15ème législature

Question N° 516
de Mme Clémentine Autain (La France insoumise - Seine-Saint-Denis )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Titre > question kurde

Question publiée au JO le : 25/01/2018
Réponse publiée au JO le : 25/01/2018 page : 403

Texte de la question

Texte de la réponse

QUESTION KURDE


M. le président. La parole est à Mme Clémentine Autain, pour le groupe La France insoumise.

Mme Clémentine Autain. Monsieur le Premier ministre, comme vous le savez, au Nord d'Alep, le canton autonome kurde d'Afrin se trouve depuis cinq jours sous le feu nourri de l'armée turque. Le bilan est d'ores et déjà très lourd et les civils ne sont pas épargnés.

Une opération de cette ampleur ne s'improvise pas. Préparée depuis de longs mois, elle traduit la volonté farouche du président Erdogan de tout faire pour affaiblir les Kurdes et pour empêcher l'unification de leurs territoires. Elle témoigne aussi de la fuite en avant autoritaire d'un régime qui écrase et enferme toute opposition et toute critique, mais qui est pourtant reçu en visite officielle à l'Élysée. Le président Macron semble en effet se spécialiser dans les réceptions bienveillantes de chefs d'État dangereux pour la paix dans le monde. (Exclamations sur quelques bancs des groupes REM et LR.)

M. Fabien Di Filippo. C'est parce qu'il a l'âme d'un dictateur !

Mme Clémentine Autain. Oui, mes chers collègues, cette opération va renforcer le chaos qui règne en Syrie, pays déjà soumis aux attaques du régime de Bachar el-Assad, au détriment des populations civiles.

Comment ne pas voir l'hypocrisie du régime turc, qui a longtemps été aveugle sur ce qui se passait à la frontière avec la Syrie et qui a été capable d'attaquer les YPG – « unités de protection du peuple » –, ces Kurdes héroïques qui ont combattu Daech à Kobané et lui ont imposé une défaite terrestre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)

La France doit agir face à ce front qui pourrait en ouvrir d'autres dans cette région. L'initiative bienvenue du ministre des affaires étrangères auprès du Conseil de sécurité de l'ONU n'a malheureusement recueilli qu'un silence gêné. Pourtant, aujourd'hui en Syrie, les Kurdes sont les principales victimes d'un jeu d'alliances contradictoires qui les prennent en étau. Mais nous, nous ne pouvons pas abandonner ces alliés essentiels dans la lutte contre le terrorisme. Nous ne pouvons pas non plus nous taire quand M. Erdogan les insulte à Paris.

Monsieur le Premier ministre, quels sont les engagements du gouvernement français et votre plan d'action pour contribuer à régler cette question ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Madame la députée, il y a depuis longtemps une estime forte entre la France et le peuple kurde. Et, depuis longtemps aussi, il y a des divisions au sein de la communauté kurde. Il y a les Kurdes d'Iran ; il y a le Kurdistan irakien, lui-même divisé en deux, entre la tendance de M. Massoud Barzani et celle de M. Jalal Talabani ; il y a les Kurdes syriens du PYG, le parti de l'Union démocratique, que vous venez de citer ; il y a, enfin, le PKK. Lorsqu'on parle des Kurdes, il faut intégrer cette diversité et tenir compte du fait qu'il n'y a pas d'unité. Dans ces conditions, je voudrais vous dire trois choses.

Premièrement, nous sommes redevables et très reconnaissants aux Peshmerga, qui ont aidé la coalition à libérer l'Irak de Daech, en reprenant en particulier la ville de Mossoul.

M. Alexis Corbière. C'est eux qui sont bombardés !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . Nous avons aussi une très grande considération pour l'action qui a été menée par les forces du général Mazlum dans l'ensemble du Nord-Est syrien. Les combats continuent et nous les soutenons.

Mais, deuxièmement, nous nous opposons totalement au PKK, qui est une organisation terroriste (Exclamations sur les bancs du groupe FI), reconnue comme telle par la France et par l'Union européenne. Nous maintenons cette posture.

Mme Elsa Faucillon. C'est scandaleux !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . Troisièmement, madame Autain, il faudra que le règlement politique de la crise au Moyen-Orient, en Irak comme en Syrie, intègre de façon inclusive l'existence de communautés kurdes, qu'il faut respecter. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.)