Pouvoir d'achat en Outre-mer
Question de :
Mme Josette Manin
Martinique (1re circonscription) - Socialistes et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 10 novembre 2021
POUVOIR D'ACHAT EN OUTRE-MER
M. le président. La parole est à Mme Josette Manin.
Mme Josette Manin. Monsieur le ministre des outre-mer, nous le savons tous ici, la vie est plus chère outre-mer qu'elle ne l'est en France hexagonale et la dépendance aux importations représente un handicap perpétuel. Les causes sont structurelles, mais aussi conjoncturelles.
Douze ans après les mouvements sociaux de 2009 en Martinique et en Guadeloupe, qui dénonçaient la vie chère, et malgré la loi du 20 novembre 2012 destinée à réguler les rapports économiques en outre-mer et à dynamiser la concurrence, le différentiel de prix en défaveur des outre-mer persiste.
Pire, il se creuse ! J'en veux pour preuve les prix confiscatoires des carburants et du gaz domestique dans nos territoires, ou encore les prix aberrants des services, des biens d'équipement, des matériaux et des produits alimentaires.
Tous les acteurs économiques insistent actuellement sur l'explosion des coûts du fret, multipliés par quatre et devenus insoutenables pour les importateurs et les clients, sur lesquels ils reposent en bout de chaîne. Jusqu'à présent, le tissu économique ultramarin, majoritairement composé de TPE – très petites entreprises – et de PME – petites et moyennes entreprises – a tant bien que mal tenu le choc de la crise du covid-19. Cependant, la hausse du coût du fret aérien et maritime, qui s'ajoute à des écarts de niveau de vie et de pauvreté importants avec la France hexagonale, pourrait précipiter son délitement.
Cela étant, dans ce contexte moribond, j'entrevois une éclaircie : le souhait de plus en plus clair des jeunes ultramarins de favoriser l'essor et la diversification économique de leur territoire d'origine en se réinstallant sur place ou en finançant des activités nouvelles, créatrices d'emplois, de valeur ajoutée et davantage concurrentielles.
Quelles mesures spécifiques le Gouvernement prévoit-il de prendre afin de préserver le pouvoir d'achat des populations ultramarines et de faire des jeunes actifs de ces territoires les protagonistes durables d'un essor économique tant espéré ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Stéphane Peu applaudit aussi.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des outre-mer.
M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer. Merci pour votre question. Depuis 2009, du chemin a été parcouru, notamment grâce à la loi votée sous l'ancienne législature, et Gabriel Attal a rappelé tout à l'heure l'ensemble des dispositions prises par le Gouvernement en faveur du pouvoir d'achat sur le plan conjoncturel, lesquelles s'appliquent bien sûr aux DROM – départements et régions d'outre-mer.
Cela étant, vous nous interrogez sur les réformes structurelles à mener, introduisant en cela nos conversations à venir sur les crédits de la mission Outre-mer du projet de loi de finances (PLF) pour 2022. À cet égard, je vois cinq chantiers principaux.
Le premier, que vous avez évoqué, porte évidemment sur le fret. Nous y reviendrons ce soir, mais l'aide au fret constitue un dossier sensible et important. Nous voyons bien que nous sommes au bout d'une logique et qu'il va nous falloir réfléchir à une réforme.
Le deuxième chantier concerne la fiscalité locale, car désormais, nous le savons, l'octroi de mer est parfois incompris par le citoyen-consommateur ultramarin. Pour prendre l'exemple du carburant, que vous avez aussi utilisé, l'État ne perçoit plus un euro de taxe sur le carburant en outre-mer, car ce sont les collectivités territoriales qui bénéficient de cette recette fiscale, par l'intermédiaire de l'octroi de mer ou de la TICPE – taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques. Nous devons mener une réflexion dans ce domaine, et ce, bien sûr, en concertation avec les élus locaux et non contre eux.
Le troisième chantier est celui des dépendances, qui s'est présenté à nous avec acuité lors des confinements successifs, notamment en ce qui concerne les matières premières agricoles. Dans ce domaine, nous voyons néanmoins que le plan de relance produit ses effets : Julien Denormandie pourrait vous le dire, que ce soit à La Réunion ou dans votre département, nous développons des modèles qui doivent nous permettre de réduire les prix.
Les monopoles – quatrième chantier – constituent une autre question sensible qu'il faut regarder en face. Je le dis sans ambages, la covid-19 nous a fait prendre du retard dans ce domaine et il va nous falloir le rattraper : il s'agit presque d'un sujet de campagne présidentielle.
M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre.
M. Sébastien Lecornu, ministre . Enfin, la cinquième et dernière bataille, que nous mènerons avec Élisabeth Borne, est celle de l'emploi, notamment des jeunes, car l'amélioration du pouvoir d'achat passe aussi par le travail que l'on donne à notre jeunesse. De cela aussi, nous serons amenés à discuter tout à l'heure. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)
Auteur : Mme Josette Manin
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Outre-mer
Ministère répondant : Outre-mer
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 novembre 2021