Question orale n°6 : Avenir de l'enseignement du Gallo, langue romane de Bretagne

15ème Législature

Question de : M. Thierry Benoit (Bretagne - UDI, Agir et Indépendants)

M. Thierry Benoit attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur l'avenir de l'enseignement du gallo, langue romane de Bretagne. Cette langue est parlée en Haute-Bretagne, partie orientale de la région et a été reconnue à l'unanimité comme étant l'une des deux langues régionales de Bretagne par le conseil régional de Bretagne en 2004. Elle est aujourd'hui parlée par 200 000 personnes qui, à travers son utilisation, participent à faire vivre l'histoire, la culture et le patrimoine de la Bretagne et de la France. Depuis 1983, le gallo bénéficie d'une option au baccalauréat. Il est également enseigné officiellement à l'université, au lycée et au collège, par des enseignants déjà en poste dans différentes spécialités et parlant le gallo. Pourtant, l'enseignement de cette langue vivante est aujourd'hui en péril puisque ces enseignants atteignent l'âge de la retraite et que l'éducation nationale n'a jamais mis en place de formation initiale pour former de nouveaux enseignants capables d'assurer cette option et ces enseignements. Pour faire face à cette situation critique qui aboutira inéluctablement à la disparition du gallo, il lui demande si le Gouvernement compte mettre en place une formation des enseignants de gallo, qui pourrait se traduire par la mise en place d'un module de formation à l'École supérieure du professorat et de l'éducation de Bretagne (sous l'égide de l'éducation nationale) ou par la création d'un CAPES de Gallo.

Réponse en séance, et publiée le 13 décembre 2017

ENSEIGNEMENT DU GALLO
M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit, pour exposer sa question, n°  6, relative à l'enseignement du gallo.

M. Thierry Benoit. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, puisque vous nous faites l'honneur de votre présence, je voudrais commencer, une fois n'est pas coutume, par vous féliciter et vous rendre hommage pour la manière dont vous conduisez votre ministère.

Mme Emmanuelle Ménard. Très bien !

M. Thierry Benoit. Vous exercez vos fonctions avec sérieux, de manière consciencieuse et avec compétence. Moi qui suis parlementaire depuis dix ans, j'apprécie vraiment la tonalité que vous donnez à votre mandat. Vous honorez non seulement la politique, mais aussi les hauts fonctionnaires puisque vous venez de la haute fonction publique. Je tenais à vous le dire.

Monsieur le ministre, je veux vous parler des langues régionales, et plus particulièrement du gallo. En Bretagne, en effet, nous avons deux langues régionales : le breton, parlé dans la partie occidentale de notre région, et le gallo, parlé dans la partie orientale. Depuis 1983, le gallo fait l'objet d'une option au baccalauréat. Il est enseigné au collège, au lycée et à l'université par des locuteurs pratiquants. Or cet enseignement est aujourd'hui fragilisé – je dirais même qu'il est en péril – car nous sommes confrontés à un problème de renouvellement des professeurs capables d'enseigner le gallo. La situation devient critique.

Monsieur le ministre, au nom des 200 000 locuteurs du gallo, qui transmettent le patrimoine historique, culturel et oral de la Bretagne, et au nom des amoureux des langues régionales, je demande au Gouvernement de mettre en place une formation des professeurs de gallo, qui pourrait se traduire par la création de modules de formation à l'école supérieure du professorat et de l'éducation de Bretagne, sous l'égide de l'éducation nationale, ou par la création d'un certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré – CAPES – de gallo.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le député, je vous remercie tout d'abord pour votre propos liminaire, qui me touche.

Je vous remercie aussi pour votre question, qui me donne l'occasion de dire toute l'importance que j'attache aux langues régionales. J'ai été amené, dans cet hémicycle, à souligner l'unité de la langue française lorsque j'ai eu à parler du respect de la grammaire, en particulier à l'école. Cela n'est en rien contradictoire avec l'importance des langues régionales – bien au contraire ! Dans la vie linguistique de notre pays, il y a d'un côté la langue française, et de l'autre les langues régionales.

Les huit langues régionales métropolitaines et les cinq langues ultramarines sont une richesse pour la France et font partie de notre patrimoine. À ce titre, elles méritent toute l'attention du ministère de l'éducation nationale. Nous inaugurons cette année la première session de l'agrégation externe de langues de France. Un poste est notamment ouvert en breton, ce dont je me félicite.

Comme vous le savez, l'enseignement du gallo est soutenu conjointement par l'académie de Rennes et la région Bretagne. Un enseignement facultatif, de la sixième à la terminale, est organisé dans cinq collèges et six lycées publics de trois départements. Il concerne environ 500 élèves. Le gallo peut être choisi comme option facultative au baccalauréat ; c'est ce qu'ont fait 229 élèves en 2016 et 239 élèves en 2017.

Le 14 décembre 2015, le recteur a signé pour l'État, au côté du préfet, une « convention spécifique pour la transmission des langues de Bretagne et le développement de leur usage dans la vie quotidienne » avec le président du conseil régional de Bretagne et les présidents des universités de Bretagne occidentale et de Rennes 2. Dans ce cadre, l'État s'est engagé à pourvoir les places vacantes dans les filières existantes, à offrir une sensibilisation à la langue et à la culture régionales dans le premier degré et à développer l'offre de formation dans le second degré. L'académie s'est aussi engagée à diffuser des ressources pédagogiques d'apprentissage du gallo et de découverte de la culture gallèse, à faciliter l'intervention dans les écoles d'animateurs gallésants issus du monde associatif, ainsi qu'à favoriser la professionnalisation d'étudiants gallésants afin d'étoffer ce vivier d'intervenants.

En outre, en formation initiale, le gallo est enseigné à l'université de Rennes 2, soit en option facultative de continuation, soit sous la forme d'une unité d'enseignement de langue.

Enfin, dans le cadre de la feuille de route « Langues et cultures régionales 2017-2021 » adoptée par l'académie de Rennes, les écoles et établissements scolaires de l'est de l'académie sont incités à développer des volets culturels, des modules de sport, des jeux et des projets autour du patrimoine prenant appui sur la langue et la culture gallèses. Cette initiative se concrétise, pour l'année scolaire 2017-2018, par une formation proposée aux professeurs des écoles d'Ille-et-Vilaine : ont ainsi été programmées deux sessions de deux jours, rassemblant dix-neuf stagiaires par session, sur la langue et la culture gallèses et la mise en œuvre de projets pédagogiques s'appuyant sur le gallo et ses composantes culturelles.

Vous le voyez, monsieur le député, nous prenons ce sujet très au sérieux. Soyez assuré que l'académie de Rennes va poursuivre ses efforts dans les prochaines années, en lien avec le conseil régional, pour assurer la transmission du gallo dans les meilleures conditions possibles.

M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Monsieur le ministre, je vous remercie naturellement pour votre réponse. Je compte justement sur vous et sur votre compétence ! Je sais que le ministre de l'éducation nationale ne peut pas se préoccuper de tout, mais si l'État peut être moteur sur ce sujet, notamment dans les régions, son aide sera précieuse. Il s'agit de notre patrimoine breton !

Je suis naturellement républicain et démocrate. En tant que député, je représente tous mes concitoyens. Cela ne m'empêche pas d'être attaché à nos racines, à notre histoire et à notre culture, tout en étant ouvert sur la question européenne. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai déposé, avec d'autres parlementaires, une proposition de loi constitutionnelle tendant à ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires – un sujet dont nous aurons à rediscuter.

J'aimerais vraiment que nous puissions, peut-être sous votre égide, monsieur le ministre, réunir les parties prenantes pour discuter des initiatives susceptibles d'être mises en œuvre au niveau régional afin de renforcer la formation des professeurs de gallo en Bretagne. Je vous remercie encore pour votre réponse.

Données clés

Auteur : M. Thierry Benoit (Bretagne - UDI, Agir et Indépendants)

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Éducation nationale

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 décembre 2017

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