15ème législature

Question N° 619
de M. Paul Molac (Libertés et Territoires - Morbihan )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > établissements de santé

Titre > Craintes sur la réforme des hôpitaux

Question publiée au JO le : 26/02/2019
Réponse publiée au JO le : 06/03/2019 page : 1761

Texte de la question

M. Paul Molac alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les conséquences que pourrait avoir la classification des hôpitaux en trois catégories comme envisagé dans le plan « Ma santé 2022 ». À l'heure où le monde hospitalier est en souffrance, beaucoup attendent des mesures qui pourront prochainement être prises par le Gouvernement. Malheureusement, ce plan inquiète, en particulier son volet visant à classifier les hôpitaux en trois catégories : hôpitaux offrant des soins de proximité, des soins spécialisés ou des soins ultraspécialisés. Le Gouvernement prévoit ainsi la création de 600 hôpitaux de proximité. Dans les faits, cette annonce s'apparente à un déclassement des petits établissements par la fermeture de services, de lits, à la faveur d'hôpitaux-centres où se concentreront les soins spécialisés (chirurgie, maternité). Pour prendre le cas concret du centre hospitalier de Ploërmel, dans le nord-est du Morbihan, on s'inquiète d'une progressive relocalisation des services au profit de l'hôpital de Vannes. Peu à peu, la direction semble préparer de manière sous-jacente la fermeture ou le transfert de certains services. Jusqu'où ira-t-on lorsque l'établissement aura acquis le tout-nouveau statut d'hôpital de proximité ? Jusqu'à la fermeture des services de chirurgie et donc de la maternité qui enregistre environ 700 naissances par an ? En tout cas, seuls trois types d'établissement semblent être prévus. Dès lors, où classer les établissements équipés d'une maternité et d'un plateau technique de chirurgie ? À l'heure où les zones rurales sont en proie à une désertification notable, que le sentiment d'abandon des pouvoirs publics ne cesse de se renforcer, il est difficile d'imaginer que les petits hôpitaux puissent perdre leurs plateaux techniques et soient transformés en de simples relais de maisons de santé ou d'établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Aussi, il lui demande que la classification administrative simpliste, telle qu'elle a pu être imaginée dans le plan « Ma santé 2022 », puisse être revue, sous peine de déclasser des établissements de première importance pour leur territoire et ses habitants.

Texte de la réponse

CONSÉQUENCES DE LA CLASSIFICATION DES HÔPITAUX


M. le président. La parole est à M. Paul Molac, pour exposer sa question, n°  619, relative aux conséquences de la classification des hôpitaux.

M. Paul Molac. Monsieur le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, le milieu hospitalier va mal, et ce depuis longtemps déjà.

Malgré de nombreuses alertes, la situation n'a cessé de se dégrader. Le système actuel pousse les personnels à soigner toujours plus vite avec moins de moyens humains. Résultat : les équipes soignantes sont en souffrance, et la qualité des soins s'en ressent.

Vous le savez, les hôpitaux ont très largement fait les frais du retour à l'équilibre de la sécurité sociale. Afin de réduire le déficit, on leur a demandé toujours plus d'économies. Or, à l'heure où la sécurité sociale devrait enfin pouvoir dégager un excédent financier, le déficit des établissements publics de santé, lui, s'aggrave, puisqu'il a atteint 1 milliard d'euros en 2018. Et on leur demande encore de faire des économies !

Au regard de cette situation de tension extrême, on attend beaucoup du plan « ma santé 2022 ». Malheureusement, son contenu inquiète, en particulier le volet visant à classifier les hôpitaux en trois catégories.

Le Gouvernement prévoit la création du statut d'hôpital de proximité qui pourrait concerner 600 établissements. Ne s'agit-il pas, en réalité, de déclasser des établissements en fermant des services et des lits au profit d'hôpitaux-centres dans lesquels se concentreront les soins spécialisés tels que la chirurgie ou l'obstétrique ?

À l'hôpital de Ploërmel, le personnel redoute une relocalisation progressive des services dans les hôpitaux de Vannes, Rennes ou Saint-Brieuc, laquelle aurait pour effet un doublement du temps de trajet – de vingt à trente minutes, celui-ci passerait à une heure. L'éventualité de restructurations inquiète également le personnel. Qu'en sera-t-il lorsque l'établissement aura acquis le tout nouveau statut d'hôpital de proximité ? Ira-t-on jusqu'à la fermeture des services de chirurgie et de la maternité qui enregistre pourtant 700 naissances par an ? Dès lors que la réforme ne prévoit que trois catégories d'établissement, où classer les établissements qui comptent à la fois une maternité et un plateau technique de chirurgie, comme ceux du centre de la Bretagne – Ploërmel, Redon, Pontivy ou Carhaix ?

À l'heure où les habitants des zones rurales s'inquiètent de la raréfaction des services publics, il est difficile d'imaginer que les hôpitaux de taille moyenne, très structurants pour les territoires, soient transformés en simples relais des maisons de santé ou en EHPAD.

Comptez-vous revoir la classification des hôpitaux qui, sous la forme simpliste envisagée dans le plan « ma santé 2022 », risque de déclasser des établissements jouant un rôle de première importance dans leur territoire ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Soyez convaincu, monsieur Molac, que ce qui préoccupe le Gouvernement est bien l'accès aux soins et non des considérations budgétaires.

Vous soulevez les questions de la redéfinition de la gradation des soins hospitaliers et de la structuration des soins de proximité, qui sont au cœur des évolutions annoncées dans le cadre du plan « ma santé 2022 ».

L'une des mesures phares de ce plan concerne, vous l'avez souligné, la rénovation du modèle d'organisation des hôpitaux de proximité. L'activité de ces derniers sera axée sur la proximité afin d'assurer un meilleur accès aux soins dans tous les territoires – nous entendons les demandes des élus à cet égard – tout en préservant la qualité de vie des patients, lesquels auront la possibilité de rester près de leur domicile et de leurs proches.

Loin de déclasser les établissements considérés, l'objectif de la réforme est de renforcer les hôpitaux de proximité, qui assureront, en tant qu'établissements sanitaires à part entière, le premier niveau de la gradation des soins hospitaliers, et contribueront, par des coopérations étroites avec les acteurs de la ville et du secteur médico-social, à des soins de proximité de qualité. Ces établissements présenteront la double particularité d'assurer uniquement des activités de proximité – ni chirurgie, ni obstétrique – et d'être structurés pour partager avec la médecine de ville une responsabilité territoriale. Afin de leur permettre de relever ces défis, nous veillerons à donner aux hôpitaux de proximité un modèle d'organisation et de financement adapté et à même de renforcer leur attractivité.

Bien sûr, la gradation des soins et le déploiement des hôpitaux de proximité seront décidés au cas par cas, selon les besoins des territoires et avec pour seule boussole la qualité et la sécurité des soins.

S'agissant du centre hospitalier de Ploërmel, les enjeux sont spécifiques et, à ce titre, doivent être regardés sans a priori. L'établissement connaît ainsi depuis plusieurs années une situation financière dégradée. L'ARS l'accompagne avec le plus grand volontarisme par le biais d'aides en exploitation ou en investissement, marquant ainsi son plein soutien à la démarche engagée par l'établissement pour assurer son avenir. Sur la période 2013-2018, ce sont 7 millions d'euros d'aides qui lui ont été alloués.

L'activité du centre hospitalier de Ploërmel, dont le plateau technique chirurgical et obstétrical a vocation à être conforté, est pleinement intégrée dans le projet médical partagé du groupement hospitalier de territoire. Une meilleure attractivité médicale, dans un contexte de démographie médicale délicat, et la restauration progressive de l'équilibre financier de l'établissement sont attendues en retour.