CARTE JUDICIAIRE ET COUR D'APPEL DE NÎMES
M. le président. La parole est à Mme Françoise Dumas, pour exposer sa question, n° 59, relative à la carte judiciaire et à la Cour d'appel de Nîmes.
Mme Françoise Dumas. Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. La justice est une priorité de ce quinquennat, comme en témoigne la large concertation lancée le 6 octobre dernier par le Premier ministre et Mme la garde des sceaux, avec les acteurs de terrain, autour de cinq chantiers thématiques.
Sur la forme, je salue tout d'abord la méthode adoptée : la réflexion collaborative permet d'une part aux parties prenantes de s'exprimer et d'autre part de faire remonter aux ministères concernés les expériences et les initiatives locales. Elle constitue en outre le meilleur moyen de trouver un consensus et de répondre non seulement aux besoins des juridictions, mais également aux attentes de nos concitoyens.
Sur le fond, en plus de la transformation numérique, de la réforme de la procédure civile, de la procédure pénale, du sens et de l'efficacité des peines, sera étudiée la question de l'adaptation de l'organisation judiciaire.
Je vous interroge ce matin sur ce dernier chantier. L'objectif est en effet de mettre en place des équipes pluridisciplinaires autour des magistrats et de maintenir le contentieux du quotidien à proximité des justiciables.
C'est la raison pour laquelle, avec mes collègues parlementaires du Gard, nous avons récemment rencontré Mme la garde des sceaux afin d'évoquer les enjeux relatifs à la pérennité de la juridiction de Nîmes.
Cette rencontre a eu lieu au moment où Dominique Raimbourg et Philippe Houillon – tous deux anciens présidents de la commission des lois de l'Assemblée nationale –, chargés d'une mission dont les conclusions orienteront les évolutions de la carte judiciaire, débutent leurs travaux.
Si Mme la garde des sceaux a réaffirmé à l'occasion de cette rencontre son engagement à ne fermer aucune juridiction d'appel et à maintenir celle de Nîmes, des inquiétudes demeurent néanmoins quant à la spécialisation de cette dernière.
Si celle-ci devait se concrétiser, les hypothèses actuellement envisagées laissent présager de la fuite vers Montpellier et Toulouse de la moitié des contentieux aujourd'hui traités à Nîmes.
Une telle évolution aurait des conséquences importantes, non seulement bien sûr sur le nombre des magistrats en poste à Nîmes ainsi que sur les cabinets d'avocats installés dans l'agglomération, mais également,
in fine, sur les justiciables, tant en termes de délai de traitement des contentieux restants qu'en termes de modalités de leur défense.
Or, parmi les principes assurant la cohérence dans l'action de la justice figurent, comme Mme la garde des seaux l'a rappelé, ceux de proximité et d'efficacité.
Pouvez-vous donc, madame la secrétaire d'État, nous communiquer des éléments de nature à répondre aux préoccupations légitimes du monde de la justice nîmois, c'est-à-dire des professionnels du droit, des élus et de nos concitoyens gardois ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Madame la députée, je vous prie d'excuser Mme Nicole Belloubet, qui est absente ce matin. Elle a cependant déjà eu l'occasion d'évoquer la question importante de la réorganisation de notre réseau judiciaire.
Il s'agit, comme vous l'avez noté, d'un sujet sensible pour nos territoires comme pour l'ensemble des acteurs du monde judiciaire. Le 5 octobre dernier ont été lancés, avec le Premier ministre, les cinq chantiers de la justice, qui traduisent notre volonté de transformer la justice de notre pays.
C'est une des grandes priorités du Président de la République et du Premier ministre, comme en atteste, avec 3,9 % d'augmentation et 1 000 emplois créés, le budget pour 2018.
Ces chantiers de la justice portent sur la transformation numérique, la simplification de la procédure civile et pénale, l'efficacité de la peine et l'adaptation de l'organisation territoriale de la justice. Nous ne pouvons en rester au
statu quo : il nous faut faire évoluer notre justice afin de mieux répondre aux attentes des justiciables.
Mais il faut dialoguer et ne pas imposer brutalement : c'est pourquoi il a été demandé, ainsi que vous l'avez mentionné, à deux anciens présidents de votre commission des lois – MM. Philippe Houillon et Dominique Raimbourg – de mener une mission de concertation avec l'ensemble des parties prenantes sur la question de l'organisation judiciaire.
Comme la garde des sceaux a déjà eu l'occasion de le dire, la volonté du Gouvernement est claire : le maillage actuel de nos juridictions sera maintenu. En outre, comme vous le savez, le bâtonnier du barreau de Nîmes a été reçu par la mission de concertation. Toutes les propositions qu'il aura pu formuler pourront donc être prises en compte dans ses conclusions, qui seront remises le 15 janvier prochain.
Concernant l'organisation territoriale de notre justice, la démarche suivie n'a qu'un seul objectif : adapter notre réseau aux défis qui s'imposent à la justice et rendre le meilleur service possible aux justiciables, dans des conditions optimales pour les acteurs du monde judiciaire.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Dumas.
Mme Françoise Dumas. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour ces précisions. J'insiste : lorsque l'on parle de proximité et d'efficacité, la Cour d'appel de Nîmes, qui a la particularité d'être à cheval sur plusieurs départements – l'Ardèche, la Lozère et le Vaucluse – et sur plusieurs régions, permet vraiment de répondre à toutes les orientations que le Gouvernement souhaite donner à sa politique judiciaire.
Je serai par conséquent, comme mes collègues gardois, extrêmement vigilante quant à l'évolution de ce dossier.
Au regard de la particularité démographique de nos deux régions, qu'il s'agisse de l'Occitanie ou de Provence-Alpes-Côte d'Azur, nous avons intérêt à garder – puisque les deux autres cours d'appel, que ce soit celle de Montpellier ou celle de Toulouse, sont, comme celle d'Aix-en-Provence, déjà surchargées – la Cour d'appel de Nîmes.
Le
statu quo actuel nous permettrait, en tout cas dans un premier temps, de répondre à cette nécessité de proximité et d'efficacité.