Prérogatives supplémentaires à allouer aux polices municipales
Question de :
Mme Emmanuelle Ménard
Hérault (6e circonscription) - Non inscrit
Mme Emmanuelle Ménard interroge M. le ministre de l'intérieur sur les prérogatives supplémentaires à allouer aux polices municipales alors que les polices de sécurité et du quotidien n'ont pas pu être implantées sur tout le territoire français. La délinquance évoluant et le terrorisme pouvant frapper partout en France, les polices municipales sont très souvent les premières sur le terrain et leurs prérogatives devraient évoluer également. Elle lui demande s'il a prévu, et selon quel calendrier, de leur donner les moyens de remplir au mieux leur mission : assurer tranquillité et sécurité des citoyens.
Réponse en séance, et publiée le 27 mars 2019
PRÉROGATIVES DES POLICES MUNICIPALES
M. le président. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour exposer sa question, n° 663, relative aux prérogatives des polices municipales.
Mme Emmanuelle Ménard. Bien que les incivilités continuent de polluer la vie quotidienne de nos concitoyens – fin 2018, 22 % des Français se sentaient en danger dans leur quartier ou dans leur village : du jamais vu depuis dix ans –, la police de sécurité et du quotidien n'a pas pu être implantée sur tout notre territoire. Aussi, faute de ce soutien, certaines communes ont multiplié les effectifs de leur police municipale et les moyens qu'elles leur ont consacrés.
Meilleur équipement, armement, formation, caméras de vidéoprotection : autant d'aspects qui, s'ils sont pris en charge par les municipalités, ne suffisent pas.
Pourquoi ? Parce que, la délinquance évoluant, les prérogatives de nos polices municipales devraient également évoluer. Il serait ainsi nécessaire de généraliser leur accès direct au fichier des permis de conduire, au système d'immatriculation des véhicules et aux fichiers des objets et des véhicules signalés – autant dire volés – ainsi qu'au fichier des personnes recherchées. Il faudrait également leur permettre de procéder à des contrôles d'identités et à des fouilles de véhicules, tant dans le cadre d'une procédure judiciaire que dans celui d'une réquisition écrite du procureur de la République.
Les polices municipales peuvent participer à la reconquête des quartiers de non-droit en France ; elles sont d'ailleurs peut-être même les mieux placées, grâce à leur connaissance précise du terrain. Elles savent en outre prendre des risques pour cela.
Le week-end dernier, à La Devèze, quartier difficile de Béziers classé quartier prioritaire de la politique de ville, alors que notre police municipale tentait d'arrêter le pilote d'une moto volée qui faisait de la roue arrière sans casque, elle a été copieusement caillassée. Son commandant a manqué de recevoir une pierre, vraisemblablement tirée à l'aide d'un lance-pierre, en plein visage. Ces situations exaspèrent les Français. Une loi contre les rodéos urbains a bien été adoptée l'an dernier mais, sur le terrain, rien ne change.
Ma question est donc simple : quand allez-vous, monsieur le ministre de l'intérieur, donner à ces 22 000 hommes et femmes les moyens d'assurer efficacement la tranquillité de nos concitoyens ?
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé des collectivités territoriales.
M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Madame Ménard, je vous prie d'excuser mon collègue Christophe Castaner, ministre de l'intérieur, qui m'a confié le soin de vous lire la réponse qu'il a préparée avec l'aide de ses services.
Pour mener à bien leurs missions, outre des compétences en matière de police administrative, les policiers municipaux disposent, vous le savez, du statut d'agent de police judiciaire adjoint, ce qui leur confère de nombreuses autres compétences, comme la constatation des contraventions aux arrêtés de police du maire ou la lutte contre les nuisances sonores.
En outre, depuis trois ans, leurs moyens ont été considérablement renforcés afin de leur permettre d'exercer plus efficacement leurs missions. La loi du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs a élargi leurs compétences géographiques en prévoyant qu'ils puissent constater, sur affectation du maire, les infractions à la police du transport ferroviaire. Lorsqu'ils sont affectés à la sécurité d'une manifestation sportive, récréative ou culturelle, ils peuvent procéder à l'inspection visuelle des bagages et, avec le consentement de leur propriétaire, à leur fouille ainsi qu'à des palpations. Grâce à la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, ils peuvent aussi participer à la protection des périmètres édictés par le préfet en cas de risque d'actes terroristes.
S'agissant de leur équipement, depuis l'entrée en vigueur du décret du 28 novembre 2016, les policiers municipaux ont notamment la possibilité de porter un pistolet semi-automatique de calibre 9 mm, qui assure de meilleures conditions de riposte. Afin de prévenir les incidents au cours des interventions, les agents de police municipale peuvent être équipés de caméras individuelles ; cette mesure, à l'origine expérimentale, a été pérennisée par la loi du 3 août 2018 relative à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique.
Enfin, un décret du 24 mai 2018 a ouvert aux agents de police municipale un accès direct aux informations enregistrées dans les traitements de données à caractère personnel relatifs au permis de conduire et à la circulation des véhicules.
Les agents de police municipale disposent donc de moyens conséquents, largement renforcés depuis trois ans, ce qui leur permet d'assurer toujours plus efficacement leurs missions. Nous sommes bien évidemment en concertation permanente avec les associations d'élus sur ces questions.
M. le président. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.
Mme Emmanuelle Ménard. Comme vous venez de le souligner, monsieur le ministre, les prérogatives des policiers municipaux ont été accrues depuis quelques années, mais cela ne suffit malheureusement pas car la délinquance est en constante évolution.
Vous savez bien évidemment que les policiers municipaux, du fait de leur présence sur le terrain, sont souvent les premiers à se présenter et à apporter une réponse, non seulement en cas de délinquance et d'incivilité au quotidien, mais aussi en cas d'acte de terrorisme, comme on l'a vu à Nice dernièrement. Ce que réclame la police municipale, de même que la police nationale, c'est qu'une meilleure coopération puisse être mise en place entre elles, ainsi qu'avec la gendarmerie. Le plus souvent, cela se passe très bien, car tous ces corps œuvrent à un même but : assurer la sécurité de leurs concitoyens.
Ce qui manque, sur le terrain, ce sont des consignes claires de la part des préfets et parfois une volonté affirmée de la part des procureurs de la République. C'est ce que les policiers municipaux souhaitent, ainsi que voir leurs prérogatives accrues. Je déposerai prochainement une proposition de loi en ce sens.
Auteur : Mme Emmanuelle Ménard
Type de question : Question orale
Rubrique : Police
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 mars 2019