Réforme structurelle de l'organisation de la sécurité dans la capitale
Question de :
M. Pierre-Yves Bournazel
Paris (18e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants
M. Pierre-Yves Bournazel interroge M. le ministre de l'intérieur sur une nécessaire réforme structurelle de l'organisation de la sécurité dans la capitale. Le 9 novembre 2018, le Conseil d'État a condamné la ville de Paris et l'État pour « carence fautive » en matière de salubrité et de sécurité dans le quartier Château-Rouge. Le Conseil d'État a donné raison aux habitants qui se mobilisent depuis des années pour l'amélioration de leur qualité de vie. Le mérite en revient à l'association « La Vie Dejean », qui a porté l'action en justice. Ces Parisiennes et ces Parisiens ont légitimement le droit à la même tranquillité, à la même propreté des rues et à la même diversité commerciale que dans le reste de la capitale. Le renforcement de l'action de la préfecture depuis 2017 a certes permis une amélioration de la situation à travers une augmentation des interpellations et des saisies de marchandises. M. le député se réjouit également de l'expérimentation de la police de sécurité du quotidien à partir de 2019. Mais, cette décision inédite, qui condamne l'État et la ville, et qui peut faire jurisprudence, doit conduire à en tirer toutes les conclusions pour apporter une réponse durable. Paris ne peut demeurer plus longtemps enfermée dans le carcan de l'arrêté du 12 messidor an VIII. Il est aujourd'hui indispensable de mener une réforme structurelle de l'organisation de la sécurité dans la capitale. Cela passe notamment par la création d'une police municipale. C'est l'intérêt de la ville de Paris que d'assumer pleinement ses responsabilités en la matière, telles que l'occupation illégale du domaine public et la lutte contre les incivilités. C'est l'intérêt de l'État, qui pourra se concentrer plus efficacement sur ses missions de police nationale, notamment la remontée des filières mafieuses. C'est surtout l'intérêt des Parisiennes et des Parisiens de bénéficier d'un service de tranquillité et de sécurité comme dans toutes les autres grandes villes de France. On ne peut plus se contenter d'ajustements, il est temps d'avancer de manière constructive. Il lui demande s'il est prêt à initier un dialogue avec la ville de Paris pour la modernisation de la sécurité dans la capitale et à créer les conditions d'une police municipale à Paris.
Réponse en séance, et publiée le 17 janvier 2019
SÉCURITÉ À PARIS
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Bournazel, pour exposer sa question, n° 525, relative à la sécurité à Paris.
M. Pierre-Yves Bournazel. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Le 9 novembre 2018, le Conseil d'État a condamné la ville de Paris et l'État pour « carence fautive » en matière de salubrité et de sécurité dans le quartier Château-Rouge. Le Conseil d'État a donné raison aux habitants qui se mobilisent depuis des années pour l'amélioration de leur qualité de vie. Le mérite en revient à l'association La Vie Dejean, qui a porté l'action en justice. Ces Parisiens ont légitimement le droit à la même tranquillité, à la même propreté des rues et à la même diversité commerciale que le reste de la capitale.
Le renforcement de l'action de la préfecture de police depuis 2017 a permis une amélioration de la situation, grâce à une augmentation des interpellations et des saisies de marchandises. Je me réjouis également de l'expérimentation de la police de sécurité du quotidien à partir de cette année. Toutefois, nous devons, pour apporter une réponse durable, tirer toutes les conclusions de cette décision inédite condamnant l'État et la ville et qui peut faire jurisprudence. Paris ne peut demeurer plus longtemps enfermée dans le carcan de l'arrêté du 12 messidor an VIII. Il est aujourd'hui indispensable de mener une réforme structurelle de l'organisation de la sécurité dans la capitale, ce qui passe notamment par la création d'une police municipale.
C'est l'intérêt de la ville de Paris que d'assumer pleinement ses responsabilités, en matière notamment d’occupation illégale du domaine public et de lutte contre les incivilités. C'est également l'intérêt de l'État, qui pourra se concentrer plus efficacement sur ses missions de police nationale, notamment la remontée des filières mafieuses. C'est surtout l'intérêt des Parisiens de bénéficier d'un service de tranquillité et de sécurité, comme dans toutes les autres grandes villes de France et d’Europe.
Je me réjouis que l'idée d'une police municipale, que je défends depuis 2013, fasse son chemin. Des élus de différentes sensibilités y sont désormais favorables, ce qui démontre que ce sujet d'intérêt général dépasse les étiquettes politiques. La maire de Paris elle-même, qui s'était toujours opposée à cette proposition, déclare ne plus en faire un tabou et semble se résoudre à la création d’une police municipale. Il est désormais temps d'avancer de manière constructive.
Plus que jamais, il est devenu indispensable de mettre nos concitoyens en situation de trancher démocratiquement cette question qui les concerne directement. C’est pourquoi j'ai proposé à la maire de Paris de leur soumettre ce débat, qui pourrait utilement être organisé au cours du premier semestre 2019.
Madame la ministre, cette avancée pour le quotidien des Parisiens ne pourra se faire sans une évolution législative et un travail en bonne intelligence avec le ministère de l'intérieur et la préfecture de police. Le Gouvernement est-il prêt à entamer un dialogue avec la ville de Paris sur la modernisation de la sécurité dans notre capitale ? Est-il prêt à créer les conditions d'une police municipale à Paris ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le député, je vous apporte la réponse du ministre de l'intérieur.
Vous savez que le préfet de police dispose, à Paris, de la compétence générale en matière de police. Il est responsable en matière de sécurité, d'ordre public et de sécurité civile. La maire de Paris dispose de pouvoirs de police d'attribution, qui se sont élargis au fil du temps, jusqu'à la loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris. Ainsi, la police de la salubrité sur la voie publique et la police de la conservation du domaine public communal relèvent du champ de compétence de la maire de Paris, qui exerce également la compétence générale en matière de circulation et de stationnement.
Cette répartition garantit l'unité de décision juridique et la cohérence opérationnelle dans la gestion de la sécurité. Il ne paraît donc pas souhaitable de la remettre en cause.
Par ailleurs, la maire de Paris dispose aujourd'hui d'un nombre important d'agents de surveillance, qui jouissent d'un ensemble de prérogatives judiciaires. Ils peuvent, par exemple, appliquer les arrêtés de police pris par la maire de Paris, ainsi que certains arrêtés pris par le préfet de police, tels que ceux qui interdisent la consommation et la vente à emporter d'alcool sur la voie publique. Ils peuvent également intervenir pour verbaliser le stationnement gênant des vendeurs à la sauvette ou constater les atteintes à la salubrité publique, et mettre à la disposition des services de police en matière de lutte contre les stupéfiants les auteurs présumés de ces infractions.
Je tiens à vous assurer que le dialogue entre la préfecture de police et la ville de Paris sur les sujets de sécurité sont constants. Les modalités de coordination ont, par ailleurs, été revues lors de la loi précitée. Le principe d'opérations coordonnées est ainsi prévu. Cette coordination doit être approfondie, les pouvoirs du préfet de police n'empêchant nullement une étroite complémentarité entre l'action de l'État et celle de la ville de Paris.
Je vous ai répondu, monsieur le député, avec les mots du ministre de l'intérieur et les données qu'il m'a transmises. Je vous remercie de votre compréhension.
Auteur : M. Pierre-Yves Bournazel
Type de question : Question orale
Rubrique : Sécurité des biens et des personnes
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 janvier 2019