Question orale n° 709 :
Régime d'affiliation sécurité sociale des ayants-droits de personnes détenues

15e Législature

Question de : M. Sacha Houlié
Vienne (2e circonscription) - La République en Marche

M. Sacha Houlié attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des ayants-droits de personnes détenues, radiées des caisses de sécurité sociale. Les articles L. 381-30 à L. 381-30-6 du code de la sécurité sociale régissent la protection sociale des personnes écrouées et organisent leur affiliation aux assurances maladie et maternité du régime général, dont l'application est développée par les articles R. 381-97 à R. 381-100 du même code. Toute personne écrouée, et ce qu'elle soit en situation régulière ou non, est affiliée de manière automatique au régime général. La gestion des droits dépend du Centre national de la protection sociale des personnes écrouées (CNPE). Nonobstant un régime de protection social détaillé concernant la prise en charge d'enfants nés d'une mère incarcérée, et ce, que l'enfant demeure à la charge de la mère pendant ses dix-huit premiers mois ou non, il reste des incertitudes juridiques concernant les enfants de parents incarcérés nés avant la mise sous écrou et ne pouvant bénéficier d'une affiliation par le second parent. D'autre part, la couverture médicale universelle complémentaire (CMU-C) peut être octroyée, si les conditions sont remplies, à une personne incarcérée, sur demande expresse, ainsi qu'à des membres du foyer de la personne concernée. Néanmoins, cette disposition ne résout pas la question de l'affiliation des ayants droit à un régime de sécurité sociale dans cette situation spécifique. M. le député a été alerté de la situation d'enfants mineurs radiés des caisses d'assurance maladie dès l'incarcération de la personne leur conditionnant l'ouverture de droits. S'étonnant de cet état de fait, qui ne répond ni à des exigences de protection de l'enfance, ni au principe d'égalité des droits, il lui demande de bien vouloir éclaircir le régime d'affiliation des enfants mineurs de personnes incarcérées.

Réponse en séance, et publiée le 22 mai 2019

AFFILIATION À LA SÉCURITÉ SOCIALE DES AYANTS DROIT DES PERSONNES DÉTENUES
M. le président. La parole est à M. Sacha Houlié, pour exposer sa question, n°  709, relative à l'affiliation à la sécurité sociale des ayants droit des personnes détenues.

M. Sacha Houlié. Madame la garde des sceaux, ma question porte sur l'accès aux soins mais aussi sur l'accès au droit des ayants droit des personnes détenues. Celles-ci sont automatiquement affiliées à la sécurité sociale, par l'intermédiaire du centre national de gestion de la protection sociale des personnes écrouées. Durant leur détention, elles sont donc radiées du régime général. Les articles L. 380-30 et suivants du code de la sécurité sociale régissent leur protection sociale mais omettent la situation de leurs ayants droit, notamment de leurs enfants.

Les enfants des personnes écroués, qui ne vivent pas avec les détenus – ce n'est heureusement pas prévu par la loi après leurs 18 mois –, sont radiés de la sécurité sociale lorsque leur second parent ne les prend pas en charge. On constate ainsi, dans ma circonscription, où se trouve le centre de détention de Poitiers-Vivonne, qu'ils ne peuvent pas être remboursés lorsqu'ils se rendent dans des pharmacies, ce qui les exclut, de fait, du régime de protection sociale prévu en France. Le régime de la CMU-C – couverture maladie universelle complémentaire – peut être octroyé à une personne incarcérée si les conditions sont remplies, sur demande expresse, mais cette disposition ne résout pas la question de l'affiliation des ayants droit, qui ne leur sont pas rattachés.

Aussi serait-il pertinent de prévoir une affiliation automatique des enfants mineurs d'une personne écrouée – souvent la maman, car c'est elle qui en a la charge. Dans ce cas, devraient-ils être affiliés au régime général ou à celui des personnes écrouées ?

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur Houlié, vous l'avez rappelé, depuis 2017, les droits à l'assurance maladie des personnes écrouées sont gérés par deux caisses primaires d'assurance maladie, celle du Lot et celle de l'Oise, qui constituent le centre national de gestion de la protection sociale des personnes écrouées, le CNPE. Cela a permis d'harmoniser les procédures et de dématérialiser les échanges d'information, facilitant ainsi le processus d'affiliation : les établissements disposent désormais d'interlocuteurs bien identifiés, des personnels dédiés et formés en caisse primaire d'assurance maladie prenant en charge les personnes écrouées.

Ces dernières sont toutes affiliées au régime général de l'assurance maladie : elles bénéficient de la prise en charge des frais de santé et ont accès à la CMU-C, la couverture maladie universelle complémentaire, pour le financement du reste à charge des dépenses dentaires et optiques.

Vous soulevez la question des ayants droit des personnes détenues. Depuis la mise en place de la protection universelle maladie, le 1er janvier 2016, seuls les enfants mineurs sont considérés comme ayants droit, car les majeurs sont affiliés à titre individuel à condition de résider de façon stable et régulière sur le territoire français. Lorsqu'un enfant mineur est rattaché à son parent, il est affilié, au moment de l'incarcération de ce dernier, à la caisse de son lieu de résidence, afin d'assurer une gestion de proximité. Concrètement, c'est le CNPE qui assure le lien avec la caisse du lieu où réside l'enfant pour engager ce rattachement local. Le CNPE dispose d'un délai de cinq jours pour affilier la personne écrouée au régime général ; il transmet également à la CPAM – la caisse primaire d'assurance maladie – du lieu de résidence des enfants un dossier pour leur prise en compte. Seuls les mineurs de moins de 18 mois restant avec leur mère incarcérée sont directement gérés par le CNPE en raison de leur présence au sein d'un établissement pénitentiaire.

Par conséquent, tel qu'il est organisé, le système ne devrait à aucun moment laisser l'enfant mineur d'une personne écrouée sans affiliation. À la suite du rattachement d'une personne écrouée au régime général, avec gestion par le CNPE, si une difficulté apparaît pour l'un de ses enfants mineurs, c'est auprès de la CPAM du lieu de résidence qu'il faut former un recours.

Compte tenu des difficultés dont vous faites état, je vais me rapprocher de ma collègue Agnès Buzyn dans le but de compléter le guide méthodologique, de sorte que le délai de cinq jours imparti au CNPE pour l'affiliation de la personne écrouée soit également le délai dans lequel la CPAM du lieu de résidence de l'enfant mineur doit procéder à l'affiliation de ce dernier. C'est ainsi que nous pourrons surmonter les difficultés que vous avez décrites.

M. le président. La parole est à M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. Je vous remercie pour votre réponse et pour les démarches que vous allez entreprendre afin de préciser la façon dont les CPAM doivent procéder, dans un délai de cinq jours, à l'affiliation des enfants âgés de 18 mois à 18 ans et non rattachés au CNPE. Pour ma part, je me rapprocherai de la CPAM de Poitiers, à laquelle il appartient d'affilier les enfants dont je vous ai parlé dans le délai que vous avez indiqué.

Données clés

Auteur : M. Sacha Houlié

Type de question : Question orale

Rubrique : Sécurité sociale

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 mai 2019

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