Question au Gouvernement n° 4774 :
Situation dans les EHPAD

15e Législature

Question de : Mme Caroline Fiat
Meurthe-et-Moselle (6e circonscription) - La France insoumise

Question posée en séance, et publiée le 9 février 2022


SITUATION DANS LES EHPAD

M. le président. La parole est à Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Nous apprenons que le président Macron est bouleversé et choqué par les révélations sur Orpea. Bouleversé et choqué, pourquoi pas effondré ou anéanti ? À moins qu'il ne soit bouleversé par la chute des actions d’Orpea (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe LaREM) ou par le fait que certains journalistes font leur travail jusqu’au bout sans se laisser corrompre pour 15 millions d’euros ? Stop à l’hypocrisie !

En novembre 2018, lors du déplacement du président Macron à Pont-à-Mousson, je lui ai remis en main propre mon rapport d'information sur les EHPAD dans lequel la maltraitance institutionnelle était décrite !

Depuis le début de ce quinquennat, il ne se passe pas un jour sans que l’on reçoive des alertes sur la situation dans nos EHPAD : des familles qui culpabilisent, des résidents qui demandent à mourir, des soignants scandalisés et à bout. Cette semaine encore, j’ai été destinataire de nombreux signalements de la part du personnel du groupe lucratif Bridge, à Horbourg-Whir, à Lutterbach. En ce début d’année, les soignants ne sont plus remplacés, leurs primes ont été supprimées, le personnel travaille en mode dégradé, les tarifs ont augmenté et les résidents sont abandonnés à leur triste sort ! Tout cela n’a pas empêché le groupe de verser 4,5 millions d’euros à ses actionnaires en janvier. Orpea, Bridge, Korian, DomusVI et d'autres groupes prospères sont visés par de nombreuses accusations.

Le Gouvernement va-t-il continuer à s'en remettre à la justice comme s’il s’agissait de dysfonctionnements isolés ou bien compte-t-il faire interdire immédiatement les EHPAD privés lucratifs ? En octobre dernier, une nouvelle fois depuis 2017, nous dénoncions leurs pratiques inhumaines et notre groupe proposait à Mme la ministre chargée de l'autonomie de taxer à 100 % leurs dividendes pour mettre fin à la manne de l’or gris. Elle riait en nous écoutant. Pleure-t-elle maintenant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Il est tout à fait normal que vous nous interrogiez à ce sujet. La semaine dernière, Mme Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie, a reçu au sein de mon ministère les représentants d'Orpea. Deux enquêtes ont été diligentées : l'une est menée par l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) pour ce qui concerne l'organisation interne de ces établissements ; l'autre est confiée à l'Inspection générale des finances afin de déterminer si des montages financiers sont à dénoncer, voire à condamner. Vous connaissez notre détermination à agir (Exclamations sur quelques bancs du groupe FI) qui a été rappelée par le Président de la République lui-même.

S'agissant des moyens, j'ai du mal à vous suivre, même si j'ai l'esprit ouvert. Pourquoi établir une différence entre les établissements privés et publics ? Ayant comme vous travaillé dans des EHPAD privés et publics, j'ai constaté partout la même vocation parmi les personnels, la même volonté d'assurer le bien-être des résidents…

M. Ugo Bernalicis. Oui, parmi les gens qui y travaillent !

M. Olivier Véran, ministre . …et les mêmes tensions pesant sur les organisations tant la charge de travail est élevée. Que l'EHPAD soit privé ou public, il est très compliqué d'offrir de manière continue des soins de qualité quand il y a seulement deux membres du personnel pour s'occuper la nuit de cent résidents. Le statut de l'établissement importe peu en ce cas. Le cadre juridique aura en revanche son importance si, dans le cas précis d'Orpea, il est prouvé qu'il y a eu des montages financiers. Pour le reste, c'est l'accueil des personnes âgées en perte d'autonomie qu'il nous faut revoir dans son entier. (Exclamations sur quelques bancs du groupe FI.)

Nous n'avons pas attendu la semaine dernière pour avancer, vous le savez bien, vous qui avez consacré un rapport à ce sujet. Rappelons la création de la cinquième branche qui bénéficiera de 2,5 milliards de crédits supplémentaires chaque année, le virage domiciliaire, le recrutement en cours, déjà bien avancé, de 40 000 personnes, la revalorisation des salaires. Ce que nous voulons, c'est un changement de perspective : répondre à la demande des Français en permettant aux personnes âgées de rester à leur domicile le plus longtemps possible. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à Mme Caroline Fiat.

Mme Caroline Fiat. Vous vous étonnez, monsieur le ministre, eh bien la différence entre le public et le privé lucratif, je vais vous la rappeler : le public se défonce pour bien traiter les résidents alors que l'État ne lui donne pas de moyens tandis que le privé lucratif se défonce pour engranger des bénéfices à distribuer aux actionnaires. (M. Ugo Bernalicis applaudit.)

M. Sylvain Maillard. C'est un peu caricatural, tout de même !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Olivier Véran, ministre. Madame Fiat, vous parlez de groupes, je vous parle de soignants, de blouses blanches, de familles, d'éducateurs. Ce sont les mêmes dans le public et dans le privé. Ils attendent qu'on les soutienne, pas qu'on les ostracise. Nous régulons ce qui doit l'être et nous accompagnons ceux qui doivent l'être. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.)

Données clés

Auteur : Mme Caroline Fiat

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Dépendance

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 février 2022

partager