15ème législature

Question N° 4549
de Mme Chantal Jourdan (Socialistes et apparentés - Orne )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Affaires européennes
Ministère attributaire > Affaires européennes

Rubrique > immigration

Titre > Crise à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie

Question publiée au JO le : 24/11/2021
Réponse publiée au JO le : 24/11/2021 page : 10691

Texte de la question

Texte de la réponse

CRISE À LA FRONTIÈRE ENTRE LA POLOGNE ET LA BIÉLORUSSIE


M. le président. La parole est à Mme Chantal Jourdan.

Mme Chantal Jourdan. Ma question s'adresse au secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

Il est nécessaire de continuer à rappeler qu'un drame humain se joue depuis plusieurs semaines à la frontière de la Pologne, en Biélorussie. Si des premiers rapatriements ont été effectués, la situation reste tragique.

Je veux dire nos pensées pour ces femmes, ces hommes, et surtout ces enfants, utilisés comme les pions d'une guerre hybride qui n'est pas la leur, manipulés par le régime biélorusse qui, dans une nouvelle stratégie de déstabilisation de l'Europe, se rend coupable de crimes odieux.

Nous le savons, ce type de manœuvres est appelé à se répéter. Face à cela, la solution ne peut pas être de construire des murs, tout d'abord parce que cela ne fonctionne pas, mais surtout parce que c'est dans sa puissance, son indépendance et son humanité que l'Europe doit trouver les solutions pour apparaître suffisamment forte, unifiée et ferme sur ses principes et ses valeurs afin de dissuader ces tentatives de déstabilisation. (Mme Valérie Rabault applaudit.)

Les sanctions prises sur le court terme par l'Union européenne pour cibler les personnes et organisations qui participent à ce trafic d'êtres humains sont une bonne chose. Cependant l'Union a besoin d'une réponse à long terme – nous avons d'ailleurs abordé cette question dans le rapport de la commission d'enquête sur les migrations publié la semaine dernière.

Monsieur le secrétaire d'État, comment la France, notamment dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne, compte-t-elle faire avancer le pacte sur la migration et l'asile alors même qu'il existe de fortes divergences au sein de l'Union sur ces questions ?

Par ailleurs, dans l'immédiat, que pouvons-nous faire pour mettre à l'abri toutes ces personnes amassées à nos frontières dans des conditions inhumaines ? Dans le cadre des discussions européennes, un couloir humanitaire pourrait-il être ouvert rapidement, ou, tout au moins, l'accès à l'aide humanitaire peut-il être permis dans la zone frontalière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC – M. Florian Bachelier applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

M. Clément Beaune, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Vous avez raison de revenir sur cette situation et sur le drame qu'elle représente. Je tiens d'abord à rappeler qu'il ne s'agit pas d'une crise migratoire comme nous en avons connu par le passé, pas plus que d'une vague migratoire massive ou spontanée, mais d'une agression organisée par un régime dictatorial sévissant à nos portes, la Biélorussie, qui bénéficie d'un certain nombre de complicités.

La réponse à apporter à très court terme sera impérativement européenne : tous ceux qui expliquaient que les questions migratoires se traitent exclusivement derrière les frontières nationales constatent désormais à quel point les défis sont européens. Nous résoudrons cette crise si nous agissons en Européens, avec la plus grande fermeté. Je réaffirme ici que notre solidarité à l'égard de la Pologne – mais aussi de la Lituanie et de la Lettonie, qui sont également concernées – est totale. Nous répondrons de manière efficace tout en restant fidèles à nos valeurs, que vous avez rappelées.

Nous menons déjà une action européenne : de nouvelles sanctions, qui seront détaillées dans les tout prochains jours et viseront une trentaine d'individus ou d'entités, ont été décidées. Cet après-midi même, le président du Conseil européen, Charles Michel a par exemple annoncé que la compagnie biélorusse Belavia ne pourrait plus louer d'avions en Europe. Il s'agit là d'une nouvelle mesure très concrète.

M. Jean-Louis Bourlanges. Très bien !

M. Clément Beaune, secrétaire d'État . L'action diplomatique de l'Union européenne, à laquelle la France prend toute sa part, a permis de procéder à des suspensions de vols, afin de mettre un terme à ce trafic organisé. Cette démarche doit se poursuivre dans les prochains jours. L'Europe a les moyens d'agir, et c'est seulement en Européens que nous répondrons à ce défi.

Vous avez aussi raison de souligner que cette crise organisée montre à quel point l'Europe doit progresser en matière migratoire. Ne nous le cachons pas : il sera très difficile de faire progresser le pacte européen sur la migration et l'asile, y compris lorsque la France exercera la présidence du Conseil de l'Union européenne. Mais Gérald Darmanin et moi-même travaillons, sous l'autorité du Président de la République, à définir des mesures concrètes et des mécanismes de solidarité européens qui nous permettront d'avancer. Nous veillerons en outre, afin de mieux tenir nos frontières extérieures, à renforcer l'agence Frontex, dont nous avons tant besoin aujourd'hui, pour répondre de manière à la fois ferme et humaine, en évitant les excès, comme vous nous y invitez. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)