Pompiers - Zones de non droit
Question de :
M. Jean-Claude Bouchet
Vaucluse (2e circonscription) - Les Républicains
M. Jean-Claude Bouchet interroge M. le ministre de l'intérieur sur le manque de sanctions sévères et l'insuffisance de mesures adaptées aux zones de non droit où les pompiers, tels que ceux de Cavaillon, commune de sa circonscription, et tous les autres services de l'État sont pris à partie dans des embuscades, pris pour cible au péril de leur vie, subissant projectiles, cocktails Molotov, pierres et boules de pétanque faisant exploser le pare-brise de leur véhicule ! Les pompiers du Vaucluse vont prochainement expérimenter le port de caméras-piétons mais cela n'arrêtera pas un jet de boule de pétanque ! À chaque fait divers, les réactions du Gouvernement banalisent ces actes et les effets d'annonces ne sont pas à la hauteur des enjeux. Comment la République peut-elle être respectée et efficace sur tout le territoire national dans des quartiers gangrénés à la fois par le trafic de drogue et le communautarisme ? Il y aurait-t-il deux France ? Une France dans laquelle la loi et l'ordre règnent et une France dans laquelle l'état de droit ne veut plus rien dire ? Face à l'urgence de la situation, il lui demande si le Gouvernement est prêt à lutter pour rétablir l'ordre et la sécurité des personnes et des biens.
Réponse en séance, et publiée le 27 novembre 2019
SÉCURITÉ DES SAPEURS-POMPIERS
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Bouchet, pour exposer sa question, n° 808, relative à la sécurité des sapeurs-pompiers.
M. Jean-Claude Bouchet. Je tiens avant tout à rendre hommage aux victimes des inondations qui se sont produites dans le sud de la France il y a quelques jours, et à remercier pour leur engagement les pompiers qui ont aidé et protégé les habitants des zones sinistrées. Permettez-moi également de saluer le courage des trois sapeurs-pompiers de Carpentras, dans le Vaucluse, dont l'embarcation s'est retournée durant une mission de sauvetage. L'une des trois personnes qu'ils secouraient a malheureusement été portée disparue, avant que son corps soit retrouvé sans vie.
Revenons au quotidien des Français. Trop, c'est trop ! Chaque jour, des pompiers sont appelés dans des cités pour des débuts de feux ou d'incendies, mais sont en réalité pris à partie dans des embuscades, et leurs camions pris pour cible. Dernièrement, à Cavaillon, commune de ma circonscription, le Vaucluse, les pompiers ont été appelés pour des feux de poubelles et sont tombés dans un véritable guet-apens : des détritus et des pneus jonchaient la chaussée, et, dès leur arrivée, ils ont reçu des projectiles, des pierres et même une boule de pétanque qui a fait exploser le pare-brise de leur véhicule.
Les pompiers du Vaucluse expérimenteront prochainement le port de caméras-piétons, mesure que je soutiens. Toutefois, ces caméras n'arrêteront pas les jets de boules de pétanque ! Trop de quartiers, en France, sont devenus des zones de non-droit où divers trafics prospèrent. Des petits caïds et des dealers y font régner leur loi et la terreur auprès d'habitants qui souhaitent vivre paisiblement. Y aurait-il deux France, l'une dans laquelle règnent la loi et l'ordre, l'autre dans laquelle l'État de droit ne veut plus rien dire, et où plus personne ne peut vivre et circuler tranquillement ?
Dans toutes les communes de France, des quartiers sont gangrenés tout à la fois par le trafic de drogue et le communautarisme. Aucune, je dis bien aucune des politiques de la ville menées depuis tant d'années n'a résolu le problème. À chaque fait divers, hélas, les réactions du Gouvernement n'ont fait que banaliser les dérives. Les annonces ne sont pas à la hauteur des enjeux et ne présentent pas d'effet à long terme. Face à la gravité de la situation, le Gouvernement est-il enfin prêt à déployer un véritable « plan Marshall » pour abolir ces zones de non-droit ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur.
M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur. Monsieur le député, je m'associe à l'hommage que vous avez rendu à l'engagement des sapeurs-pompiers face aux récentes intempéries, en particulier aux compagnies de Carpentras que vous avez citées.
Les sapeurs-pompiers, professionnels et volontaires, sont victimes d'agressions, majoritairement de coups et blessures volontaires, menaces et outrages, lors de missions de secours aux personnes à la suite de différends familiaux, de conflits de voisinage ou d'accidents de la circulation. Souvent, ces violences sont le fait même des victimes, je tiens à le souligner. Monsieur Bouchet, vous avez mentionné les interventions dans les cités, qui sont certes parfois compliquées, mais la grande majorité des agressions de sapeurs-pompiers se produisent dans un contexte très différent et sont le fait des victimes elles-mêmes, qui peuvent se trouver dans un état d'alcoolisation, de souffrance ou de détresse psychologique par exemple.
Je vous rejoins pour affirmer qu'en ciblant les sapeurs-pompiers, qui incarnent au quotidien les valeurs et les principes républicains fondés sur la solidarité et l'entraide, c'est la République que l'on atteint. C'est donc à la République qu'il revient de répondre fermement et de défendre ceux qui exposent chaque jour leur vie pour sauver celle des autres. La situation est d'autant plus insupportable que derrière la vie des sapeurs-pompiers, c'est aussi la vie des victimes prises en charge qui peut être mise en danger.
Dans ce contexte, le ministère de l'intérieur poursuit une lutte déterminée contre les agressions envers les femmes et les hommes qui garantissent la continuité opérationnelle du service public, chaque jour et sur l'ensemble du territoire. C'est ainsi qu'ont été renforcés les protocoles opérationnels qui permettent aux sapeurs-pompiers, aux brigades de sapeurs-pompiers de Paris ou au bataillon de marins-pompiers de Marseille d'être accompagnés par les forces de l'ordre chaque fois qu'ils interviennent dans des sites sensibles, y compris dans les cités. Des mesures ont également été prises pour faciliter les dépôts de plaintes et promouvoir la protection fonctionnelle systématique des sapeurs-pompiers.
Les caméras mobiles ne peuvent bien évidemment pas empêcher les jets de projectiles, mais elles permettent de faire baisser la tension. C'est la raison pour laquelle ce dispositif est généralisé. De nombreux sapeurs-pompiers en sont dotés. Nous avons bon espoir que l'expérimentation en cours démontrera toute leur utilité.
Enfin, en aucun cas le Gouvernement ne banalise la violence exercée contre les sapeurs-pompiers dans certains quartiers très difficiles. Bien au contraire, nous menons dans ces secteurs une lutte qui vise certes à protéger les sapeurs-pompiers durant leurs interventions, mais aussi à combattre de manière extrêmement efficace les trafics qui sont la cause des agressions. Nous y procédons grâce au plan de lutte contre les stupéfiants que nous déployons dans l'ensemble du territoire national – y compris à Cavaillon et à Carpentras, monsieur Bouchet – et qui vise à renforcer l'échange d'informations et la définition d'objectifs communs par les services de police et de gendarmerie, afin de démanteler les trafics.
Auteur : M. Jean-Claude Bouchet
Type de question : Question orale
Rubrique : Sécurité des biens et des personnes
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 novembre 2019