exposition des régions proches de certains États membres, comme le Luxembourg, au phénomène des achats transfrontaliers de produits du tabac. Ces achats nourrissent des trafics locaux, contre lesquels la douane est pleinement mobilisée aux côtés de ses partenaires. Parallèlement, sur le volet juridique, et en droit français, il est déjà interdit de faire l'acquisition de produits du tabac manufacturés sur les réseaux sociaux, en application de l'article 568 ter du code général des impôts d'une part, et des dispositions régissant le monopole de vente des produits du tabac manufacturé, d'autre part. L'acquisition de produits du tabac à l'étranger, si elle n'est pas interdite, est fortement limitée. L'article 575 I du code général des impôts prévoit ainsi, par exemple, la limitation à 200 cigarettes la quantité en deçà de laquelle leur acquisition n'est pas présumée avoir été effectuée à des fins commerciales. Parallèlement, pour permettre une lutte plus efficace contre les trafics, le Gouvernement s'est montré, dans le cadre de la loi de finances pour 2022, favorable au renforcement des sanctions encourues au titre de l'article 1791 ter du CGI et à l'extension du périmètre de la présomption d'illicéité d'un envoi de produits du tabac manufacturés, prévue à l'article 568 ter du CGI. Pour compléter ces dispositifs, la France plaide au niveau européen pour interdire l'ensemble des ventes par correspondance de produits du tabac manufacturé au sein de l'Union, pour abaisser la franchise des achats transfrontaliers, ainsi que pour obtenir une harmonisation par le haut des niveaux de fiscalité frappant les produits du tabac dans les différents États membres. Enfin, la direction générale des douanes et droits indirects met en œuvre des moyens considérables pour identifier et réprimer les trafics illicites de produits du tabac effectués sur internet, et plus particulièrement sur les réseaux sociaux. Elle fait notamment usage de l'expertise de Cyberdouane, service spécialisé dans la lutte contre la fraude sur internet, dont l'action est relayée par un réseau de traque des réseaux de fraude sur internet, actif au sein de certaines directions régionales des douanes.
Auteur : M. Dominique Potier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Commerce et artisanat
Ministère interrogé : Économie, finances et relance
Ministère répondant : Comptes publics
Dates :
Question publiée le 22 février 2022
Réponse publiée le 10 mai 2022