15ème législature

Question N° 723
de M. Louis Aliot (Non inscrit - Pyrénées-Orientales )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > défense

Titre > intervention de l'armée turque en Syrie

Question publiée au JO le : 22/03/2018
Réponse publiée au JO le : 22/03/2018 page : 1899

Texte de la question

Texte de la réponse

INTERVENTION DE L’ARMÉE TURQUE EN SYRIE


M. le président. La parole est à M. Louis Aliot, au titre des députés non inscrits.

M. Louis Aliot. Monsieur le ministre des affaires étrangères, depuis dimanche, le drapeau turc flotte sur Afrin. Le peuple kurde, avec lequel nous avons combattu l'État islamique, est meurtri. Des milliers de civils sont morts.

Avec cette attaque en Syrie, le président Erdogan nargue le monde et bafoue le droit international. La France, si encline à s'offusquer en toutes circonstances, se fait bien silencieuse face à ce nettoyage ethnique.

Quels sentiments peuvent éprouver ces combattants de la liberté à l'encontre de la France qui, après les avoir utilisés dans la lutte contre le fondamentalisme islamiste, les abandonne à leur triste sort ?

Car nous sommes totalement impliqués dans ce drame. Combien sont morts pour nous protéger ? Qui a armé les Kurdes ? Qui s'est servi d'eux ? Et qui les livre aujourd'hui à leur pire ennemi, une Turquie autoritaire qui s'est construite sur le génocide des Arméniens ainsi que sur les cadavres des Assyro-Chaldéens et des Grecs, et qui, après avoir éliminé toute présence chrétienne ou presque sur son territoire, s'en est prise aux Kurdes, aux Alévis et aux forces démocratiques, sans même parler de l'occupation de Chypre ? Pas facile en effet de gérer, au sein de l'OTAN et de l’Union européenne, un allié aussi encombrant !

Monsieur le ministre, le silence des institutions européennes est pesant, ce qui n'est pas étonnant quand on sait que l’Union européenne verse des milliards d'euros à la Turquie en raison de son chantage aux réfugiés et qu'elle a engagé des négociations d'adhésion de la Turquie contre l'avis des peuples !

Un député du groupe LR . Il a raison !

M. Louis Aliot. La question turque est un véritable révélateur des ambitions hégémoniques d'Ankara comme des faiblesses et des lâchetés de Bruxelles, de Berlin et de Paris. Monsieur le ministre, la France va-t-elle enfin condamner clairement la Turquie pour cette agression ? Allez-vous enfin demander à nos partenaires européens de mettre un terme au processus d'adhésion de la Turquie à l’Union européenne ? (Applaudissements parmi les députés non inscrits.)

M. Marc Le Fur. Bravo !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le député, la chute d'Afrin, après deux mois d'offensive turque, marque une nouvelle étape dans l'escalade dramatique qui a lieu en Syrie.

M. Jean-Paul Lecoq. Sans aucune réaction !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . C'est un nouveau coup porté à la situation humanitaire déjà catastrophique prévalant dans ce pays. Des dizaines de milliers de personnes ont été déplacées et ceux qui restent se trouvent dans une situation critique, privés d'eau, d'électricité et de secours.

C'est aussi – on ne le dit pas assez – un nouveau coup porté à la campagne contre Daech, à laquelle les forces démocratiques syriennes ont apporté une contribution décisive – notamment à Kobané et à Raqqa –, ce dont la France leur est reconnaissante. Leurs capacités doivent être préservées. Daech, je le rappelle, n'est pas vaincu en Syrie.

Enfin, c'est un nouveau coup porté à la trêve humanitaire décidée par le Conseil de sécurité de l'ONU, qui comme telle s'inscrit dans le cadre du droit international et s'applique à tous, y compris à la Turquie et aux forces de Bachar el-Assad. Il importe de la faire respecter par tous les moyens dont nous disposons.

La position de la France n'a pas varié. Les préoccupations de frontières de la Turquie ne doivent pas mener à l'implantation militaire que nous constatons. C'est ajouter de la guerre à la guerre.

Sur le fond, monsieur le député, je suis convaincu qu'il n'y aura pas de solution militaire durable en Syrie et qu'il faudra bien aboutir à une solution politique, donc relancer le processus de Genève. Dans ce cadre, il faudra faire en sorte que la solution politique retenue soit inclusive et que les Kurdes y trouvent leur place. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM et sur quelques bancs du groupe LR.)