15ème législature

Question N° 660
de Mme Danièle Obono (La France insoumise - Paris )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > justice

Titre > politique pénale

Question publiée au JO le : 08/03/2018
Réponse publiée au JO le : 08/03/2018 page : 1588

Texte de la question

Texte de la réponse

POLITIQUE PÉNALE


Mme la présidente. La parole est à Mme Danièle Obono, pour le groupe La France insoumise.

Mme Danièle Obono. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, Edouard Philippe. Nous aurions souhaité la poser à Mme Belloubet mais, entre les coups de semonce de la place Beauvau et les coups de com' de l'Élysée, ce n'est de toute évidence pas celle que nous sommes désormais au regret de considérer comme l'ex-ministre de la justice qui détermine la politique pénale du Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe REM.)

Monsieur le Premier ministre, le 20 février dernier, ma collègue Caroline Fiat interrogeait ladite ministre de la justice au sujet du plan du Gouvernement visant à la construction de 15 000 places de prison. La ministre nous assurait alors que ces places seraient effectivement construites.

Cette position n'est pas celle de La France insoumise, qui s'oppose à l'augmentation mécanique du nombre de places induite par la politique du tout-carcéral. Nous prônons une politique pénale qui fasse de la prison l'exception et des peines alternatives à l'incarcération la norme, afin de permettre une véritable réinsertion du plus grand nombre de détenus et lutter efficacement contre la récidive.

M. Ludovic Pajot. Quel laxisme!

Mme Danièle Obono. Mais nous avions pris acte du fait que votre gouvernement avait choisi une tout autre stratégie. Or voilà qu'hier le Président de la République a annoncé que seulement 7 000 places seraient construites, contredisant en cela sa ministre. Alors, monsieur le Premier ministre, qui croire : votre président ou votre ministre ?

Autre épisode révélateur : la semaine dernière, le compte Twitter de votre gouvernement publiait le message suivant : « 170 000 interpellations pour seulement 33 000 condamnations : il est urgent de repenser la procédure pénale… #PoliceSécuritéQuotidien ». Ce tweet insulte soit le travail de la police soit celui des juges ; il remet en cause l'office de la justice. Il a été, depuis, supprimé, mais les contradictions internes de l'exécutif demeurent. Il semble en effet que, pour votre gouvernement, la claire délimitation des domaines de compétences des ministères et la séparation des pouvoirs représentent un obstacle à la vision jupitérienne de la justice.

Je vous demande par conséquent, monsieur le Premier ministre, qui est à la tête de ce gouvernement : le cabinet de la présidence ou vous-même, comme cela est normalement prévu à l'article 21 de notre Constitution ? Et si c'est bien vous, comme nous l'espérons, à qui doivent s'adresser les parlementaires ainsi que les acteurs et actrices du monde judiciaire pour réellement débattre de votre politique pénale : Nicole Belloubet ou Gérard Collomb ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)

M. Erwan Balanant. L'argumentation est faible !

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. (Mmes et MM. les députés des groupes REM et MODEM se lèvent et applaudissent longuement.)

M. Pierre Cordier. Mais elle n'a pas encore parlé !

M. Alexis Corbière. Ce n'est pas un stade ici ! Nous ne sommes pas des supporters !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la députée, c'est bien la ministre de la justice qui vous répond. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)

Dans ce gouvernement, chacun est à sa place et exerce les responsabilités qui sont les siennes. (Mêmes mouvements.)

M. Michel Herbillon. Debout, debout !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Pour ma part, sous l'autorité du Premier ministre, j'exerce pleinement mes responsabilités, qui visent, en ce moment, à repenser notre système judiciaire,…

M. Éric Coquerel. Il faut le dire à Emmanuel Macron !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . …à partir des éléments qui fondent la justice civile, la justice pénale, l'exercice des peines, l'organisation de nos prisons et l'adaptation de notre réseau.

M. Aurélien Pradié. Et à assurer la paix dans le monde !

M. Christian Hutin. Vous fermez les tribunaux !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . L'ensemble de ces éléments fonde les chantiers de la justice, dont j'assume pleinement la responsabilité et dont M. le Premier ministre rendra compte dans les prochains jours.

M. Aurélien Pradié. Avec une modestie historique !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Dans le cadre de ces chantiers de la justice, nous avons l'ambition de rendre les peines plus effectives et de construire des places de prison réellement adaptées aux besoins.

M. Fabien Di Filippo. Ce n'est pas vrai !

Mme Émilie Bonnivard. C'est du laxisme !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Ce faisant, nous respecterons pleinement l'engagement du Président de la République.

Mme Danièle Obono. Lequel ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Nous voulons construire, à partir de ces notions, une nouvelle justice plus proche du justiciable afin d'améliorer le service public rendu à l'ensemble de nos concitoyens.

M. Christian Hutin. Je n'en suis pas certain !

M. Michel Herbillon. Ce sont des mots !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. C'est notre seule ambition, madame la députée, et j'espère que vous la partagez. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.)

Plusieurs députés du groupe LR. Debout ! Debout !