Question orale n° 464 :
Projet Charles de Gaulle-Express

15e Législature

Question de : Mme Danièle Obono
Paris (17e circonscription) - La France insoumise

Mme Danièle Obono alerte Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, sur les conséquences environnementales, sociales, territoriales et démocratiques du projet de liaison Charles de Gaulle-Express entre la gare de l'est à Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle.

Réponse en séance, et publiée le 19 décembre 2018

LIAISON « CHARLES-DE-GAULLE EXPRESS »
Mme la présidente. La parole est à Mme Danièle Obono, pour exposer sa question, n°  464, relative à la liaison « Charles-de-Gaulle Express ».

Mme Danièle Obono. Ma question s’adresse à Mme la ministre des transports.

Depuis son lancement, le projet de liaison directe entre Paris et l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle nommé « Charles-de-Gaulle Express » rencontre, à raison, de fortes oppositions parmi lesquelles celles de nombreux citoyens et citoyennes, d'élus franciliens et franciliennes, dont la maire de Paris, et même du syndicat des transports Île-de-France mobilités. C'est en effet un projet absurde à plusieurs titres.

L'absurdité est d'abord écologique. Pour mettre en place le CDG Express, il va falloir construire de nouveaux rails entre Mitry-Mory et l'aéroport ; on rognera pour cela sur des terres agricoles. On nous dit que le CDG Express diminuera de 40 % l'utilisation de la voiture pour les trajets entre la capitale et l'aéroport, mais il assoit son financement sur une prévision du doublement du trafic aérien, qui est le plus polluant. C'est donc un non-sens qui va abîmer la biodiversité locale et contaminer d'autant plus l'air de la région parisienne.

C'est ensuite une absurdité sociale et territoriale. La liaison entre Paris et Roissy est aujourd'hui assurée par le RER B : 30 minutes de trajet pour un peu plus de 10 euros. Le CDG Express se destine exclusivement à la clientèle aéroportuaire, au coût de 24 euros pour 20 minutes de trajet. Le RER B dessert de nombreuses gares ; il est aujourd'hui bondé, tant les gens ont besoin de l'emprunter. Le CDG Express, lui, ne s'arrêtera pas dans ces gares, mais il empruntera des voies du RER B, saturant encore plus ce dernier. C'est donc un projet pour les riches, sans aucune plus-value économique pour les territoires qu'il traverse. Île-de-France Mobilités a d'ailleurs demandé l'arrêt du projet tant que toutes les garanties concernant les conséquences sur le RER B n'auront pas été données.

C'est évidemment une absurdité financière. Le coût du CDG Express a été relevé régulièrement, de 700 millions au début à plus de 2 milliards aujourd'hui. Il n'offre pourtant aucune garantie de rentabilité financière. L'État va prêter 1,7 milliard d'euros. Le financement de l'ensemble du projet repose en partie sur les recettes tirées du prix des billets. Mais qui peut assurer que les usagers et les usagères de l'aéroport préféreront prendre le CDG Express au RER B, bien moins cher ?

C'est enfin une absurdité démocratique. L'ensemble des informations concernant le montage financier n'ont pas été communiquées au public ; les règles de la concertation semblent ne pas avoir été respectées. Les avis recueillis dans les enquêtes publiques en 2016 étaient très majoritairement négatifs.

Ma question est simple, et relaie celle posée depuis des années par les citoyens réunis au sein du collectif « Non au CDG Express » : comptez-vous vous entêter dans ce grand projet inutile, ou bien mettre enfin un terme à cette absurdité que représente le projet du Charles-de-Gaulle Express ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Ne pouvant être présente, Mme la ministre des transports m'a chargée de vous répondre.

Le projet de CDG Express est essentiel pour l'attractivité économique et touristique de la région Île-de-France comme pour le développement de modes de transport plus propres, car il favorisera le report modal de la route vers le rail. L'utilité publique du projet a été confirmée par le Conseil d'État. Par ailleurs, l'enquête publique préalable à l'obtention des autorisations environnementales s'est achevée tout récemment, le 22 novembre dernier. Le ministre de la transition écologique et solidaire a désigné il y a quelques jours l'exploitant pressenti pour le CDG Express, à la suite d'un appel d'offres.

Concernant le calendrier des travaux, Mme Borne rencontrera dans les prochains jours la présidente de région pour en discuter. Le CDG Express ne se fera pas au détriment des lignes de transport du quotidien : c'est vrai tant pour le financement – aucune subvention n'est versée – que pour les travaux. Mme Borne sera très vigilante sur ce point : ces travaux ne devront pas avoir de conséquences pour les conditions de transports du quotidien, notamment sur le RER B.

Je souligne par ailleurs que le projet CDG Express s'est élaboré en coordination avec les autres projets de transport en Île-de-France. Ainsi, 180 millions d’euros sont prévus pour l'amélioration du RER B dans le cadre du dossier CDG Express. Plus généralement, le contrat de plan État-région d'Île-de-France prévoit des investissements de 7,6 milliards d’euros pour la période 2015-2020, dont 1,4 milliard d’euros pour l'État et 1,6 milliard d’euros pour la Société du Grand Paris. Concrètement, sans être exhaustif, il s'agit notamment des schémas directeurs des RER et des Transiliens, du prolongement d'EOLE, du prolongement de la ligne 11, de nouveaux tramways, de nouveaux trams-trains, de bus à haut niveau de service.

Enfin, le projet du Grand Paris Express viendra compléter le réseau existant – RER, Transilien et métro – grâce à des interconnexions, offrant ainsi aux Franciliens un moyen de transport supplémentaire, principalement en rocade. À terme, 200 kilomètres de lignes seront construits, c'est-à-dire autant que toutes les lignes du réseau actuel du métro parisien ; l'investissement sera de 35 milliards d’euros.

Les habitants de la Seine-Saint-Denis seront parmi les premiers à en bénéficier, notamment grâce à la mise en service de la ligne 16, qui ira jusqu'à Clichy-Montfermeil à l'horizon 2024.

Mme la présidente. La parole est à Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Madame la secrétaire d'État, vous n'avez pas répondu à certains des points que j'ai soulevés. Alors que je m'interrogeais sur l'intérêt écologique du projet, vous évoquez son attractivité. Mais pour qui ?

J'entends que votre stratégie consiste à attirer les financiers de la City, et de faire de la place de Paris un nouveau grand centre économique et financier. Dans cette perspective, le Charles-de-Gaulle Express représente une vitrine, qui ne servira pas l'intérêt général puisque – vous ne l'avez pas contredit – son coût écologique, social et démocratique pèsera sur les usagers, qui ne seront pas les Franciliens et les Franciliennes.

Ce grand projet dans lequel vous vous enferrez et que l'ensemble des acteurs remettent en cause, je le répète, est inutile et n'a aucun intérêt. Sa réalisation, qui portera atteinte à la collectivité à plusieurs niveaux, connaîtra certainement de nombreuses difficultés. Je pense que nous serons conduits à en discuter à nouveau dans cette assemblée.

Données clés

Auteur : Mme Danièle Obono

Type de question : Question orale

Rubrique : Transports urbains

Ministère interrogé : Transports

Ministère répondant : Transports

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 11 décembre 2018

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