15ème législature

Question N° 5629
de Mme Laurence Trastour-Isnart (Les Républicains - Alpes-Maritimes )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > étrangers

Titre > Nécessité de revoir l'accueil et l'accompagnement des mineurs étrangers isolés

Question publiée au JO le : 20/02/2018 page : 1321
Réponse publiée au JO le : 22/05/2018 page : 4295
Date de changement d'attribution: 20/03/2018
Date de signalement: 15/05/2018

Texte de la question

Mme Laurence Trastour-Isnart attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la situation des départements qui doivent faire face à l'afflux des mineurs étrangers non accompagnés. D'après la mission « mineurs non accompagnés » placée auprès de la garde des sceaux, les personnes déclarées mineurs non accompagnés sont de plus en plus nombreuses ces dernières années, ayant notamment connu une augmentation de 34 % entre 2015 et 2016. Cette charge, qui incombe aux départements, dont les missions sont dans un premier temps l'accueil d'urgence, la mise à l'abri et l'évaluation de la minorité et de l'isolement puis dans un second temps, si la personne est reconnue mineur, une prise en charge jusqu'à 18 ans, dans le dispositif de la protection de l'enfance. Les arrivées en grand nombre de mineurs non accompagnés déstabilisent profondément l'organisation et le travail des services de l'aide sociale à l'enfance qui doivent, dans le même temps accueillir, conformément à la loi, les autres enfants et les jeunes placés par décisions de justice. La politique de l'immigration relève du ressort du Gouvernement. Ce dernier fixe aux départements un pourcentage d'accueil obligatoire. Les chiffres globaux des arrivées augmentant, l'obligation d'accueillir devient exponentielle. Or les départements ne peuvent refuser et doivent, de plus, accueillir ces personnes à leurs frais, l'État ne finançant que les cinq premiers jours de prise en charge à hauteur de 250 euros par migrant. Dans beaucoup de département, les foyers sont à saturation, entraînant des problèmes de surpopulation (à nombre constant d'éducateurs), sanitaires (cas de tuberculose) et d'insécurité (cohabitation de mineurs et faux-mineurs). Majoritairement issus de pays en paix, et victimes de filières, leur prise en charge par les départements mobilise une part toujours croissante de fonds publics. Il est grand temps, comme l'a annoncé le Premier ministre à l'occasion du dernier congrès de l'assemblée des départements de France à Marseille, que l'État prenne toutes ses responsabilités aux côtés des départements, et qu'il « revoit complètement l'accueil et l'accompagnement des mineurs étrangers isolés ». Elle lui demande donc de bien vouloir lui donner plus de détails sur les mesures qui sont envisagées, ainsi que les sommes qui doivent nécessairement être versées aux départements en compensation de leurs efforts financiers, au moment où l'État engage les départements à signer avec lui, des protocoles de limitation de l'évolution des dépenses de fonctionnement.

Texte de la réponse

La situation tant matérielle que financière des départements liée à la prise en charge des mineurs non accompagnés (MNA) fait partie des préoccupations du Gouvernement qu'il s'est engagé à traiter en partenariat avec l'Assemblée des départements de France (ADF). Concernant le volet financier, conformément à l'engagement du Premier ministre auprès de l'assemblée des départements de France du 21 décembre 2017, un financement exceptionnel de l'Etat est prévu en 2018 au titre de 2017 ainsi qu'un renforcement très important des moyens au profit des départements dans le projet de loi de finances 2018. Ils passent de 20 M€ en 2017 à 132 M€ en 2018, intégrant le financement exceptionnel de l'Etat au profit des conseils départementaux au titre de la prise en charge partielle des dépenses d'aide sociale à l'enfance (ASE) liées au nombre de mineurs supplémentaires présents dans chaque département au 31 décembre 2017 par rapport au 31 décembre 2016. La mission d'expertise, confiée par le Premier ministre et le Président de l'ADF, à des membres des corps d'inspection de l'Etat, de l'ADF et des cadres des conseils départementaux, par lettre en date du 30 octobre 2017, vise à identifier des solutions opérationnelles permettant d'améliorer l'efficacité, la cohérence et la soutenabilité budgétaire de la phase d'évaluation et de mise à l'abri. De même, des propositions doivent être formulées « visant à renforcer le pilotage des procédures d'évaluation et garantir leur fiabilité ». Ses conclusions ont été rendues aux commanditaires et les discussions sont en cours entre le gouvernement et l'ADF pour parvenir à une solution équilibrée prenant en compte l'augmentation du nombre de jeunes étrangers arrivant en France. En effet, le nombre de jeunes se déclarant mineurs et devant être évalués par les conseils départementaux a connu une très forte augmentation en 2017, dépassant probablement les 30 000 (les chiffres ne seront connus que lorsque les conseils départementaux auront envoyé leurs factures du dernier trimestre à l'Agence des services de paiement), dont 14 908 mineurs recensés par la cellule MNA de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse. Le nombre de mineurs pris en charge par l'ASE, après évaluation, est quant à lui passé de 13 020 au 31 décembre 2016 à 20 950 au 31 décembre 2017 selon les données (chiffres provisoires) remontées par les conseils départementaux à la cellule MNA. Par ailleurs, des publications récentes détaillent des pratiques innovantes qui peuvent permettre de mieux prendre en charge les jeunes, qu'il s'agisse de la période pré-évaluation ou de leur séjour à l'ASE : "recommandations de bonnes pratiques professionnelles"de l'agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) (décembre 2017),"accompagner et accueillir les MNA au regard de leurs besoins"par la convention nationale des associations de protection de l'enfant (CNAPE) (février 2018),"face à l'urgence, des départements innovent" dans la lettre de l'observatoire national action sociale décentralisée (ODAS) (février 2018).