Question orale n° 596 :
Sécurité des Français

15e Législature

Question de : Mme Marie-France Lorho
Vaucluse (4e circonscription) - Non inscrit

Mme Marie-France Lorho attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le fait qu'il y a 3 semaines, dans l'hémicycle M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, Jean Yves Le Drian, garantissait que la sécurité est la priorité absolue du Gouvernement. La sécurité est la première des libertés. Comment peut-on garantir la sécurité des Français lorsque les forces de l'ordre sont constamment mobilisées contre des « Gilets jaunes » que la politique du Gouvernement a poussés dans la rue, alors qu'elles seraient bien utiles ailleurs ? Comment peut-on garantir la sécurité des Français lorsque les policiers municipaux, premiers sur le terrain et dont l'action est décisive, sont sous équipés et sur exploités ? Le malaise est grandissant au sein des forces de police municipale. Le sentiment d'être mis de côté, méprisé et de n'agir que dans un carcan de servilité contribue à entretenir ce malaise. C'est ce même malaise qui conduit les Français à risquer chaque samedi de perdre un œil. Comment peut-on garantir la sécurité des Français lorsque le Gouvernement ramène du proche orient 130 djihadistes accompagnés de leurs familles qui sont autant de bombes à retardement ? Le Gouvernement affirme que ces djihadistes seront placés en détention, mais il ne peut offrir aucune garantie de ce placement en détention. Il faut être cohérent. M. le ministre affirmait, en janvier 2016, alors qu'il occupait cet hémicycle au sein de la majorité socialiste, qu'il faudrait pouvoir déchoir tout auteur d'un crime terroriste de la nationalité française, qu'il soit binational ou non. Lors de la révision constitutionnelle voulue par François Hollande pour permettre cette déchéance M. le ministe l'a soutenu en saluant son courage et sa cohérence et en soulignant l'importance de dépasser les clivages lorsqu'il y va de l'intérêt général. Aujourd'hui M. le Ministre vient affirmer que ces gens sont des Français avant d'être des djihadistes. Les Français, ce sont ceux qui considèrent pour 82 % d'entre eux, selon un sondage IFOP de février 2018, que ces djihadistes doivent être jugés et condamnés sur place. Mme la garde des sceaux a annoncé, par ailleurs, qu'une trentaine de djihadistes serait relâchée dans les rues en 2019. Il ne semble pas que la politique du Gouvernement emprunte le chemin de la sécurité. Il faut se donner les moyens de ses ambitions. Si celle du Gouvernement est réellement la sécurité des Français, il faut qu'il agisse en conséquence. Elle souhaite donc connaître son avis sur le sujet.

Réponse en séance, et publiée le 20 février 2019

SÉCURITÉ DES FRANÇAIS
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour exposer sa question, n°  596, relative à la sécurité des Français.

Mme Marie-France Lorho. Il y a trois semaines, dans cet hémicycle, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères Jean-Yves Le Drian nous garantissait que la sécurité était la priorité absolue du Gouvernement. Mais la sécurité est la première des libertés, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur. Comment pouvez-vous garantir la sécurité des Français lorsque nos forces de l'ordre sont constamment mobilisées contre des gilets jaunes que votre politique a poussés dans la rue, alors qu'elles seraient bien utiles ailleurs ? Comment pouvez-vous garantir la sécurité des Français, lorsque les policiers municipaux, les premiers sur le terrain et dont l'action est décisive, disposent à peine des prérogatives nécessaires à l'exercice efficace de leur mission ?

Le malaise est grandissant au sein des forces de police municipale. Le sentiment d'être mis de côté, et de n'agir que dans un carcan de servilité contribue à l'entretenir. Ce même malaise conduit les Français à risquer, chaque samedi, de perdre un œil. Comment pouvez-vous garantir la sécurité des Français lorsque vous ramenez du Proche-Orient 130 djihadistes accompagnés de leurs familles, qui sont autant de bombes à retardement ? Vous affirmez que ces djihadistes seront placés en détention, mais vous n'êtes pas magistrat et ne pouvez offrir aucune garantie de ce placement en détention.

En janvier 2016, le ministre de l'intérieur, alors député de la majorité socialiste, affirmait qu'il faudrait pouvoir déchoir tout auteur d'un crime terroriste de la nationalité française, qu'il soit binational ou non. Lors de la révision constitutionnelle voulue par François Hollande pour permettre cette déchéance, il l'a soutenu, saluant son courage et sa cohérence et soulignant l'importance de dépasser les clivages lorsqu'il y va de l'intérêt général.

Aujourd'hui, il affirme que ces gens sont des Français avant d'être des djihadistes. Mais les Français sont 80 % à considérer, selon un sondage IFOP de février 2018, que ces djihadistes doivent être jugés et condamnés sur place. Mme la garde des sceaux nous a annoncé par ailleurs qu'une trentaine de djihadistes serait relâchée dans nos rues en 2019.

Il ne semble pas que votre politique emprunte le chemin de la sécurité. Il faut se donner les moyens de ses ambitions. Si la vôtre est réellement la sécurité des Français, agissez en conséquence !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur. Votre question, madame la députée, revêt plusieurs aspects. Le mouvement des gilets jaunes a effectivement mobilisé énormément d'effectifs, notamment le samedi, pour des tâches de gestion de l'ordre public. Cela a en effet détourné les effectifs des missions de sécurité publique ces jours-là – mais seulement ces jours-là.

Ce mouvement revêt un caractère extrêmement violent qu'il faut condamner. Permettez-moi de relever que quand on manifeste pacifiquement, on ne risque pas de perdre un oeil : on risque de perdre un œil quand on s'en prend violemment aux forces de l'ordre, quand on veut investir des institutions. Les forces de l'ordre répondent toujours de façon proportionnée. Les tirs de lanceur de balle de défense qui ont eu lieu sont toujours proportionnés à des agressions extrêmement violentes.

Pour autant, cette crise des gilets jaunes et ces opérations de gestion de l'ordre public, qui se déroulent souvent le samedi, ne nous empêchant pas, tout au long de la semaine, de déployer la police de sécurité du quotidien et d'être présents sur l'ensemble du territoire national. C'est d'ailleurs dans le cadre de la police du quotidien que nous travaillons avec les polices municipales, qui, loin d'être écartées des missions de sécurité, y concourent pleinement, mais dans le cadre des attributions qui sont les siennes.

Or la police municipale ne participe pas à la gestion des mouvements d'ordre public. Elle exerce ses compétences dans le cadre qui est le sien et en coordination très étroite avec les forces de l'ordre – policiers nationaux, gendarmes –, dans le cadre de conventions de coopération qui, selon moi, fonctionnent très bien, comme l'a montré le rapport de vos collègues Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue. Nous examinons les moyens de mieux associer les polices municipales à l'action menée.

Pour ce qui est des djihadistes, je répète que l'ensemble d'entre eux font l'objet de procédures judiciaires, le plus souvent pour association de malfaiteurs en vue d'un crime terroriste. Des procédures sont en cours. J'ai eu la fierté et l'honneur de diriger la Direction générale de la sécurité intérieure – DGSI –, l'un de ces services de renseignements chargés, notamment, des procédures judiciaires concernant ces djihadistes. Je vous confirme qu'ils font tous l'objet de procédures judiciaires.

Pour vous, nous considérons qu'ils sont Français avant d'être djihadistes. Ce n'est pas exactement la réalité : ce sont des djihadistes français, et assurer la sécurité des Français nous tient à cœur. Or la dispersion de ces individus pourrait avoir des conséquences dramatiques pour la sécurité des Français. Ce n'est qu'une hypothèse pour l'instant, mais nous y travaillons évidemment.

En tout état de cause, je vous confirme que si ces individus venaient à remettre le pied sur le territoire national, ils seraient immédiatement interpellés et incarcérés. Certains le sont déjà pour des peines de prison bien plus longues que celles citées par Mme Marine Le Pen.

Quant à ceux qui ont purgé leur peine, je vous confirme qu'en 2019, 33 personnes condamnées pour des faits de terrorisme sortiront de détention. Ces individus sont suivis par les services de renseignement, et notamment par celui que j'ai eu l'honneur de diriger, qui travaille sur le haut du spectre. Vous imaginez bien que personne n'est lâché dans la nature.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Lorho.

Mme Marie-France Lorho. Je vous remercie de votre réponse. J'espère que les personnes qui seront relâchées seront suivies de près. Il y va de la sécurité de notre pays.

Données clés

Auteur : Mme Marie-France Lorho

Type de question : Question orale

Rubrique : Sécurité des biens et des personnes

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 février 2019

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