Enjeux de la mobilité en milieu rural
Question de :
M. Jean-Pierre Vigier
Haute-Loire (2e circonscription) - Les Républicains
M. Jean-Pierre Vigier attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les difficultés grandissantes en matière de mobilité en milieu rural. Le 1er juillet 2017, le Président de la République déclarait : « Le combat que je souhaite engager pour les années à venir, ce sont les transports du quotidien ». L'absence de réseau de transport en commun dans les zones de faible densité amène les populations rurales à recourir au transport automobile pour leurs mobilités du quotidien, en particulier pour leurs trajets domicile-travail. En contradiction avec la déclaration présidentielle, plusieurs décisions ou projets contribuent à dégrader les conditions de la mobilité quotidienne pour les habitants des territoires ruraux. Au 1er janvier 2018, une augmentation des taxes portant sur le diesel de 7,6 centimes d'euros par litre a renchéri le carburant le plus utilisé par les foyers ruraux. Cette augmentation est prévue pour être réitérée les trois années à venir et ainsi atteindre 31 centimes en 2022, pénalisant encore plus lourdement le budget des ménages. La décision unilatérale d'abaisser la vitesse sur le réseau secondaire, passant ainsi de 90 km/h à 80 km/h est un signal supplémentaire contradictoire de l'engagement présidentiel adressé à la ruralité. Dans un département rural comme la Haute-Loire, où l'utilisation quotidienne des véhicules pour se déplacer est majoritaire, ces décisions résonnent comme autant d'atteintes aux libertés de se déplacer et renforcent l'enclavement d'un département qui souffre déjà d'un manque d'attractivité. Des déplacements du quotidien plus chers, moins sûrs et plus longs sont ainsi promis aux habitants des territoires ruraux. Aussi, il lui demande quelles mesures compensatoires le Gouvernement envisage pour permettre des conditions de mobilité satisfaisantes aux populations rurales.
Réponse publiée le 19 juin 2018
Comme vous le savez la France s'est fixée en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre, en particulier l'objectif de neutralité carbone d'ici 2050. Pour y parvenir, le Plan Climat prévoit une augmentation lisible du prix du carbone sur 5 ans. Celle-ci doit permettre d'influencer les choix des acteurs économiques et de favoriser l'innovation verte et l'utilisation de produits énergétiques moins carbonés. Le Plan Climat prévoit également la convergence de la fiscalité essence-gazole au cours du quinquennat. Ce mouvement, engagé en 2015, doit faire disparaître l'avantage fiscal dont bénéficie le gazole alors qu'il s'agit d'un carburant plus polluant que l'essence. Ces mesures ont en effet entraîné au 1er janvier 2018 une augmentation du prix des carburants. Néanmoins, il convient de rappeler qu'en parallèle l'État soutient le renouvellement du parc automobile pour des véhicules plus propres et moins consommateurs, à travers la prime à la conversion mise en place au 1er avril 2015. Concrètement, la prime bénéficie aux propriétaires de véhicules essence immatriculé pour la première fois avant 1997 ou diesel avant 2001, étendu à 2006 pour les ménages non imposables, qui achètent une voiture neuve ou d'occasion plus récente affichant une vignette Crit'Air électrique, 1 ou 2. En 2018 cette prime est confirmée et renforcée, en particulier pour les ménages non imposables. Le Gouvernement a par ailleurs décidé de réduire la vitesse maximale autorisée à 80 km/h sur le réseau secondaire, s'appuyant pour cela sur une recommandation adoptée en 2014 par le conseil national de la sécurité routière (CNSR), instance qui comporte en ses membres un représentant de chaque assemblée, ainsi que de chacune des associations des collectivités territoriales [Association des maires de France (AMF), Assemblée des départements de France (ADF), Association des régions de France (ARF)]. Cette mesure permet de sauver des vies, notamment dans les territoires ruraux. En effet plus de la moitié des personnes tuées sur les routes hors agglomération, 55 % selon le bilan 2016, se situe sur les routes bidirectionnelles. La mesure consiste ainsi à agir là où la mortalité est la plus forte, dans le but de protéger et non de pénaliser les habitants. En Haute-Loire par exemple, 78 % des personnes tuées sur la route le sont sur le réseau bidirectionnel hors agglomération, ce qui place ce département à un niveau parmi les plus élevés de France (source : rapport de l'observatoire national interministériel de la sécurité routière, 17 avril 2018). Loin de porter un impact négatif sur l'activité économique et touristique, et plus généralement l'attractivité d'un département comme la Haute-Loire, une telle mesure apporte au contraire une baisse de la mortalité et des routes plus sûres, au bénéfice de tous, en premier lieu les habitants du département. Par ailleurs, les études réalisées montrent que le seul inconvénient qui pourrait être évoqué, à savoir l'allongement du temps de trajet, s'avère minime, de l'ordre de 2 minutes sur 1h de trajet. Ainsi, les faibles inconvénients induits, mis au regard de ses avantages certains, conduisent à réaffirmer la pertinence de la mesure. Par ailleurs, il convient de rappeler que le Gouvernement prévoit une évaluation tant de l'évolution des vitesses moyennes pratiquées que des accidents, et qu'une clause de rendez-vous a été prévue pour qu'un point puisse être fait dans 2 ans sur les effets produits par cette décision. Le Gouvernement en tirera alors les conséquences. Plus généralement, dans la future loi d'orientation sur les mobilités en cours de préparation, le Gouvernement entend apporter des réponses concrètes à l'inégalité actuelle des Français devant l'accès à la mobilité, en particulier dans les territoires enclavés. Dans ce cadre, le Gouvernement souhaite que se créent de nouvelles solutions de mobilité dans les territoires peu denses, où le transport collectif ne constitue pas la réponse la plus adaptée et où l'offre de transport est insuffisante. La loi pourrait ainsi autoriser les collectivités à soutenir ou développer elles-mêmes des services de mobilité partagée, par exemple le covoiturage, et à verser des aides à la mobilité, dans un cadre clair et sécurisé. En parallèle, une réflexion est menée sur la manière de mobiliser l'ingénierie sur les territoires pour aider au mieux l'amorçage des services dans les territoires ruraux et diffuser les bonnes pratiques. À titre d'exemple, l'État conduit actuellement un appel à manifestation d'intérêt (AMI) « French Mobility » afin d'identifier des lieux d'expérimentation pour des nouvelles solutions de mobilité, avec une attention particulière portée aux territoires peu denses, ruraux et de montagne. Enfin, les Assises nationales de la mobilité ont révélé de nombreuses initiatives, publiques, associatives, privées, émanant de la sphère sociale, de Pôle Emploi… Ces initiatives sont trop souvent isolées. La future loi devrait favoriser le décloisonnement et l'articulation très étroite entre les acteurs de la mobilité, de la sphère sociale et de celle de l'emploi, en particulier pour l'accès à l'emploi et à la formation professionnelle.
Auteur : M. Jean-Pierre Vigier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Transports routiers
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Transports
Dates :
Question publiée le 20 février 2018
Réponse publiée le 19 juin 2018