Inquiétude des acteurs de la filière plasturgie
Question de :
Mme Cécile Untermaier
Saône-et-Loire (4e circonscription) - Socialistes et apparentés
Mme Cécile Untermaier attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur l'inquiétude des acteurs de la filière plasturgie, notamment suite à l'extension de l'interdiction de produits plastiques adoptée dans le cadre de la loi EGAlim. Pour les représentants départementaux, qu'elle a reçus à sa permanence, les produits issus d'autres matières (verre, inox, carton) n'auront que rarement un bilan environnemental meilleur que celui du plastique, et leur utilisation ne présente pas plus de bénéfices environnementaux sur l'ensemble du cycle de vie. Sur le fond, la France est confrontée depuis de nombreuses années à un excès préoccupant de l'enfouissement des plastiques en fin de vie, le classant parmi les mauvais élèves européens en la matière. Or l'enfouissement limite très sérieusement l'intérêt écologique de ce matériau, dont le bilan environnemental pourrait être optimisé grâce à la valorisation énergétique ou au recyclage (seulement 400 000 tonnes de plastique recyclé chaque année sur le marché français). La filière « plasturgie » attend aujourd'hui une impulsion politique forte pour poursuivre l'extension des consignes de tri, et mettre en place des filières adaptées, à l'image de celle instaurée avec succès pour les déchets électriques et électroniques (DEEE), financée par une éco-participation. L'industrie du recyclage a besoin de davantage de déchets pour investir et proposer des matières recyclées qualitatives aux fabricants. Aussi, elle aimerait connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre pour atténuer les conséquences des décisions prises par le législateur sur l'activité industrielle et optimiser l'impact sur l'environnement en développant le recyclage et en réduisant l'enfouissement.
Réponse en séance, et publiée le 30 janvier 2019
FILIÈRE PLASTURGIE
M. le président. La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour exposer sa question, n° 555, relative à la filière plasturgie.
Mme Cécile Untermaier. Ma question s'adressait à M. le ministre de l'économie et des finances, auquel, la prochaine fois, je poserai une question sur le numérique… Mais je ne doute pas, monsieur le secrétaire d'État chargé du numérique, que vous avez travaillé avec lui pour répondre à l'inquiétude et à la déception des industriels de la plasturgie.
À la suite des dispositions, dont je ne conteste pas le bien-fondé, des mesures prises dans la loi EGAlim – pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire – pour la suppression des plastiques destinés à recevoir des produits alimentaires, les industriels de la plasturgie sont très inquiets du sort qui leur sera réservé.
La première observation qu'ils m'ont faite porte sur la méthode. N'aurait-il pas convenu de comparer les différents produits alternatifs, y compris issus de la plasturgie, pour s'assurer que le bilan environnemental de cette loi sera bien celui recherché ? J'approuve l'approche comparée des méthodes et regrette qu'elle n'ait pas pu être mise en œuvre. Je tenais à vous faire part de ce reproche.
La seconde observation concerne le fond. Loin d'être recyclés, 40 % des plastiques sont enfouis dans le sol. C'est un problème majeur quand on connaît la durée de vie du plastique enfoui. Seuls 20 % des plastiques sont recyclés. Les industriels de la filière demandent, pour procéder au recyclage, de pouvoir utiliser du plastique recyclé et mettre en place des process. Ils ont besoin d'une impulsion politique, notamment du Gouvernement, qui doit les aider à structurer la filière. C'est ce qui s'est passé quand une filière de recyclage des équipements électroniques et électriques a été créée, grâce à une écoparticipation. L'inquiétude sur l'avenir du plastique est réelle. Les industriels ont le sentiment que c'est par le recyclage qu'ils pourront trouver des process porteurs d'avenir, mais, pour cela, il faut qu'ils disposent de la matière recyclée, ce qui n'est pas le cas pour le moment.
J'appelle l'attention du Gouvernement sur ce point. Quelles mesures sont envisagées pour accélérer la mise en place de la filière de recyclage, particulièrement du plastique, et accompagner les dispositions que nous avons prises en matière de développement durable ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du numérique.
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État chargé du numérique. Madame Untermaier, vous l'avez rappelé, la loi EGAlim prévoit de limiter ou d'interdire les plastiques pour certains usages alimentaires. Le Gouvernement est très attentif aux impacts industriels des interdictions prévues par ce texte ou par des textes européens à venir, lesquels, dans certains domaines, seront encore plus restrictifs.
Voici la vraie question : comment rendre cette transformation supportable par les industriels du plastique ? Je reviendrai sur chacun des points que vous avez évoqués.
Nous sommes tous pleinement engagés, comme vous-même, dans la politique de transition écologique. Nous devons donc être capables d'apporter des solutions complexes en accompagnant la transformation industrielle du territoire, ainsi que celle de l'outil industriel, qu'il s'agit de rendre plus compatible avec une philosophie de l'économie circulaire.
Dans le cadre de la feuille de route pour l'économie circulaire portée par le Gouvernement, de très nombreux acteurs économiques se sont engagés à incorporer des matières plastiques recyclées dans les produits, pour atteindre un taux d'incorporation, en 2025, de 100 % des plastiques recyclés. Pour y parvenir, il faut transformer l'outil de production. Ces premiers engagements permettront le doublement du volume de plastique recyclé mis en œuvre, pour atteindre jusqu'à 600 000 tonnes de plastique recyclé annuellement.
L'outil de transformation sera en partie le contrat du comité stratégique de filière « transformation et valorisation des déchets », que l'État vient de signer avec la profession et les organisations syndicales. Ce document engage la filière du recyclage via plusieurs projets structurants, notamment pour optimiser la fin de vie des produits, le tri et la valorisation des déchets plastiques, soutenir l'incorporation de matières premières de recyclage dans les produits finis, renforcer l'expertise et l'information sur la recyclabilité des produits et l'écoconception, et développer les combustibles solides de récupération afin de les valoriser.
Pour cela, il est absolument nécessaire de créer un maillon entre les industriels du plastique et ceux du recyclage. Pour que l'on parvienne à recycler 100 % des plastiques en 2025, ils doivent trouver un point de jonction. C'est tout l'enjeu du contrat que nous venons de signer avec eux et de la nouvelle implication des acteurs industriels à leurs côtés.
Les textes pour la mise en place la feuille de route sur l'économie circulaire sont en préparation. Nous tiendrons compte des enjeux de transition économique et industrielle.
Enfin, comme je l'ai rappelé en introduction, la future directive européenne sur les plastiques à usage unique est en cours de validation finale. Elle prévoira elle aussi de nouvelles interdictions, et il sera très important que la loi EGAlim ne la sur-transpose ou ne la sous-transpose pas.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Untermaier.
Mme Cécile Untermaier. Merci, monsieur le secrétaire d'État, pour votre réponse circonstanciée. Il arrive souvent qu'une interdiction intervienne de manière immédiate ou quasi immédiate et que le dispositif d'accompagnement des industriels soit beaucoup trop long. Il faut absolument prendre en considération ce problème de temporalité. Je vous en conjure car les industriels sont extrêmement inquiets. Loin de renvoyer à leurs difficultés des entreprises fortement pourvoyeuses d'emplois, nous devons les faire avancer dans la même direction que nous, en les accompagnant.
Auteur : Mme Cécile Untermaier
Type de question : Question orale
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 janvier 2019