Question au Gouvernement n° 674 :
réforme de la justice

15e Législature

Question de : M. Didier Paris
Côte-d'Or (5e circonscription) - La République en Marche

Question posée en séance, et publiée le 14 mars 2018


RÉFORME DE LA JUSTICE

M. le président. La parole est à M. Didier Paris, pour le groupe La République en marche.

M. Didier Paris. Madame la garde des sceaux, le Président de la République a prononcé la semaine dernière, à l'École nationale d'administration pénitentiaire d'Agen, un discours ayant pour ambition de redonner son sens à la peine. Celle-ci, nous dit la loi, doit assurer la protection de la société, prévenir la commission de nouvelles infractions et restaurer l'équilibre social dans le respect des droits de la victime en sanctionnant l'auteur de l'infraction et en favorisant son amendement et sa réinsertion.

Cependant le Président de la République fait le constat d'un système à bout de souffle, qui n'obtient pas les résultats escomptés. Trop de dispositions bloquent l'exécution rapide et effective des condamnations, introduisent une différence entre la peine prononcée et celle réellement exécutée, toutes situations que nos concitoyens ne comprennent pas.

C'est la raison pour laquelle nous devons refonder le système sur des peines effectives et des réponses pénales clairement différenciées, liées tant à la nature et la gravité de l'infraction qu'à la personnalité de l'auteur et qui doivent avoir du sens pour les victimes et la société.

M. Aurélien Pradié. Chez les Bisounours…

M. Didier Paris. Dix mille personnes sont condamnées chaque année à une peine de prison de moins d'un mois et 80 000 à des peines comprises entre un et six mois. Avec presque 70 000 détenus, la France reste le seul grand pays d'Europe à connaître une tendance à la hausse.

La prison reste, évidemment, une voie nécessaire. Mais, tout en faisant preuve d'une fermeté sans concession face à la délinquance, toutes les autres formes de réponse doivent être valorisées, tendant aux mêmes objectifs d'efficacité et de dignité.

M. Thibault Bazin. Ah, on sent la fermeté !

M. Didier Paris. Ces pistes ont été largement abordées dans le cadre des « chantiers de la justice » que vous avez lancés, madame la ministre. Elles supposent qu'on adapte notre législation pénale et qu'on considère à leur juste valeur d'autres réponses, telles que les mesures de surveillance électronique, de semi-liberté, de placement en extérieur ou encore de travail d'intérêt général, objet d'un tout récent rapport.

Pouvez-vous, madame la ministre… (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.)

M. le président. Merci, monsieur le député. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Effectivement, monsieur le député, le constat qui a été fait par plusieurs observateurs sur notre système de peines repose sur une triple observation.

Celle d'abord d'un manque de crédibilité puisque, on le voit aujourd'hui, les peines d'emprisonnement très courtes sont inefficaces, en termes de lutte contre la récidive comme de réinsertion.

M. Guy Teissier. Elles ne sont pas exécutées !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Celle ensuite d'une perte de lisibilité puisque beaucoup de peines ne sont pas exécutées comme elles ont été prononcées. Celle d'une perte d'efficacité enfin puisque les systèmes d'aménagement des peines sont très souvent opaques, peu lisibles et donc insatisfaisants, pour nos concitoyens comme pour les justiciables.

Nous avons donc proposé – le Président de la République s'est exprimé à ce sujet la semaine dernière – un système qui repose sur une double exigence : d'abord redonner du sens à la peine, ensuite renforcer l'efficacité de notre système pénal.

Redonner du sens à la peine, cela signifie adapter la peine à la personne condamnée, trouver la peine la plus propre à assurer à la fois la sécurité de la société et la réinsertion du condamné. C'est ce qui est fait au travers de la mise en place de peines autonomes. Je pense notamment à la détention sous surveillance électronique, qui sera désormais une peine autonome ; je pense également à l'extension du travail d'intérêt général.

M. Ugo Bernalicis. Mais vous réduisez les budgets !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . C'est ce que nous faisons également en assurant un suivi plus adapté du parcours du condamné en termes d'activités qu'il devra accomplir.

M. Fabien Di Filippo. À quand les peines au Club Med ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Nous souhaitons également renforcer l'efficacité des peines en prévoyant une scansion des peines…

M. Aurélien Pradié. Vous vous occupez de poésie ou de justice ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. …qui soit adaptée à la réalité de ce que nous pouvons faire et qui nous permette de sortir de l'hypocrisie actuelle. C'est l'objet principal que nous devons…

M. le président. Merci madame la ministre.

Données clés

Auteur : M. Didier Paris

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 mars 2018

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