Question de : Mme Annie Genevard
Doubs (5e circonscription) - Les Républicains

Mme Annie Genevard attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la situation de la profession de masseur-kinésithérapeute. L'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes rassemble aujourd'hui 88 000 professionnels de santé exerçant dans des établissements de soins, en cabinet, en entreprise ou sur les terrains de sport. Ces professionnels de santé sont de plus en plus sollicités, notamment avec les actions de prévention, la lutte contre le tabagisme et le dépistage des pathologies respiratoires. La formation initiale a déjà été réformée et la profession attend désormais de nouvelles mesures et notamment la création d'un master en kinésithérapie en conformité avec le nombre de points obtenus selon le système européen ECTS, soit 300 crédits. Cette mesure permettrait l'accès au doctorat. L'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes souhaite en outre la création d'une filière universitaire avec un corps d'enseignants universitaire : enseignants-chercheurs hospitalo-universitaires. C'est la condition indispensable pour développer la recherche et l'innovation, domaines où la France accuse un important retard. Par ailleurs, la profession demande également un droit de prescription élargi et que les patients puissent avoir un accès direct au masseur-kinésithérapeute dans le cadre des pathologies soumises à des référentiels existants (les coûts étant de fait contrôlés) et pour toutes les affections de longue durée qui nécessitent par nature de la kinésithérapie : AVC, Parkinson, BPCO, polyarthrite, etc. Ces mesures permettraient de réaliser de substantielles économies et de libérer du temps de consultation pour les médecins généralistes. Enfin, l'ensemble de la profession s'inquiète des effets du décret n° 2017-1570 du 2 novembre 2017 relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé qui fait suite à l'ordonnance n° 2017-50 publiée le 20 janvier 2017. L'article 4 de celle-ci donne la possibilité à un professionnel de santé étranger de bénéficier d'un accès partiel à une profession réglementée qu'il souhaiterait pratiquer en France, même s'il ne dispose pas de la totalité des qualifications requises pour l'exercer pleinement. Ces masseurs-kinésithérapeutes ayant un diplôme européen ne détenant pas le niveau complet de formation, pourraient tout de même être autorisés à réaliser une partie des actes réservés à la profession. Cette situation rend l'accès à ce métier très inégalitaire puisque les étudiants français doivent notamment passer par l'année de préparation en médecine, avant d'entrer dans une école. Pour une parfaite information des patients, il pourrait être nécessaire de rendre obligatoire, sur la plaque des médecins, la mention du pays où ils ont obtenu leur qualification. Aussi, elle lui demande de lui préciser les mesures qu'elle entend mettre en œuvre afin de rentre plus moderne et plus autonome cette profession indispensable et de garantir la santé publique et la sécurité des patients.

Réponse publiée le 9 avril 2019

La formation initiale qui conduit au diplôme d'Etat de masseur-kinésithérapeute a fait l'objet d'une démarche de réingénierie pilotée par les ministères chargés de la santé et de l'enseignement supérieur et de la recherche, dans le cadre de l'inscription de cette formation dans le processus Licence-Master-Doctorat suite aux accords de Bologne. Depuis la rentrée 2015, la formation initiale des masseurs-kinésithérapeutes se déploie sur quatre années de formation spécifique en institut de formation, permettant à chaque diplômé d'Etat de bénéficier de 240 crédits ECTS au titre de ces quatre années de formation. Les modalités d'admission en formation ont également été modifiées en juin 2015 en concertation avec la profession : l'accès aux études se fait désormais sur la base d'une première année universitaire validée (PACES, STAPS ou première année de licence dans le domaine sciences, technologies, santé). Tout étudiant peut capitaliser les 60 crédits ECTS correspondant à cette première année préalable, dans le cadre d'un projet de poursuite d'études. Les réflexions se poursuivent aujourd'hui afin d'améliorer l'intégration des formations paramédicales dans l'université. Une mission de concertation, confiée à M. Stéphane Le Bouler, a pour objectif de préciser les étapes de cette « universitarisation » et ainsi développer l'activité de recherche notamment en sciences de la réadaptation. Attentif aux souhaits exprimés par les professionnels et les étudiants, ainsi qu'aux exigences de qualité et de sécurité des soins, le Gouvernement souhaite que ces travaux puissent aboutir à une formation répondant aux attentes de l'ensemble des acteurs concernés et aux besoins de santé de la population. Par ailleurs, s'agissant de l'accès direct du patient au masseur-kinésithérapeute il n'a de sens, pour le système de santé, que lorsqu'il améliore l'accès aux soins. Or, la répartition des responsabilités et la complémentarité des interventions entre le médecin et le masseur-kinésithérapeute doit permettre une prise en charge fluide des patients, sans qu'il soit nécessaire d'inscrire dans le code de la santé publique une possibilité pour les masseurs-kinésithérapeutes de se soustraire en toute occasion à toute prescription médicale. Il est, de plus,  déjà possible pour un masseur-kinésithérapeute d'accomplir en cas d'urgence, et en l'absence de prescription médicale, les premiers actes de soins nécessaires en masso-kinésithérapie. Dans le cadre rénové prévu par un amendement au projet de loi relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé, les protocoles de coopération pourront permettre aux professionnels de santé de se saisir de l'opportunité de mettre en place des nouvelles modalités de coopération innovantes. Cette démarche respectera les exigences essentielles de qualité et de sécurité des protocoles de coopération, définies après avis de la Haute autorité de santé. Les masseurs-kinésithérapeutes seront concernés par ces perspectives. Enfin, une particulière vigilance entoure les conditions de déploiement de l'accès partiel au sein de notre système de santé, comme le Gouvernement l'a affirmé lors des débats parlementaires intervenus lors de la discussion de la loi de ratification de l'ordonnance 2017-50 du 19 janvier 2017. La directive européenne 2013/55 UE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles a prévu 3 conditions génériques et précises qui doivent nécessairement être remplies et qui sont scrupuleusement contrôlées : 1° le professionnel doit être pleinement qualifié pour exercer dans son Etat d'origine l'activité pour laquelle il sollicite un accès partiel, 2° les différences entre l'activité professionnelle exercée et la profession qui pourrait correspondre en France sont si importantes que l'application de mesures de compensation de formation reviendrait à faire suivre au demandeur un cycle complet d'enseignement, 3° l'activité sollicitée en accès partiel peut objectivement être séparée d'autres activités relevant de la profession "correspondante" en France. Si l'une de ces trois conditions n'est pas remplie, l'autorisation d'exercice partiel ne pourra être délivrée. Cette étape constitue donc une première garantie dans l'examen des demandes. Le processus d'examen des dossiers des demandeurs fait appel à l'expression d'un avis par chaque commission compétente ainsi que par l'ordre compétent pour les professions à ordre. Ce second avis, non prévu par la directive européenne, a été rajouté par le Gouvernement afin de renforcer le processus d'analyse des dossiers. Le décret 2017-1520 du 2 novembre 2017 est venu préciser les conditions et modalités de mise en œuvre de la procédure d'instruction, afin d'éclairer et guider les parties prenantes dans la manière dont les dossiers doivent être examinés au cas par cas : le périmètre de l'exercice partiel sollicité, les titres de formation détenus, l'expérience professionnelle acquise et la formation suivie tout au long de la vie par le demandeur. Dans le souci d'éviter des interprétations divergentes, un guichet unique a été mis en place pour l'examen des demandes d'accès partiel. Enfin, l'arrêté du 8 décembre 2017 a défini de manière précise le cadre de l'avis rendu, de façon à faire apparaître la nature des actes confiés et le titre d'exercice. Une évaluation et un suivi sont par ailleurs prévus afin de vérifier les conditions d'exercice de l'accès partiel.

Données clés

Auteur : Mme Annie Genevard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Dates :
Question publiée le 10 avril 2018
Réponse publiée le 9 avril 2019

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