15ème législature

Question N° 695
de M. Vincent Descoeur (Les Républicains - Cantal )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > sécurité routière

Titre > limitation de la vitesse autorisée sur les routes secondaires

Question publiée au JO le : 15/03/2018
Réponse publiée au JO le : 15/03/2018 page : 1792

Texte de la question

Texte de la réponse

LIMITATION DE LA VITESSE AUTORISÉE SUR LES ROUTES SECONDAIRES


M. le président. La parole est à M. Vincent Descoeur, pour le groupe Les Républicains.

M. Vincent Descoeur. Monsieur le Premier ministre, le porte-parole de votre gouvernement a confirmé, mercredi dernier, la décision de réduire la vitesse maximale autorisée à 80 kilomètres par heure sur le réseau secondaire. (Exclamations sur les bancs du groupe REM.) Vous balayez ainsi du revers de la main les arguments des élus et des associations d'usagers et restez sourd à l'inquiétude légitime – voire désormais à la colère – d'une majorité de Français.

Je tiens à le réaffirmer ici : la diminution du nombre de victimes des accidents de la route est un objectif que nous ne pouvons que partager, et nous le partageons.

M. Erwan Balanant. On ne le dirait pas !

M. Vincent Descoeur. Ce n'est bien évidemment pas l'objectif poursuivi que nous remettons en cause, mais les moyens d'y parvenir. En effet, votre décision est injuste et inadaptée. Beaucoup d'élus sur ces bancs, sur tous ces bancs – et ils sont peut-être plus nombreux qu'il n'y paraît –,…

M. Éric Straumann. Notamment sur les bancs du groupe La République en marche !

M. Vincent Descoeur. …partagent ce point de vue. Elle est injuste parce qu'elle n'aura pas les mêmes conséquences pour nos concitoyens qui résident loin d'une autoroute ou dans une zone rurale ou périurbaine – a fortiori en montagne. Cette injustice est d'autant plus mal vécue que votre gouvernement affiche comme priorité la mobilité du quotidien, selon vos propres mots, alors que, dans le même temps, vous vous apprêtez à condamner les automobilistes qui empruntent le réseau secondaire à ne plus pouvoir dépasser les véhicules lourds, puisqu'ils rouleront désormais à la même vitesse.

M. Éric Straumann. Eh oui !

M. Vincent Descoeur. Monsieur le Premier ministre, votre gouvernement, s'il devait ne pas renoncer, doit au moins se résoudre à adapter cette mesure en laissant ceux qui connaissent le mieux le réseau décider des axes sur lesquels la vitesse pourrait être maintenue à 90 kilomètres par heure : les préfets pour les routes nationales et les présidents de conseils départementaux pour les routes départementales. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et UDI-Agir.) Monsieur le Premier ministre, allez-vous entendre l'exaspération des Français et saisir l'ampleur du caractère injuste et inadapté de cette mesure ? Allez-vous accepter de privilégier le dialogue pour parvenir, a minima, à son ajustement ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le député, en 2017, sur les routes françaises de métropole et d'outre-mer, ce sont plus de 3 600 personnes qui ont trouvé la mort, soit du fait d'une erreur ou d'une inattention de leur part,…

M. Éric Straumann. Et en Allemagne, elles sont combien ?

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …soit du fait de l'erreur ou de l'inattention de quelqu'un d'autre. Plus de 75 000 personnes ont été blessées, dont 25 000 garderont des séquelles irréversibles. (Exclamations sur les bancs du groupe LR. - « Silence ! » sur les bancs des groupes REM et MODEM.)

M. Christian Jacob. Pourquoi « Silence ! » ? Vous n'avez pas fait silence pendant que notre collègue posait sa question ! C'est scandaleux !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Samedi 3 mars, ces statistiques ont pris forme réelle : un accident, dans le Finistère, a fait trois morts - trois enfants. Vous avez raison, monsieur le député, c'est scandaleux. Ce qu'ont vécu les témoins de cet accident, les équipes de secours, le gendarme qui est allé annoncer le décès à la famille, c'est effectivement scandaleux. (Protestations sur les bancs du groupe LR.)

Mme Marie-Christine Dalloz. Comment peut-on ainsi instrumentaliser la mort de trois enfants ?

M. Aurélien Pradié. Quel cynisme !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Monsieur Descoeur, comme moi, vous avez été maire – vous dans le Cantal. Comme d'autres maires, vous avez parfois dû faire ce genre d'annonces, et vous savez combien terribles sont ces moments. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Michel Herbillon. Mais votre méthode n'est pas la bonne !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. L'année dernière, douze personnes sont mortes dans le Cantal, département qui compte un peu moins de 150 000 habitants. Vous savez, monsieur le député, vous qui connaissez intimement ce département, que le taux d'accidentalité y est supérieur à la moyenne nationale.

Mon objectif, et je pense que ce peut être un objectif commun, est de ne pas me résigner devant ces chiffres et ces scandales. Notre pays se mobilise à juste titre quand un accident coûte la vie à nos concitoyens ; mon objectif est donc qu'il ne se résigne pas à ce plancher sordide de plus de 3 600 morts annuels. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM. - Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

Il se trouve, mesdames, messieurs les députés, que la vitesse est un facteur aggravant systématiquement la mortalité et la gravité des accidents. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Nous pensons donc que si nous voulons apporter une réponse efficace à ces 3 600 morts par an, à ces 25 000 blessés graves, nous devons agir sur toutes les causes d'accidents. (Mêmes mouvements.)

Mme Émilie Bonnivard. Si on réduit la vitesse à zéro, il n'y aura plus de morts sur les routes !

M. Maxime Minot. Réutilisons la calèche !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Je suis désolé qu'il y ait autant de bruit autour de vous, monsieur le député, parce que vous semblez m'entendre mal, alors que je suis certain que la question vous tient à cœur et que la réponse vous intéresse… (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.)

Le plan que j'ai annoncé comprend dix-huit mesures. Beaucoup d'entre elles sont relatives à l'information, à la formation et à la répression des comportements à risque, comme l'usage de produits stupéfiants ou la conduite sans permis. Parmi elles figure cette mesure relative à la limitation de la vitesse, qui, à l'évidence, n'est pas dirigée contre telle ou telle partie de la population (Vives exclamations sur les bancs du groupe LR), mais est destinée à protéger l'ensemble de la population. Vous le savez bien, monsieur le député. C'est une mesure de sécurité routière, une mesure de sécurité publique. Or on ne peut dire à propos de mesures générales de sécurité : « Nous verrons où elles doivent s'appliquer » !

Lorsque l'usage de la ceinture de sécurité a été rendu obligatoire (Exclamations sur les bancs du groupe LR),…

M. Éric Straumann. Mais cela n'a rien à voir !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …il l'a été sur la totalité du territoire national. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.)

Pour conclure, j'ajouterai trois éléments. Tout d'abord, l'ensemble des coûts liés à la transformation de la signalétique seront pris en charge par l'État.

M. Fabien Di Filippo. C'est toujours le contribuable qui paie !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Ensuite, nous avons dit très clairement que le surplus de recettes éventuellement perçu serait versé intégralement aux établissements sociaux et médico-sociaux qui prennent en charge les victimes des accidents. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.) Enfin, quand je l'ai annoncée, j'ai dit – car j'en avais parfaitement conscience – que c'était une mesure impopulaire,…

M. Laurent Furst. Très juste !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …qui susciterait de l'agacement, des questionnements et, peut-être, de la colère. Comme vous, monsieur le député, je fais de la politique, et j'aime ça. Si j'aime ça, c'est parce que, quand je pense qu'une mesure est dans l'intérêt de mon pays, je la prends et je l'assume, quand bien même elle est impopulaire. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM ; de nombreux députés de ces groupes se lèvent et applaudissent. - Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous appelle à un peu de calme. Je n'ai pas voulu interrompre le Premier ministre, mais rappelez-vous que nous avons eu l'occasion, dans cet hémicycle, de rendre hommage par des minutes de silence à des victimes d'accidents de la route, et pas seulement à des soldats français morts pour la France ou à des personnalités politiques. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Par respect pour toutes les familles des victimes, vous pourriez vous abstenir de vociférer quand ce sujet est évoqué (Mêmes mouvements), quoi que l'on pense des mesures annoncées en matière de sécurité routière, sur lesquelles je ne me prononce pas. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM, MODEM et UDI-Agir. – Vives protestations sur les bancs du groupe LR.)

Plusieurs députés du groupe LR . Démago !

Mme Émilie Bonnivard et Mme Marie-Christine Dalloz . C'est honteux ! Quelle partialité !

M. Laurent Furst. Démission !