15ème législature

Question N° 748
de Mme Ramlati Ali (La République en Marche - Mayotte )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > outre-mer

Titre > situation à Mayotte

Question publiée au JO le : 29/03/2018
Réponse publiée au JO le : 29/03/2018 page : 2219

Texte de la question

Texte de la réponse

SITUATION À MAYOTTE


M. le président. Avant de lui passer la parole, je salue aujourd'hui le retour sur nos bancs de Mme Ramlati Ali. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) Vous avez la parole, madame la députée, pour le groupe La République en marche

Mme Ramlati Ali. Monsieur le Premier ministre, depuis six semaines, le département de Mayotte est secoué par une grève générale qui perdure et qui exprime l'exaspération des Mahorais face à une insécurité de plus en plus grave, qui terrorise nos familles et nos enfants.

Cette insécurité, mes chers collègues, trouve ses racines au sein d'une société confrontée à de grandes difficultés. L'immigration clandestine a des conséquences qui nous dépassent dans la mise en œuvre de n'importe quelle politique publique, notamment en termes de santé ou d'éducation.

Malgré les annonces importantes et concrètes de la ministre des outre-mer sur le renforcement des dispositifs de sécurité et l'amplification de la lutte contre l'immigration irrégulière, notre diplomatie a été mise à rude épreuve avec les positions irresponsables et provocatrices des dirigeants comoriens qui ont refusé d'accueillir leurs ressortissants reconduits à la frontière depuis Mayotte.

Cette situation n'est plus tenable. Les Mahorais sont épuisés. Ils savent que tant que cet imbroglio politique ne sera pas réglé, tous nos efforts en termes de soutien au développement, à l'essor et à l'épanouissement du département de Mayotte resteront vains.

M. Julien Dive. Eh oui !

Mme Ramlati Ali. Monsieur le Premier ministre, alors que les entreprises commencent à mettre la clé sous la porte, que les touristes redoutent de se rendre à Mayotte et que les médecins et autres compatriotes fonctionnaires expatriés songent à quitter le territoire, deux questions me viennent à l'esprit.

Quelles sont les actions entreprises auprès du gouvernement de l'Union des Comores afin de lever les restrictions imposées à la France dans l'éloignement des ressortissants de ce pays qui sont en situation irrégulière à Mayotte ? Pouvez-vous détailler auprès de la représentation nationale la lettre de mission que vous allez confier au délégué du Gouvernement nommé ce jour et la méthode de concertation retenue pour la construction du projet d'avenir de Mayotte ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Madame la députée, permettez-moi de vous féliciter chaleureusement, au nom du Gouvernement, de votre réélection. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. Aurélien Pradié. Et la mise en examen ?

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Chacun sait, madame la députée, les conditions de grande tension qui ont prévalu pendant la période électorale et lors du scrutin. Permettez-moi, mes chers collègues… (Rires et applaudissements.)

M. Patrick Hetzel. Il n'était pourtant pas très assidu…

Plusieurs députés du groupe LR . Il y a peut-être un remaniement ?

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Pardon ! Permettez-moi, mesdames et messieurs les députés, de remercier les élus locaux du département de Mayotte qui, en dépit des difficultés, ont remarquablement rempli leur rôle. Ils ont organisé le scrutin dans de bonnes conditions et je tiens ici à les en remercier.

Mayotte connaît depuis plusieurs semaines un mouvement social majeur, une mobilisation de citoyens qui réclament plus de sécurité, plus de développement et plus d'État. Avec Mme la ministre des outre-mer et l'ensemble du Gouvernement, nous sommes évidemment sensibles et attentifs au message d'impatience, de colère, d'inquiétude et de peur parfois qui nous est adressé.

Pour y répondre, des mesures d'urgence ont été décidées, notamment l'envoi dans le département de forces de sécurité supplémentaires destinées, dans toute la mesure du possible, à ramener l'ordre et à envoyer le signal que nous ne voulons pas laisser s'installer, voire dégénérer cette situation. Les forces de sécurité ont été envoyées et elles ont pu par leur action confirmer ce message de la façon la plus concrète possible. Je les en félicite.

Il convient d'ajouter à ces mesures la sécurisation des établissements et des transports scolaires, la lutte contre l'insécurité et la lutte contre l'immigration illégale, dont chacun sait ici, madame la députée, combien elle constitue un fléau pour Mayotte. En effet, soixante-dix kilomètres séparent les îles comoriennes de Mayotte et le différentiel de niveau de vie est tel entre le département et l'Union des Comores que la pression à l'immigration illégale est considérable.

Nous avons pris la décision ce matin, en conseil des ministres, d'envoyer dans le département un nouveau préfet qui, en tant que délégué du Gouvernement, devra mettre en œuvre la feuille de route que je lui ai donnée et qui a été annoncée par Mme la ministre des outre-mer, dont je tiens à saluer l'action. J'ai moi-même adressé à l'ensemble des élus mahorais un courrier leur indiquant la méthode, que je leur propose, pour travailler sur les dossiers avec non seulement le préfet, mais toute la nouvelle équipe que nous avons désignée. Les premiers retours me laissent à penser que les élus ont accepté cette méthode, même si elle est remise en cause par plusieurs acteurs du mouvement social.

Au cours de la troisième semaine du mois d'avril, je recevrai les élus politiques mahorais pour nourrir ce dialogue et vérifier que nous sommes sur le bon chemin, ce qui nous permettra, madame la députée, de faire que les engagements pris par l'État soient tenus dans la durée et que l'avenir de ce département se construise dans de bonnes conditions.

Je dirai un dernier mot, madame la députée, qui n'est pas facile à entendre mais qui est indispensable. Nous ne réglerons pas durablement la situation de Mayotte sans travailler, sans discuter et sans convenir de plusieurs points avec l'Union des Comores. La discussion doit être ferme et confiante avec les Comores si nous voulons établir une solution durable à Mayotte. Je sais que ces propos ne sont pas toujours acceptés à Mayotte : je les pense toutefois profondément. Il n'y a de solution que dans une très grande résolution de l'État, dans la méthode que j'ai proposée et dans une relation ferme et confiante avec les Comores. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM et UAI.)