agriculture biologique
Question de :
M. Loïc Prud'homme
Gironde (3e circonscription) - La France insoumise
Question posée en séance, et publiée le 3 août 2017
AGRICULTURE BIOLOGIQUE
M. le président. La parole est à M. Loïc Prud'homme, pour le groupe La France insoumise.
M. Loïc Prud'homme. Monsieur le ministre de l'agriculture, aujourd'hui, le 2 août, est le « jour du dépassement » pour l'année 2017. À compter de ce jour l'humanité vit à crédit car nous avons consommé l'ensemble des ressources naturelles que la planète peut renouveler en une année. Ce jour arrive chaque année plus tôt dans le calendrier, ce qui témoigne de la dégradation continue de notre environnement.
Objectivement, monsieur le ministre, cette semaine a aussi été pour vous celle du dépassement de toute cohérence politique. Le constat de l'épuisement des ressources naturelles étant indiscutable, nous ne pouvons poursuivre dans la voie de l'agriculture intensive, dont les pratiques utilisent ces ressources au-delà du soutenable.
Je passe, pour cette fois, sur l'utilisation des pesticides et autres perturbateurs endocriniens : vous aurez aussi, avec vos collègues, à en répondre !
Alors que la production biologique, qui représente une autre voie, est en plein essor – 16 % de surface agricole en plus en 2016 – et que la demande de produits issus de l'agriculture biologique n'est pas pourvue faute de producteurs en nombre suffisant, vous avez annoncé jeudi dernier – un jeudi noir de plus – que vous n'affecterez pas aux aides à l'agriculture biologique les moyens suffisants pour les trois prochaines années !
Vous dépassez toutes les lois de la logique cartésienne : tandis que, lundi, vous vous donnez pour objectifs 50 % de nourriture bio dans les cantines d'ici cinq ans et 8 % de la surface agricole consacrée à l'agriculture biologique en 2021, vous coupez, au même moment, les moyens affectés pour soutenir ce mode de production – sans compter le fait que les aides des années 2015 et 2016 ne sont toujours pas versées !
Monsieur le ministre, vous prétendez être pragmatique, tandis que nous ne serions que des rêveurs. Mais ce sont vos déclarations qui sont illusoires !
Pouvez-vous me dire concrètement comment vous comptez faire pour éviter que les milliers de paysans qui se convertissent à l'agriculture biologique ne reviennent à l'agriculture conventionnelle ? Pouvez-vous répondre aux trente-quatre organisations qui vous ont interpellé sur cette erreur historique, parallèlement au lancement des États généraux de l'alimentation ?
Pouvez-vous expliquer aux consommateurs, inquiets pour leur santé, que vous renoncez à une production saine et locale en quantité suffisante ? Enfin, pouvez-vous justifier de ne pas engager 250 millions d'euros pour l'agriculture biologique, alors que le volume d'aides total de politique agricole commune, PAC, atteint les 9 milliards d'euros ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI ainsi que sur quelques bancs du groupe NG.)
M. Stéphane Peu. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le député, je vous remercie pour votre question, qui me permettra de rétablir les faits dans leur exactitude, dans leur vérité. D'ailleurs, vous avez déjà donné vous-même, dans votre question, des éléments de réponse. Je me suis fixé un cap : honorer la promesse du chef de l'État d'offrir 50 % de produits biologiques dans la restauration scolaire, et porter de 6 % à 8 % la surface agricole exploitée en agriculture biologique. Il s'agit de répondre à une demande sociale croissante, exprimée par les consommateurs depuis un certain nombre d'années.
Pour y parvenir, j'ai pris mes responsabilités, avec l'aval du Gouvernement, et j'ai décidé de notifier à la Commission européenne un transfert de 4,2 % des aides du premier pilier de la PAC vers le second, qui viennent s'ajouter aux 3,3 % déjà engagés.
Cette décision traduit notre volonté, ferme et définitive, de nous orienter vers l'agriculture biologique, de la soutenir, de stimuler son dynamisme. Aujourd'hui, comme vous le savez, l'agriculture biologique bénéficie des aides de l'agriculture classique, du premier et du second piliers, au même titre que l'agriculture conventionnelle. Elle bénéficie par ailleurs de mesures spécifiques pour accompagner son développement, notamment les aides à la conversion, qui sont versées pendant cinq ans aux agriculteurs pour accompagner leurs changements de pratiques.
Le transfert que je viens de vous annoncer, monsieur le député, permettra d'atteindre l'objectif dont j'ai parlé, soit 8 % de surface agricole convertie à l'agriculture biologique en 2021, contre 6 % aujourd'hui. Je souhaite par ailleurs associer étroitement à cette réflexion l'ensemble des conseils régionaux : nous débuterons avec eux, à la rentrée, une conversation pour définir nos politiques en matière de financement de l'agriculture biologique. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
M. Rémi Delatte. Et ce sont les paysans qui payent !
Auteur : M. Loïc Prud'homme
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 août 2017