Question au Gouvernement n°461 : politique migratoire

15ème Législature

Question de : M. Boris Vallaud (Nouvelle-Aquitaine - Nouvelle Gauche), posée en séance, et publiée le 17 janvier 2018


POLITIQUE MIGRATOIRE

M. le président. La parole est à M. Boris Vallaud, pour le groupe Nouvelle Gauche.

M. Boris Vallaud. Monsieur le Premier ministre, la semaine dernière, le groupe Nouvelle Gauche a reçu un grand nombre d'associations œuvrant auprès des femmes, des hommes, des enfants qui, après des milliers de kilomètres, se sont échoués sur nos côtes, dans nos villes et nos villages. Ces associations dénoncent l'arrachage de couvertures, la lacération de tentes, la circulaire de votre ministre de l'intérieur qui organise le recensement administratif dans les centres d'hébergement d'urgence et met en cause l'inconditionnalité de l'accueil. Nombre de ces associations doutent de votre parole.

Aujourd'hui dans le journal Le Monde, Jean Pisani-Ferry, Thierry Pech, des intellectuels, des syndicalistes s'interrogent sur la duplicité de la parole présidentielle à ce sujet, redoutant un double langage, « celui des tribunes », d'une part, « celui de la nuit », d'autre part.

Ma question vise à lever le doute sur cette éventuelle duplicité.

Le 20 décembre dernier, votre gouvernement a annoncé renoncer, dans son projet de loi sur l'immigration et l'asile, à la possibilité pour la France de renvoyer des demandeurs d'asile effectuer leurs démarches dans un pays tiers sûr, non européen, par lequel ils seraient passés avant d'arriver.

Or votre gouvernement négocie au Conseil européen un projet de règlement « instituant une procédure commune en matière de protection internationale » qui définit de façon très large la notion de pays sûr, sans se préoccuper, par exemple, de savoir s'il y existe une protection au titre du droit d'asile comparable à celle des pays de l'Union ; le texte propose même que soient considérés comme sûrs des pays dont certaines régions sont en guerre et où certaines catégories de personnes sont menacées. Ce projet de règlement serait d'application directe et conduirait ainsi à instituer en France la faculté à laquelle vous avez semblé renoncer en décembre dernier.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous confirmer que la position choisie au niveau national ne sera pas contredite par votre ministre de l'intérieur au Conseil européen ? Pouvez-vous nous confirmer que vous vous opposerez à ce projet de règlement et que vous n'êtes pas subrepticement en train de négocier à Bruxelles ce que vous prétendez abandonner à Paris ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NG et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

M. Claude Goasguen. C'est n'importe quoi !

M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, j'ai bien entendu votre question, et je tiens à dire tout de suite que nous respectons, bien sûr, les intellectuels et les économistes, essentiels à la vitalité démocratique et pour éclairer la prise de décision. (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe NG.)

M. Fabien Di Filippo. Vous les respectez quand ils vont dans votre sens !

Mme Jacqueline Gourault, ministre . Le Président de la République est aujourd'hui à Calais pour dialoguer sur le terrain avec l'ensemble des acteurs de la politique migratoire - élus, associations, mais aussi forces de sécurité - et rappeler la ligne du Gouvernement en ce domaine. Cette ligne est claire : humanité et efficacité. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

Humanité, parce que c'est l'honneur de la France que d'accueillir celles et ceux qui fuient les théâtres de guerre, qui, dans leur pays, sont victimes de persécutions pour des raisons politiques, ethniques ou religieuses.

Efficacité, car on ne saurait garantir le droit d'asile sans maîtriser les flux migratoires, sans reconduire à la frontière celles et ceux qui n'ont pas vocation à rester sur notre sol.

M. Claude Goasguen. Appliquez la loi !

Mme Jacqueline Gourault, ministre . Ont été récemment publiés les chiffres de la demande d'asile ; vous les connaissez : plus de 100 000 personnes ont demandé l'asile cette année. Nous savons aussi que 85 000 personnes ont fait l'objet d'une non-admission à la frontière. Le ministre de l'intérieur rappelle souvent que l'on ne peut pas accueillir dignement chaque année l'équivalent de la ville de Rennes.

Mme Laurence Dumont. Répondez à la question !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je réponds, madame. La position du Gouvernement est claire : humanité et efficacité. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.) Le prochain projet de loi sur l'immigration et l'asile, en cours d'élaboration, visera à appliquer cette politique. J'étais d'ailleurs à Matignon la semaine dernière (Exclamations sur les bancs du groupe LR), auprès du Premier ministre et du ministre de l'intérieur, pour la présentation des principaux points du projet aux associations (Exclamations sur les bancs du groupe FI), avec lesquelles nous poursuivons naturellement le dialogue et le travail. (Exclamations sur divers bancs.)

Je tiens à dire pour terminer…

M. le président. Merci, madame la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. …que nous faisons confiance à tous les personnels qui travaillent pour accueillir les migrants. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.)

Données clés

Auteur : M. Boris Vallaud (Nouvelle-Aquitaine - Nouvelle Gauche)

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Immigration

Ministère interrogé : Intérieur (Mme la ministre auprès du ministre d'État)

Ministère répondant : Intérieur (Mme la ministre auprès du ministre d'État)

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 janvier 2018

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