Reprise du CITS : les ESPICS négativement impactés
Question de :
Mme Isabelle Florennes
Hauts-de-Seine (4e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés
Mme Isabelle Florennes appelle l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les effets négatifs de la reprise du CITS sur les EPICS. La problématique dont elle s'apprête à lui livrer le détail n'est pas nouvelle. Elle avait, en effet, déjà alerté Mme la ministre une première fois, par un courrier en date du 7 décembre 2017, des conséquences particulièrement néfastes de la reprise des bénéfices du CITS pour les établissements d'hospitalisation associatifs et mutualistes. Ce sujet, survenu lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, avait alors suscité un débat au terme duquel le Gouvernement s'était engagé à ne pas procéder à cette reprise sur les mécanismes de financement. Pourtant, les ESPICS qui, elle le rappelle, répondent aux mêmes obligations de service public que les établissements publics, sont, actuellement, les seuls établissements hospitaliers dont les tarifs vont diminuer de 0,1 %. Cette baisse intervient alors même que leurs homologues vont bénéficier d'une hausse de 0,2 % de leurs tarifs. S'appuyant sur une nécessité réaffirmée de reprise du CITS, cette diminution est inexplicable. D'autant que le CITS a, en pratique, remplacé tous les autres mécanismes déjà existants de compensation des différentiels de charge, compensation nécessaire puisque les établissements privés assument, à salaires égaux, des charges salariales nettement plus élevées que les établissements publics. En d'autres termes, la solution qui avait été trouvée pour compenser le différentiel de charges supporté par les ESPICS avec la création du CITS s'est, petit à petit, trouvée diluée. Tant et si bien qu'il n'y a plus, aujourd'hui, de mécanisme permettant la compensation de ce différentiel de charges. Or, dès lors que les recettes du public et du privé ne sont plus les mêmes, l'asymétrie devient iniquité. Les ESPICS subissent les effets conjugués de plusieurs années de hausse de leurs tarifs, d'une baisse de leurs recettes de 0,8 % et ont toujours 6 % de charges salariales supplémentaires. La reprise du CITS fragilise l'équilibre financier des ESPICS et pose, très clairement, la question de la compensation de l'inégalité existante entre les établissements publics et les structures privées non lucratives. Le Président de la République avait, durant sa campagne, loué les vertus et l'efficacité du modèle ESPIC. Ainsi, elle souhaite connaître les mesures que le Gouvernement envisage pour soutenir ces établissements et leur permettre de remplir leurs missions dans des conditions optimales.
Réponse en séance, et publiée le 22 mai 2019
FINANCEMENT DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ PRIVÉS D'INTÉRÊT COLLECTIF
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Florennes, pour exposer sa question, n° 719, relative au financement des établissements de santé privés d'intérêt collectif.
Mme Isabelle Florennes. Ma question s'adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Le sujet dont je vais vous parler n’est pas nouveau. Je l'avais en effet déjà alertée une première fois, par un courrier daté du 7 décembre 2017, sur les conséquences particulièrement néfastes de la reprise des bénéfices du CITS – crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires – pour les établissements d'hospitalisation associatifs et mutualistes. Cette question, survenue lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, avait alors suscité un débat au terme duquel le Gouvernement s'était engagé à ne pas procéder à cette reprise sur les mécanismes de financement.
Pourtant, les ESPIC, qui, je le rappelle, répondent aux mêmes obligations de service public que les structures publiques, sont actuellement les seuls établissements hospitaliers dont les tarifs vont diminuer de 0,1 %. Cette baisse intervient alors même que leurs homologues bénéficieront d'une hausse de 0,2 % de leurs tarifs. S'appuyant sur la nécessité réaffirmée de reprise du CITS, cette diminution est inexplicable, d'autant qu'en pratique, le CITS a remplacé tous les autres mécanismes déjà existants de compensation des différentiels de charge – compensation nécessaire puisque les établissements privés assument, à salaires égaux, des charges salariales nettement plus élevées que les établissements publics.
En d'autres termes, la solution qui avait été trouvée pour compenser le différentiel de charges supporté par les ESPIC avec la création du CITS s'est, petit à petit, trouvée diluée, tant et si bien qu'il n'existe plus de mécanisme compensant le différentiel de charges. Or, dès lors que les recettes du public et du privé ne sont plus les mêmes, l'asymétrie devient iniquité. Les ESPIC subissent les effets conjugués de plusieurs années de hausse de leurs tarifs et d'une baisse de leurs recettes de 0,8 %, alors qu’ils supportent toujours 6 % de charges salariales supplémentaires.
Madame la secrétaire d’État, la reprise du CITS fragilise l'équilibre financier des ESPIC et pose très clairement la question de la compensation de l'inégalité existante entre les établissements publics et les structures privées non lucratives. Le Président de la République avait, durant sa campagne, loué les vertus et l'efficacité du modèle ESPIC. Alors quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour soutenir ces établissements et leur permettre de remplir leurs missions dans des conditions optimales ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame Florennes, je partage votre attachement aux établissements de santé privés à but non lucratif. Toutefois, aucune étude globale n'a pu démontrer à ce jour l'existence d'un différentiel structurel de charges en défaveur des établissements de ce secteur par rapport aux structures publiques. À rebours de votre crainte, je tiens à rappeler que la situation financière globale des établissements publics de santé est bien plus dégradée que celle des établissements privés non lucratifs relevant de la même échelle tarifaire.
Le choix de la reprise partielle du crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires depuis 2018 est tout simplement une mesure d'équité. La reprise des avantages financiers induits par la mise en place du CITS pour les établissements non lucratifs s'impose juridiquement dans la mesure où les effets du pacte de responsabilité et du CICE – le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi – ont d'ores et déjà fait l'objet d'une reprise intégrale pour les établissements privés à but lucratif qui en bénéficiaient. Il ne serait donc pas juste de conserver pour les uns ce que l'on a intégralement repris aux autres.
Néanmoins, comme pour les établissements à but lucratif, nous avons tenu à opérer la reprise de manière très progressive : en 2017, les établissements non lucratifs ont pu bénéficier de l'intégralité des effets du CITS ; en 2018, seuls 20 % de ce bénéfice leur a été repris ; en 2019, la reprise n'atteint que 50 % de leur gain.
S’agissant de 2019, il faut également souligner que, grâce au renforcement des allégements fiscaux et sociaux, les établissements privés à but non lucratif verront progresser le gain qu'ils tirent des différents allégements, y compris en intégrant la reprise supplémentaire des bénéfices du CITS. En effet, depuis le 1er janvier, le CITS a été converti en une réduction des cotisations employeur qui leur est plus favorable, laquelle sera encore amplifiée le 1er octobre prochain.
Ainsi, loin de fragiliser ce secteur auquel les Français sont si attachés, la politique générale conduite par le Gouvernement contribue à conférer de nouvelles marges de manœuvre financières aux établissements de santé privés à but non lucratif.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Florennes.
Mme Isabelle Florennes. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie pour cette réponse qui toutefois ne me convainc pas. J'ai eu l'occasion de discuter régulièrement, en particulier avec le directeur d'un ESPIC situé dans ma circonscription – l'hôpital Foch de Suresnes – de la bonne situation financière effective des ESPIC, que le Président de la République avait soulignée, mais ils se trouvent pénalisés, de fait, par cette mesure. Le directeur de cet établissement m'a également dit ne pas être convaincu de la nécessité juridique de la convergence s'agissant de la reprise des avantages financiers induits par le passage du CICE au CITS pour les deux catégories d'établissements, qui n'a pas été prouvée. La discussion continue sur le sujet, notamment au Sénat. Je continuerai de soutenir les ESPIC car je ne saurais être complètement satisfaite par votre réponse.
Auteur : Mme Isabelle Florennes
Type de question : Question orale
Rubrique : Établissements de santé
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 mai 2019