15ème législature

Question N° 549
de Mme Valérie Beauvais (Les Républicains - Marne )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Bioéthanol

Question publiée au JO le : 22/01/2019
Réponse publiée au JO le : 30/01/2019 page : 502

Texte de la question

Mme Valérie Beauvais attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la politique du Gouvernement en faveur du bioéthanol. Le bioéthanol, dont la France est le premier producteur européen, présente en effet de nombreux avantages : pour l'économie, c'est un carburant « local », issu de productions sucrières et amidonnières ; pour l'environnement, il réduit significativement les émissions de CO2 ; pour l'automobiliste, le bioéthanol E85 est le carburant le moins cher à la pompe. Au regard de ces éléments, le choix du Gouvernement d'ouvrir son marché à l'huile de palme importée et d'augmenter dans des proportions inférieures au potentiel de production le taux d'incorporation du bioéthanol dans l'essence, semble pour le moins incompréhensible. Aussi, alors même que de nombreuses régions françaises, dont celle du Grand Est, proposent quant à elles d'accompagner les automobilistes dans la conversion des véhicules essence au bioéthanol, elle souhaiterait que le Gouvernement soutienne cette filière de production et lui indique, en conséquence, les mesures qu'il entend mettre en œuvre pour ce faire.

Texte de la réponse

BIOÉTHANOL


M. le président. La parole est à Mme Valérie Beauvais, pour exposer sa question, n°  549, relative au bioéthanol.

Mme Valérie Beauvais. Ma question, qui s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, porte sur la politique du Gouvernement en matière d'agrocarburants.

Parmi les agrocarburants figure le bioéthanol, dont la France est le premier producteur européen et qui présente de nombreux avantages. Le premier d'entre eux est économique : il s'agit d'un carburant local, produit au cœur de nos territoires, notamment dans ma circonscription de la Marne, où se trouve l'important site de production de Pomacle-Bazancourt. Sa production concourt au maintien d'activités économiques et d'emplois en milieu rural, avec 150 à 250 millions d'euros investis par distillerie et 8 900 emplois directs et indirects sur l'ensemble du territoire, et assure aussi des débouchés et de nouveaux marchés aux agriculteurs.

Le deuxième avantage est environnemental, car le bioéthanol permet une réduction significative des émissions de C02, une tonne de bioéthanol permettant d'économiser 1,4 tonne d'équivalent C02.

Le troisième n'est pas le plus négligeable dans les circonstances actuelles, puisqu'il s'agit de son prix. L'E85 est en effet le carburant le moins cher à la pompe, tout en répondant pleinement aux enjeux de la transition écologique – car dans « transition écologique », il y a : « transition ». Les agrocarburants et le bioéthanol constituent donc un choix d'avenir pour décarboner les transports et accroître le pouvoir d'achat des automobilistes.

Malgré ces avantages indéniables, votre gouvernement a fait le choix d'ouvrir le marché des agrocarburants à l'huile de palme importée, maintenant ainsi le taux d'incorporation du bioéthanol dans l'essence à un niveau inférieur au potentiel de production. Vous comprendrez, madame la secrétaire d'État, que ces décisions apparaissent pour le moins incompréhensibles, tant du point de vue de la filière de production que de celui des automobilistes.

Je rappelle en outre que certaines régions, dont le Grand-Est cher au président Waserman, ont décidé d'accompagner les automobilistes dans la conversion des véhicules à essence au bioéthanol, laquelle n'est pas sans conséquences, car elle fait perdre aux acheteurs de véhicules neufs le bénéfice de la garantie constructeur.

Je vous remercie donc, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir m'indiquer les mesures que vous entendez mettre en œuvre pour lever les freins idéologiques aux usages non alimentaires de la production agricole, pour protéger le bioéthanol produit en France et en Europe de la concurrence et des contournements étrangers, pour renforcer les objectifs de la transition énergétique du secteur des transports et pour soutenir ainsi la filière française de production d'agrocarburants.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la députée, M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, ne pouvant être présent, il m'a chargé de vous répondre.

L'éthanol est aujourd'hui incorporé dans les essences sous forme d'éthanol pur ou d'éther éthyle tertiobutyle – ETBE –, dans les carburants E5, E10 et E85, et participe au développement des énergies renouvelables dans le secteur des transports. Les spécifications techniques de ces carburants limitent l'incorporation d'éthanol et nous atteignons aujourd'hui ces limites, étant donné les volumes proposés à la consommation.

Le développement de l'E85 devrait permettre d'incorporer plus d'éthanol dans les carburants, mais cela doit se faire de manière sûre. L'immense majorité du parc de véhicules est aujourd'hui incompatible avec le carburant E85 et son utilisation dans un véhicule incompatible expose le consommateur à de sérieux risques de panne et de casse moteur.

Afin de permettre à des véhicules en service, conçus à l'origine pour fonctionner avec pour carburant de l'essence sans plomb, de rouler au superéthanol E85, le ministère de la transition écologique et solidaire a défini par un arrêté de 2017 les dispositions techniques et administratives permettant d'homologuer des dispositifs de conversion des véhicules à motorisation essence en motorisation à carburant modulable essence-superéthanol E85, afin de garantir un niveau d'émission conforme aux normes en vigueur.

Le bilan environnemental de ces transformations est a priori équilibré. Elles ont permis notamment de réduire les émissions de particules fines des véhicules essence à injection directe non munis de filtre à particules. Un retour d'expérience sur le fonctionnement des dispositifs homologués et installés est attendu prochainement, conformément à ce que prévoit l'arrêté d'homologation des boîtiers de conversion.

La part des biocarburants en concurrence alimentaire est cependant limitée à 7 % de la part de l'énergie finale dans les transports, niveau qui est déjà atteint. La croissance de la part des biocarburants dans le secteur des transports ne pourra donc se faire que par des biocarburants sans concurrence alimentaire, en particulier les biocarburants dits de deuxième génération – bois, paille et algues. L'utilisation de ce type de biocarburants est encore en émergence. Il convient donc de veiller à ce que la production d'E85 ne se développe pas au détriment des cultures alimentaires.

Le Gouvernement a ainsi favorisé, dans la loi de finances pour 2019, l'utilisation de résidus sucriers, qui permet d'augmenter la part d'éthanol dans les carburants en limitant l'impact écologique. L'attractivité de la fiscalité actuelle de l'E85 est de nature à favoriser son développement.