limitation de la vitesse autorisée sur les routes secondaires
Question de :
M. Jean-Jacques Gaultier
Vosges (4e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 7 février 2018
LIMITATION DE LA VITESSE AUTORISÉE SUR LES ROUTES SECONDAIRES
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Gaultier, pour le groupe Les Républicains.
M. Jean-Jacques Gaultier. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Elle concerne le projet de limitation de vitesse à 80 kilomètres-heure. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LR.)
Partout en France, ce week-end, comme le week-end précédent, ce fut un cortège de pétitions, de manifestations, de protestations d'automobilistes et de motards réunis, déjà excédés par les hausses de carburant, les hausses de péage, les hausses du coût du contrôle technique.
Ce ne sont ni des inconscients ni des incompétents. Vous n'avez pas le monopole de la sécurité routière, monsieur le Premier ministre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. Pierre Cordier. Très bien !
M. Jean-Jacques Gaultier. Ils sont d'accord sur l'utilisation de l'éthylotest, sur l'interdiction du téléphone au volant, sur les limitations de vitesse très strictes en agglomération, mais ils constatent, comme nous tous, que les dépassements seront de plus en plus difficiles, de plus en plus dangereux et qu'il sera pratiquement impossible de doubler des camions circulant à la même vitesse.
M. Thibault Bazin. Il a raison !
M. Jean-Jacques Gaultier. Les chiffres de l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière viennent d'être publiés. Ils montrent une baisse du nombre de morts en 2017 : 1,2 % en moins.
M. Pierre Cordier. Eh oui !
M. Jean-Jacques Gaultier. Il y a eu certes un peu plus de blessés, un peu plus d'accidents, mais il y a eu moins de morts sur les routes françaises en 2017, monsieur le Premier ministre.
M. Sylvain Maillard. Eh bien, tant mieux !
M. Jean-Jacques Gaultier. Nous n'avons toujours pas eu officiellement connaissance des résultats de l'expérimentation réalisée sur deux ans et quatre-vingts kilomètres de route – et pour cause : l'étude est inexploitable d'un point de vue statistique et scientifique en termes d'accidentologie, comme l'a indiqué lui-même le délégué interministériel à la sécurité routière.
Nous n'avons pas non plus pris en considération les expériences de l'Allemagne, du Royaume-Uni et de bien d'autres pays, dont les gouvernements ne sont, là encore, ni incompétents ni inconscients, et qui tous autorisent une vitesse allant jusqu'à 90, voire 100 kilomètres-heure. Pourtant, ils font mieux que nous en matière de mortalité routière, avec plus d'habitants, plus de voitures, plus de trafic !
M. Jean-Luc Reitzer. Très juste !
M. Jean-Jacques Gaultier. Nous n'avons pas, enfin, les résultats du groupe de travail du Sénat.
Je vous demande donc solennellement de renoncer à cette mesure, de ne pas signer ce décret avant d'avoir…
M. le président. Merci, monsieur le député.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, la noblesse en politique, c'est parfois de ne pas avoir peur de l'impopularité ! (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Depuis quatre années, la mortalité routière augmente. Chaque jour, ce sont neuf de nos concitoyens qui perdent la vie sur les routes de France ; chaque jour, ce sont sept fois plus de blessés qui ont des séquelles physiques, psychologiques, parfois à vie, pour eux ou pour leurs proches - et pourtant, vous êtes médecin, monsieur Gaultier ! (Mêmes mouvements.)
Plusieurs députés du groupe LR . Cela n'a rien à voir !
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État. Face à cette situation, on peut faire le choix de ne rien changer ou celui d'assumer des décisions difficiles. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.- Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Le Gouvernement a fait le second choix. Le 9 janvier dernier, à l'issue d'un comité interministériel, le Premier ministre a annoncé, parmi un train de mesures, l'abaissement à 80 kilomètres-heure de la limitation de vitesse autorisée sur les routes secondaires sans séparateur de voies. Pourquoi ? Premièrement, parce que plus de 55 % des accidents meurtriers sur les routes ont lieu sur ces axes routiers.
Mme Émilie Bonnivard. Et alors ?
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État. Deuxièmement, parce que des études démontrent que nous pouvons sauver 400 vies par an grâce à la baisse de 90 à 80 kilomètres-heure de la vitesse de circulation sur les axes routiers secondaires.
M. Jean-Jacques Gaultier. C'est faux !
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État . Troisièmement, parce que l'expérimentation, que vous mentionnez et qui a été conduite entre 2015 et 2017 sur 86 kilomètres – et non pas 80 –, dans quatre départements, a eu des résultats probants.
M. Laurent Furst. Parigot !
M. Vincent Descoeur. Venez circuler dans le Massif central !
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État. Alors, de quoi avez-vous peur, monsieur le député ? Le Premier ministre s'est engagé à ce que cette mesure s'applique le 1er juillet 2018. Eh bien, je vous donne rendez-vous le 1er juillet 2020. À cette date, mesurons avec objectivité, précision et responsabilité les résultats et tirons-en les leçons. C'est cela, l'honneur de la politique ! (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.– Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
M. Laurent Furst. Zéro !
M. Vincent Descoeur. C'est la France à deux vitesses !
M. Jean-Paul Lecoq. Et si vous développiez le train partout sur le territoire national ? Ça, ce serait bien !
Auteur : M. Jean-Jacques Gaultier
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Sécurité routière
Ministère interrogé : Porte-parole du Gouvernement
Ministère répondant : Porte-parole du Gouvernement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 février 2018