Question écrite n° 4642 :
Stoppons le projet gazoduc STEP et investissons dans les énergies renouvelables

15e Législature

Question de : Mme Muriel Ressiguier
Hérault (2e circonscription) - La France insoumise

Mme Muriel Ressiguier alerte M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les contradictions relevées entre la mise en œuvre du projet gazoduc South transist east Pyrénées (STEP) et les objectifs de la France vers la nécessaire transition écologique et la question des relations Nord/Sud qui devraient être conformes aux principes de coopération tant sur le plan de la solidarité que de l'écologie. En effet, dès 2004 l'Union européenne décidait l'ouverture et la libéralisation du marché de l'électricité et du gaz. La mise en place d'un grand marché européen de l'énergie actait son contrôle par des opérateurs privés en remplacement des grandes entreprises d'État et des services publics de l'énergie, l'argument asséné étant qu'il fallait répondre sans cesse à une augmentation constante de la consommation et à une demande toujours croissante. Le modèle énergétique basé sur la croissance sans limite et l'utilisation des ressources fossiles et fissiles n'est plus acceptable. Nous partageons l'idée selon laquelle il faut construire une stratégie énergétique relocalisée, basée sur les besoins essentiels des populations et dans laquelle les communautés doivent avoir un droit de regard sur les structures mises en place. Le respect de la « règle verte », qui consiste à ne pas prélever à la nature plus qu'elle ne peut régénérer, est rendu nécessaire par le changement climatique, que plus personne ne peut nier. L'Union de l'énergie, portée par la Commission européenne, est axée d'une part vers la négociation avec les pays ressources dans le but d'une moindre dépendance vis-à-vis du gaz russe et d'autre part vers la construction d'infrastructures dites « mutualisées » d'interconnexion des réseaux énergétiques. En novembre 2015, la Commission européenne a listé des projets d'infrastructures énergétiques essentiels, dit « projets d'intérêts commun » (PIC) visant à contribuer « à la mise en place progressive de l'Union de l'énergie par l'intégration des marchés de l'énergie en Europe et la diversification des sources d'énergie et des voies d'acheminement ». Ceux-ci vont bénéficier de procédures accélérées pour l'octroi des autorisations et de la participation financière de l'Union européenne par subventions au titre de l'interconnexion en Europe (MIE). Parmi les projets d’intérêt commun, le STEP prévoit de relier les réseaux de gazoduc de la Catalogne espagnole avec ceux du sud de la France et doit passer par la plaine du Roussillon pour acheminer le gaz algérien au reste de l'Europe. Avec le STEP, ce sont 120 km de nouveaux gazoducs qui seront construits entre la frontière du Perthus et Carcassonne, le passage sur 92 communes de l'Aude et des Pyrénées-Orientales et la construction de 3 stations de compression pour réguler le transit (Barbaira, Montpellier, Saint-Martin-de-Crau). Outre le coût supporté en partie par les consommateurs français et européens (le financement est estimé à 8 300 000 euros avec une aide de l'Union européenne maximale de 4 150 000 euros qui devra être complétée par des financements nationaux publics et privés) pour garantir des profits privés, l'impact environnemental va être destructeur pour les espaces naturels, les terres agricoles et les rivières et le chantier aura des conséquences dramatiques sur les paysages, l'agriculture et l'urbanisation. De plus, la mise en œuvre de ce chantier est contraire aux décisions prises lors de l'accord de Paris sur le climat en 2015. Pour rappel, le méthane est très néfaste pour le climat de par son rôle propre dans le réchauffement climatique, le CH4 est beaucoup plus émetteur à effet de serre que le CO2, surtout dans l'exploitation des gaz de schiste. Or le gaz prévu pour passer dans ce tuyau proviendra essentiellement d'Algérie et ce pays possède la 3ème réserve mondiale estimée de gaz non conventionnels. Comme la ministre le sait, l'extraction des gaz s'effectue déjà en Algérie par la fracturation hydraulique. Il ne saurait être acceptable que les pays de l'Union européenne n'autorisant pas chez eux l'extraction des gaz de schiste à cause des multiples risques que cela induit se tournent vers l'Algérie pour le produire, en laissant supporter à ce pays les risques et les aberrations écologiques qui sont liés à ce type d'extraction (notamment la pollution des nappes phréatiques dans des régions où le manque d'eau est criant) ! Cela va à l'encontre des relations de coopération Nord/Sud telles que l'on doit les concevoir et les construire : respectueuses, solidaires, économiquement, socialement et écologiquement responsables. Fin janvier 2018, à Perpignan et Narbonne se tiendront les réunions de clôture de la concertation « accélérée » préalable, organisée par le maître d'œuvre lui-même, transport et infrastructures gaz France (TIGF) avec pour garant la Commission nationale du débat public (CNDP), autorité administrative indépendante qui a pour mission « d'informer les citoyens et de faire ne sorte que leur point de vue soit pris en compte dans le processus de décision » avec le droit de commenter les projets, « de les critiquer [...] de participer à leur amélioration, à leur remise en cause, à leur poursuite dans de meilleures conditions ou à leur abandon ». Saisie par de nombreux citoyens languedociens qui sont inquiets, elle attire son attention sur les contradictions relevées entre les orientations de la France en matière de transition écologique et les conséquences d'un tel projet sur le territoire national et en Algérie et lui demande de bien vouloir envisager l'abandon ou un moratoire de ce nouveau projet anti-écologique.

Réponse publiée le 20 février 2018

La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte fixe pour objectif de réduire la consommation d'énergie fossile de 30 % à l'horizon de 2030 et d'augmenter massivement le recours aux énergies renouvelables. Il convient cependant durant cette phase de veiller au maintien de conditions optimales pour l'approvisionnement en énergie, non seulement en France mais également au niveau de l'Union européenne. Le projet de gazoduc South Transist East Pyrénées (STEP) est un projet d'interconnexion entre la France et l'Espagne porté par TIGF pour la partie française et Enagas pour la partie espagnole. L'objectif principal de ce projet d'interconnexion est de transporter du gaz norvégien et russe vers la péninsule ibérique. Ce projet ne devrait donc pas entraîner de modification des origines du gaz naturel mis à la consommation en France et donc de l'impact environnemental de celui-ci. L'importation du gaz en provenance de Russie et de Norvège est perçue commun un moyen pour la péninsule ibérique d'avoir accès à un approvisionnement en gaz naturel plus diversifié et plus compétitif. C'est la raison pour laquelle le projet STEP s'inscrit dans le corridor des interconnexions Nord-Sud de gaz en Europe de l'Ouest qui vise, comme indiqué dans le règlement no 347/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2013 concernant des orientations pour les infrastructures énergétiques transeuropéennes, à diversifier davantage les voies d'approvisionnement et à améliorer la capacité de livraison de gaz à court terme. Le projet STEP figure ainsi dans la liste des projets d'intérêts communs adoptée par la Commission européenne le 23 novembre 2017, au titre qu'il contribue à la réalisation des objectifs de l'Europe dans le domaine de l'énergie et du climat et qu'il constitue un des éléments déterminants pour l'Union de l'énergie. Des études techniques et économiques d'évaluation de ce projet sont actuellement menées, conformément à la déclaration de Madrid signée le 4 mars 2015 entre la France, l'Espagne, le Portugal et la Commission européenne. Ces études permettront d'évaluer l'intérêt du projet au regard de son coût et ainsi d'éclairer la décision de réaliser ou non ce projet. Le Gouvernement français est particulièrement vigilant pour que la part du financement supportée par les consommateurs français ne soit pas supérieure aux bénéfices qu'ils retireraient de cette infrastructure. Ceci sera par ailleurs évalué par la Commission de régulation de l'énergie, régulateur indépendant, à qui le projet devra être soumis une fois finalisé, ainsi qu'à son homologue espagnole. Dans tous les cas, la réalisation éventuelle de ce projet ne pourra être envisagée que dans le cadre d'un respect de conditions environnementales optimales, conformément aux dispositions du code de l'environnement, et dans le cadre des procédures définies par la loi, en particulier en matière de consultation du public.

Données clés

Auteur : Mme Muriel Ressiguier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire

Ministère répondant : Transition écologique et solidaire

Dates :
Question publiée le 23 janvier 2018
Réponse publiée le 20 février 2018

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