15ème législature

Question N° 5252
de Mme Sarah El Haïry (Mouvement Démocrate et apparentés - Loire-Atlantique )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > traités et conventions

Titre > Situation des « Américains accidentels » en France

Question publiée au JO le : 06/02/2018 page : 883
Réponse publiée au JO le : 10/04/2018 page : 3057

Texte de la question

Mme Sarah El Haïry attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la question des « Américains accidentels ». En 2010 est adoptée aux États-Unis la loi FATCA (Foreign account tax compliance act) prévoyant que les banques des États ayant accepté cet accord, s'engagent à communiquer à l'IRS (Internal revenue service), l'administration fiscale américaine, tous les comptes détenus par des citoyens américains. En réponse à sa mise en œuvre unilatérale, est signé en 2013 un accord bilatéral entre la France et les États-Unis visant à reconnaître la portée extraterritoriale de cette loi. Toutefois, la loi FATCA, qui vise initialement à éviter la double imposition et prévenir l'évasion et la fraude fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, a des conséquences néfastes sur les « Américains accidentels », citoyens nés au États-Unis mais ayant quitté très tôt le territoire américain, en l'occurrence pour la France, et n'ayant conservé aucun contact avec leur pays d'origine. Si les « Américains accidentels » ne sont pas répertoriés par l'administration fiscale américaine, ils se voient, au nom de cette loi, dans l'obligation de payer un impôt différentiel aux États-Unis quand l'impôt français est inférieur à l'impôt américain. De plus, face aux obligations incombant aux banques françaises de transmission de l'information, les « Américains accidentels » se heurtent à de nombreuses difficultés. Ils sont tant exposés à des enquêtes et d'éventuelles poursuites de l'administration fiscale américaine qu'à la réticence des banques françaises, refusant parfois l'ouverture de compte ou de souscription de certains produits tels que l'assurance-vie ou des fonds communs de placement d'entreprise et allant parfois jusqu'à la fermeture de comptes. Afin d'échapper à cette situation, les « Américains accidentels » peuvent faire le choix de renoncer à leur nationalité américaine, solution qui présente une nouvelle fois de nombreux défauts. Cette procédure apparaît tant complexe que coûteuse puisque les citoyens « américains » doivent préalablement régulariser leur situation avec le fisc américain en faisant des déclarations rétroactives sur plusieurs années comprenant des pénalités fiscales de retard. Face à la complexité de la procédure, le recours à un des cabinets spécialisés apparaît inévitable. Selon les auditions, cette démarche coûterait entre 15 000 et 20 000 euros. Cette question n'est pas nouvelle puisqu'elle a déjà fait l'objet d'un rapport parlementaire publié en octobre 2016, dans lequel avait été mis en avant des solutions concrètes. Que compte faire le Gouvernement afin de remédier à la situation de ces citoyens ? Quelles actions envisage-t-il afin d'éviter les discriminations de traitement par les banques françaises ? Elle lui demande s'il envisage des discussions avec l'administration américaine afin de permettre à ces citoyens de régulariser plus aisément leur situation.

Texte de la réponse

En matière de fiscalité, les Etats-Unis reconnaissent en effet le principe de l'imposition sur la base de la citoyenneté, celle-ci pouvant s'acquérir par la seule naissance sur le sol américain. Les citoyens français qui ont aussi la nationalité américaine sont ainsi tenus, par le droit américain, de procéder à une déclaration de leurs revenus auprès des services fiscaux de ce pays et d'acquitter, le cas échéant, les impôts dus. Il en va d'ailleurs de même pour tous les citoyens américains résidant en France.  Une convention fiscale bilatérale ayant été conclue entre la France et les Etats-Unis en vue d'éviter les doubles impositions, ce n'est que dans les cas où l'impôt français est inférieur à celui dû aux Etats-Unis ou que certains revenus ne sont pas imposés de façon effective en application du droit fiscal français et sont, par ailleurs, taxables selon la législation des Etats-Unis, qu'une imposition complémentaire pourrait être demandée par les autorités fiscales américaines. Le 14 novembre 2013, la France a signé un accord intergouvernemental, dit "accord FATCA", relatif au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers. Entré en vigueur le 14 octobre 2014, cet accord fixe un cadre pour l'échange automatique d'informations fiscales avec les Etats-Unis et vise à protéger la sécurité juridique des institutions financières françaises. Il a été conclu à la suite de la loi "FATCA" (Foreign Account Tax Compliance Act) que les Etats-Unis ont adoptée en 2010 et qui institue une obligation, pour tous les établissements financiers, de transmettre à l'administration fiscale américaine des informations détaillées sur les comptes détenus directement ou indirectement par des contribuables américains. Dans ce contexte, un collectif s'est formé pour appeler l'attention du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères et du ministère de l'Economie et des Finances sur la situation particulière des "Américains accidentels", c'est-à-dire de citoyens français ayant également la nationalité américaine mais n'ayant pas de liens avec les Etats-Unis. En l'absence de liens concrets avec les Etats-Unis, où ils n'ont pas résidé, et de documents officiels de ce pays, ces personnes peuvent en effet rencontrer des difficultés pour fournir les informations demandées par les établissements financiers français, notamment un numéro d'identification fiscale américain dont l'obtention peut être particulièrement longue. En réponse, le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères a sollicité l'attention des autorités américaines sur ces situations. La France plaide en faveur d'une renonciation facilitée à la nationalité américaine pour ces "Américains accidentels", étant entendu que les conditions d'octroi de la nationalité et le principe de l'imposition sur la base de la citoyenneté relèvent de la compétence souveraine des Etats-Unis. Cette question fait également l'objet de discussions au niveau européen, que suit plus particulièrement le ministère de l'Economie et des Finances. Un courrier a ainsi été adressé au Secrétaire au Trésor américain, le 8 mai 2017, par la présidence de l'UE, appelant son attention sur les difficultés concrètes rencontrées par certains citoyens européens ayant également la nationalité américaine. La France souhaite poursuivre le dialogue à ce sujet, en intervenant conjointement avec d'autres pays européens également concernés, pour obtenir que, dans les situations où les liens avec les Etats-Unis sont ténus, la procédure de renonciation à la nationalité soit rendue plus simple et moins coûteuse. Par ailleurs, le gouvernement sera vigilant sur le respect par les banques de leurs obligations à l'égard des personnes de nationalité américaine, afin que le droit au compte leur soit reconnu et soit appliqué de manière effective. La France rappelle à cette occasion qu'il existe une procédure de recours devant la Banque de France permettant de contraindre une banque à accepter l'ouverture d'un compte, l'établissement étant alors désigné par la Banque de France. La France continuera à suivre de près ce sujet et à rechercher des solutions adaptées.