15ème législature

Question N° 4846
de M. Paul-André Colombani (Libertés et Territoires - Corse-du-Sud )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Transition écologique
Ministère attributaire > Transition écologique

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Risque de rupture énergétique en Corse

Question publiée au JO le : 23/02/2022
Réponse publiée au JO le : 23/02/2022

Texte de la question

Texte de la réponse

RISQUE DE RUPTURE ÉNERGÉTIQUE EN CORSE


M. le président. La parole est à M. Paul-André Colombani.

M. Paul-André Colombani. La Corse est au bord d'un nouveau black-out : tel est le cri d'alarme poussé par les représentants syndicaux d’EDF en Corse. Avec une population de 350 000 habitants et une fréquentation touristique d'environ 2,5 millions de personnes durant l'été, la Corse est au point de rupture énergétique, à tel point qu’EDF a demandé, l'été dernier, à ses clients de réduire leur consommation afin d'éviter des délestages, car notre capacité de production actuelle a atteint ses limites et le coût de l’interconnexion avec l'Italie devient exorbitant.

Notre politique énergétique est à bout de souffle. Nos installations sont vétustes. C'est le cas de la centrale du Vazzio, âgée de plus de quarante ans et toujours alimentée au fioul lourd, bien que située en pleine ville d'Ajaccio. Elle est obsolète. Je suis particulièrement inquiet pour la population qui habite à côté de cette centrale, qui emploie une technologie dépassée, particulièrement polluante, dont les émissions de soufre sont nocives. Tout cela crée une situation dramatique, qui conduit EDF à déployer des stratagèmes pour éviter la coupure généralisée – à savoir l’installation de groupes électrogènes, cachés dans le maquis, pour fournir de l’électricité à toute la Corse.

Voilà où nous en sommes arrivés. Cela est tout bonnement indigne d'un pays développé. M. Édouard Philippe, qui était à Ajaccio la semaine dernière, a constaté que, trois ans après les engagements qu’il avait pris, absolument rien n’a changé. La construction de la centrale du Ricanto n’a toujours pas débuté. L’échéance, fixée à 2023, est désormais impossible à tenir. Madame la ministre, quelles solutions comptez-vous mettre en place pour remédier à cette situation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LT.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.

Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Il faut appréhender correctement la situation de la Corse, où l'approvisionnement en électricité repose sur un trépied : un tiers issu d'énergies renouvelables, un tiers issu d'importations, un tiers issu de centrales thermiques, celles d'Ajaccio et de Bastia. En matière d'importation, il y a eu un problème – une panne technique sur l'interconnexion entre la Corse et la Sardaigne – qui est à l'origine de l'usage des groupes électrogènes, destinés à régler temporairement la situation. Fort heureusement, nous n'en sommes pas au black-out.

En revanche, l'un des enjeux est effectivement celui de la décarbonation et de la modernisation des centrales thermiques, en particulier celle du Vazzio à Ajaccio, au fioul lourd, qui est, vous avez raison, extrêmement polluante, en fin de vie, et qu'il faut changer.

Comme vous le savez, des procédures d'appels d'offres ont été lancées, pour alimenter au gaz la centrale de Bastia et une future centrale d'Ajaccio. Les offres reçues ne correspondaient pas au cahier des charges, qui se fondait sur des options retenues dans la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) spécifique à la Corse, qui a été révisée conjointement par l'État et la collectivité de Corse en décembre 2019. Il faut donc reprendre le processus : plusieurs options sont sur la table, qu'il faut examiner, s'agissant du gaz à Bastia et du remplacement du Vazzio pour la centrale du Ricanto. Il faut regarder par exemple la question des bioliquides, car nous devons désormais aller vite et trouver une solution.

Nous mettrons rapidement la dernière main aux nouvelles orientations, pour les partager avec la collectivité territoriale et l'ensemble des acteurs, présents au sein du Conseil de l’énergie, de l’air et du climat de Corse, auquel l'État participe. Dès lors, la PPE pourra faire l'objet d'une révision simplifiée, le plus rapidement possible.

Par ailleurs, pour le plus long terme, nous devons réviser totalement la PPE, pour poursuivre les efforts d'économie d'énergie et de verdissement du mix énergétique. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

M. le président. La parole est à M. Paul-André Colombani.

M. Paul-André Colombani. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais le compte n'y est pas. Le dossier corse traîne depuis plus de quinze ans dans les ministères : vous ne portez pas l'entière responsabilité de cette situation, évidemment, mais au moment où s'achève le présent mandat, le compte n'y est pas concernant la spéculation immobilière (M. Ugo Bernalicis applaudit), concernant la régulation du prix de l'essence, concernant l'évolution institutionnelle attendue. Et que dire d'une décision tombée pas plus tard qu'hier, prise par une commission administrative qui bafoue l'État de droit ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LT. – M. Ugo Bernalicis applaudit également.)