Politique d'éradication des frelons asiatiques
Question de :
M. Bertrand Sorre
Manche (2e circonscription) - La République en Marche
M. Bertrand Sorre attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la politique d'éradication des frelons asiatiques. Depuis leur première apparition en 2004, les frelons asiatiques ont proliféré sur l'ensemble du territoire français et dans d'autres pays européens. Leur présence et leur propagation exponentielle en font un problème de santé publique majeur. Le frelon vespa velutina nigrithorax, plus communément appelé « frelon asiatique », a repoussé les limites de son territoire d'environ 100 km par an au point de coloniser aujourd'hui la quasi-totalité du territoire français et de faire son apparition dans les zones frontalières. Cette prolifération est inquiétante, et ce, à plusieurs titres. Il s'agit d'une part d'un enjeu de santé publique, la piqûre du frelon asiatique étant potentiellement mortelle pour l'homme (deux décès constatés ces derniers mois dans le département de la Manche). Par ailleurs, les abeilles étant une source d'alimentation privilégiée par les frelons, les attaques de ruches ont déjà entraîné l'anéantissement de nombreuses colonies et préoccupent les apiculteurs depuis de nombreuses années. Aussi, afin de lutter contre cette menace, plusieurs textes législatifs et réglementaires ont d'ores et déjà été adoptés au niveau national et extracommunautaire. Le frelon vespa velutina nigrithorax a notamment été classé nuisible de catégorie 2 (arrêté du 26 décembre 2012) et le code rural prévoit qu'il peut « être nécessaire, dans un but d'intérêt collectif, de mettre en œuvre des mesures de prévention, de surveillance ou de lutte ». En 2017, le ministère de l'environnement, dans un rapport sur la stratégie nationale relative aux espèces exotiques envahissantes, prônait des « mécanismes nationaux » pour répondre à l'invasion des frelons asiatiques. Or, dans les faits, les moyens alloués à la lutte contre les frelons asiatiques sont très contrastés selon les régions et les départements. Aussi, il souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement et notamment savoir si une véritable stratégie de lutte nationale contre les frelons asiatiques, intégrant une prise en charge intégrale de la destruction des nids (comme cela est déjà le cas dans certains départements comme la Manche), sera mise en œuvre conformément à l'ambition affichée en 2017.
Réponse en séance, et publiée le 20 février 2019
ÉRADICATION DES FRELONS ASIATIQUES
M. le président. La parole est à M. Bertrand Sorre, pour exposer sa question, n° 575, relative à l'éradication des frelons asiatiques.
M. Bertrand Sorre. Ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Depuis leur première apparition en 2004, les frelons asiatiques ont proliféré sur l'ensemble du territoire français et dans d'autres pays européens. Pour l'année 2018, dans mon seul département de la Manche, la fédération départementale des groupements de défense contre les organismes nuisibles – FDGDON – a localisé 5 898 nids, soit 1 nid par kilomètre carré en moyenne, soit près de 2 000 nids de plus qu'en 2017. Les agglomérations et les zones littorales urbanisées restent les plus touchées, allant jusqu'à une densité de 17 nids par kilomètre carré, la plus forte connue sur la même commune.
Aujourd'hui, avec le soutien du conseil départemental de la Manche, 91 % des communes du département ont signé la convention de lutte collective avec la FDGDON. Ainsi, 4 347 nids ont pu être détruits par la lutte collective et selon le protocole départemental.
L'investissement des conseils départementaux sur ce sujet n'est cependant pas le même partout en France, tant s'en faut.
Cette prolifération est chaque année plus inquiétante, et ce, à plusieurs titres. Il s'agit d'une part d'un enjeu de santé publique, car la piqûre du frelon asiatique peut être dangereuse voire mortelle pour l'homme. Ces derniers mois, dans le département de la Manche, 310 victimes d'attaques par piqûres et deux par projection de venin dans les yeux, ainsi qu'un décès et quatre chocs anaphylactiques ont été enregistrés.
D'autre part, les abeilles étant une source d'alimentation privilégiée pour les frelons, les impacts apicoles ont été considérables en 2018. On a constaté une situation de stress pour les abeilles, une baisse de production de miel et des pertes de ruches. Les frelons sont également nuisibles sur le plan de la biodiversité, car ils se nourrissent de nombreux insectes pollinisateurs. De plus, des impacts sur le poisson sont parfois signalés sur les étals de marché. En 2018, des frelons asiatiques ont également été signalés pour la première fois sur un atelier conchylicole.
Afin de lutter contre cette menace, des dispositions législatives et réglementaires ont d'ores et déjà été adoptées au niveau national et extracommunautaire. Le frelon asiatique a notamment été classé parmi les nuisibles de deuxième catégorie, pour lesquels, selon le code rural, « il peut être nécessaire, dans un but d'intérêt collectif, de mettre en œuvre des mesures de prévention, de surveillance ou de lutte ».
En 2017, dans un rapport sur la stratégie nationale relative aux espèces exotiques envahissantes, le ministère de l'environnement prônait des mécanismes nationaux pour répondre à l'invasion des frelons asiatiques. Mais dans les faits, les moyens alloués à la lutte contre ces insectes sont très contrastés selon les régions et les départements.
À mon sens, il est temps de requalifier les frelons asiatiques en nuisibles de première catégorie, pour qu'un véritable réseau d'acteurs compétents, dotés de moyens appropriés, se mette en place et détruise automatiquement les départs de nids. Ce fléau touche tout la France, et même si la FDGDON 50 effectue un travail remarquable, l'État doit s'emparer du problème pour que l'action soit la même partout sur le territoire national. Un frelon asiatique, vous vous en doutez, ne s'arrête pas aux limites d'un département !
Le Gouvernement compte-t-il adopter une véritable stratégie de lutte nationale contre les frelons asiatiques, permettant d'harmoniser la lutte sur le territoire, de développer les moyens de lutte les moins nocifs pour l'environnement et la biodiversité et enfin d'assurer un financement pérenne, afin de faciliter une lutte collective efficace ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des transports.
Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports. Monsieur le député, François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, ne peut être présent. Il m'a chargée de vous répondre.
Comme vous le rappelez, le frelon asiatique est une espèce exotique envahissante, qui est à l'origine de diverses difficultés. Si l'on déplore malheureusement des décès liés à sa piqûre et si l'on peut suspecter une incidence sur la biodiversité locale, qui reste toutefois à documenter, l'impact de cette espèce porte principalement sur les populations d'abeilles domestiques, qui constituent des proies faciles pour ce prédateur.
Ainsi, cette espèce a été classée par le ministère de l'agriculture en danger sanitaire de deuxième catégorie, en raison de son impact pour l'apiculture. Avec Didier Guillaume, ministre en charge de cette politique, François de Rugy a annoncé au début de ce mois la mise en place d'un groupe de travail en vue de renforcer les mesures de protection des abeilles et autres insectes pollinisateurs, notamment envers les produits phytopharmaceutiques utilisés.
Le frelon asiatique a été également classé par ces deux ministères comme espèce exotique envahissante préoccupante.
Depuis son arrivée, il y a quinze ans, cette espèce a colonisé la quasi-totalité du territoire métropolitain. Au vu de son aire de répartition, de sa vitesse de propagation et de l'absence de moyens de lutte efficace, force est de constater que l'objectif d'éradication sur notre territoire n'est plus atteignable.
Les crédits publics affectés à la gestion des espèces exotiques envahissantes doivent être ciblés sur des opérations efficientes. Les stratégies régionales en matière d'espèces exotiques envahissantes ont ainsi pour objet de définir des axes d'intervention sélectifs selon les espèces et les espaces considérés.
Ces stratégies doivent être définies conjointement par les services et opérateurs de l'État avec les régions, chef de file des collectivités en matière de biodiversité, afin de cibler au mieux l'ensemble des moyens publics.
M. le président. La parole est à M. Bertrand Sorre.
M. Bertrand Sorre. Merci de ces précisions, madame la ministre. Un pilotage national est nécessaire, car le degré d'appropriation de cette problématique est très variable selon les territoires.
Auteur : M. Bertrand Sorre
Type de question : Question orale
Rubrique : Animaux
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Transition écologique et solidaire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 février 2019