Question de : M. André Chassaigne
Puy-de-Dôme (5e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. André Chassaigne interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les nouvelles conditions d'obtention de la carte de séjour portant la mention « salarié ». L'article 12 de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 a profondément modifié l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En effet, antérieurement à ce dispositif, la carte de séjour portant la mention « salarié » était délivrée aux étrangers titulaires d'un contrat de travail d'une durée supérieure à un an (CDI ou CDD), la carte de séjour portant la mention « travailleur temporaire » étant attribuée aux étrangers titulaires d'un CDD d'une durée inférieure à un an, entre autres. Désormais, la nouvelle rédaction de l'article L. 313-10 du CESEDA réserve la carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » aux seuls détenteurs d'un CDI, les détenteurs d'un CDD bénéficiant de façon systématique d'une carte de séjour portant la mention « travailleur temporaire ». Or cette modification emporte des conséquences néfastes, voire désastreuses, pour certaines catégories de ressortissants étrangers, notamment au niveau de l'inscription et de l'indemnisation auprès de Pôle emploi, sans parler des conditions éminemment drastiques de renouvellement du titre de séjour « travailleur temporaire » pouvant conduire à des refus de séjour. À titre d'exemple, les étrangers régularisés au titre de la circulaire du 28 novembre 2012 et de l'article L. 313-14 du CESEDA, pour la plupart restés des années sans titre de séjour mais ayant pu apporter la preuve de leur activité salariée, ont obtenu des services préfectoraux des cartes de séjour « salarié » (souvent renouvelées plusieurs années). Le Gouvernement sait en effet qu'il s'agit d'une population souvent précaire occupant des emplois dans des secteurs économiques « gourmands » en CDD. Ces étrangers risquent désormais de basculer dans la catégorie « travailleur temporaire » et, bien qu'ayant cotisé aux ASSEDIC, pourront se voir refuser le renouvellement de leur titre de séjour. Toujours à titre d'exemple, les mineurs isolés étrangers entrés en France entre 16 et 18 ans, et confiés par décision de justice à l'aide sociale à l'enfance, et qui à leur majorité, en application de la rédaction des dispositions de l'article L. 313-15 du CESEDA, peuvent se voir délivrer une carte de séjour « salarié » ou « travailleur temporaire », risquent également de se voir opposer des refus de séjour. Alors qu'un contrat de professionnalisation, qui est un CDD de 2 ans, pouvait donner lieu à l'attribution d'une carte de séjour « salarié », les nouvelles dispositions imposeront la délivrance d'une carte de séjour « travailleur temporaire ». Or ces publics d'une grande fragilité, et qui ont été admis au titre d'une décision de justice, nécessitent une attention particulière de la part de l'État, notamment au niveau des autorisations de séjour et de travail. Il l'interroge sur les mesures qu'il compte prendre pour ne pas faire retomber dans la précarité et la clandestinité des étrangers régularisés après de longues années passées en France et les mineurs isolés étrangers dont la stabilité du séjour est une condition essentielle de leur insertion sur le territoire national.

Réponse publiée le 13 février 2018

La loi no 2016 du 7 mars 2016 a modifié les conditions de délivrance des cartes de séjour « salarié » (1° de l'article L. 313.10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers) et « travailleur temporaire » (2° de l'article L. 313.10 du même code). Désormais, seuls les étrangers recrutés en contrat à durée indéterminée (CDI) se voient délivrer une carte « salarié ». Les étrangers recrutés en contrat à durée déterminée (CDD) reçoivent une carte « travailleur temporaire » quelle que soit la durée du contrat. Avant le 1er novembre 2016 (date d'entrée en vigueur de la loi du 7 mars 2016 pour ces dispositions) les étrangers recrutés en CDD d'au moins 12 mois bénéficiaient d'une carte « salarié ». La mise en œuvre de la nouvelle législation a entraîné des difficultés d'application liées en particulier au prolongement du droit au séjour en cas de perte involontaire d'emploi : seuls les bénéficiaires de la carte « salarié » ont droit à un prolongement de leur droit au séjour en cas de perte involontaire d'emploi (prolongation d'un an en cas de perte involontaire d'emploi à l'issue de la validité du titre de séjour ; lors du renouvellement suivant, un titre de séjour est délivré de la durée des droits acquis à l'allocation chômage. En revanche, les bénéficiaires de la carte « travailleur temporaire » n'ont pas de droit au séjour en cas de perte involontaire d'emploi. Ce nouveau régime doit également être articulé avec celui de l'admission exceptionnelle au séjour par le travail. En effet, la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 prévoyait la délivrance d'une carte « salarié » pour les étrangers justifiant d'une embauche de 12 mois ou de 8 mois de travail sur les 12 prochains mois pour les intérimaires. Afin de résoudre ces difficultés et prendre en compte la situation du marché du travail (première embauche majoritairement en CDD), il est envisagé de fusionner les deux cartes « salarié » et « travailleur temporaire » afin de ne plus faire coïncider le droit au séjour avec la forme du contrat de travail en cas de perte involontaire d'emploi. L'avantage attendu est une simplification du régime juridique de ces salariés au regard du droit au séjour et donc une simplification tant pour l'étranger lui-même que pour les agents chargés de l'examen des demandes de titres de séjour.

Données clés

Auteur : M. André Chassaigne

Type de question : Question écrite

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 8 août 2017
Réponse publiée le 13 février 2018

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