Question au Gouvernement n° 809 :
prélèvement de l'impôt à la source

15e Législature

Question de : Mme Brigitte Kuster
Paris (4e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 12 avril 2018


PRÉLÈVEMENT DE L'IMPÔT À LA SOURCE

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Kuster, pour le groupe Les Républicains.

Mme Brigitte Kuster. Monsieur le ministre de l'action et des comptes publics, le prélèvement de l'impôt à la source entrera en vigueur le 1er janvier prochain.

M. Marc Le Fur. Funeste réforme !

Mme Brigitte Kuster. À mesure que l'échéance approche, les inquiétudes se font de plus en plus fortes. D'un côté, les contribuables redoutent un mécanisme éminemment complexe et attentatoire à la confidentialité fiscale.

M. Thibault Bazin. Elle a raison !

Mme Brigitte Kuster. De l'autre, les entreprises déplorent son coût et les modalités de sa mise en œuvre. Quant à la société dans son ensemble, elle a tout à craindre d'un dispositif qui dilue l'impôt et lui fait perdre sa force contributive.

Une autre réforme permettant de prélever un impôt contemporain de la perception des revenus et conservant les actuelles modalités de recouvrement – qui donnent pleinement satisfaction – était possible. Les membres du groupe Les Républicains l'ont proposée, vous l'avez refusée. De fait, les entreprises se voient confier une tâche dévolue aux services de l'État, dès lors qu'elles devront désormais percevoir à leurs frais l'impôt sur le revenu.

M. Thibault Bazin. Sans compensation !

Mme Brigitte Kuster. Est-ce vraiment leur rôle ? Avec le prélèvement à la source, vous leur imposez une charge supplémentaire. Votre administration a d'ailleurs chiffré à 420 millions d'euros le coût de la réforme ; certains l'estiment même à 1 milliard d'euros. Ce coût, vous vous êtes engagé à le compenser par des mesures de simplification : pouvez-vous les détailler ?

Bien entendu, toutes ces difficultés pèseront plus lourdement encore sur les petites et moyennes entreprises, déjà assommées de taxes, de charges et de paperasserie administrative. D'ailleurs, leurs instances représentatives vous alertent depuis plusieurs mois sur l'incapacité dans laquelle elles se trouvent d'appliquer la réforme dès 2019. Le comité de suivi que vous avez présidé récemment n'a pas permis de lever leurs doutes, bien au contraire.

Monsieur le ministre, si la mise en place de la réforme est complexe pour les entreprises, elle l'est tout autant pour l'administration. Aussi ma question est-elle double : pouvez-vous nous assurer que vos services seront prêts à temps pour passer au prélèvement à la source ? Quelles garanties pouvez-vous fournir aux employeurs et aux contribuables afin qu'ils ne soient pas confrontés à une nouvelle usine à gaz ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'action et des comptes publics.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics. Le prélèvement de l'impôt à la source, c'est-à-dire sa contemporanéité avec les revenus, est une mesure attendue par tous les Français.

M. Thibault Bazin. Qu'en pensiez-vous il y a six mois ?

M. Gérald Darmanin, ministre . Il est en vigueur dans quasiment tous les pays européens. En outre, les sondages d'opinion indiquent que 55 % à 70 % des Français sont favorables au paiement de l'impôt dès que l'on touche ses revenus et non un an après. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) En effet, au moins 7 millions de nos compatriotes voient leur revenu changer de plus de 30 % d'une année sur l'autre :…

M. Marc Le Fur. Vous verrez en janvier !

M. Gérald Darmanin, ministre . …les salariés agricoles, ceux qui multiplient les contrats à durée déterminée, ceux qui partent en retraite, ceux qui se marient, ceux qui divorcent, ceux qui deviennent veufs ou veuves éprouvent de grandes difficultés à payer leur impôt un an après avoir touché des revenus plus importants.

M. Thibault Bazin. Qu'en est-il des jeunes qui ne paient l'impôt la première année ?

M. Gérald Darmanin, ministre . Nous sommes à l'écoute du monde de l'entreprise, qui est déjà collecteur d'impôt, notamment des cotisations sociales et de la TVA. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Jean-Marie Sermier. Rien à voir !

M. Gérald Darmanin, ministre . Nous devons donc les accompagner. Nous avons reporté d'un an le prélèvement à la source afin d'être prêts au 1er janvier 2019. Depuis ce matin, chaque contribuable peut consulter le site impots.gouv.fr non seulement pour procéder à sa déclaration de revenus mais aussi pour se renseigner sur cette grande mesure de simplification et de soutien au pouvoir d'achat.

M. Pierre Cordier. Et pour ceux qui n'ont pas de réseau ?

M. Gérald Darmanin, ministre . Le système actuel, madame la députée, est surtout difficile pour les contribuables des classes moyennes et populaires, dont 60 % sont mensualisés et paient leurs impôts sur dix mois à partir du 15 de chaque mois. Avec le prélèvement de l'impôt à la source, ils le paieront sur douze mois dès qu'ils toucheront leur revenu et n'auront pas à constituer une trésorerie. Pour ceux dont les revenus sont très modestes, il y a là une importante mesure de pouvoir d'achat. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

Mme Marie-Christine Dalloz. On verra !

Données clés

Auteur : Mme Brigitte Kuster

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôt sur le revenu

Ministère interrogé : Action et comptes publics

Ministère répondant : Action et comptes publics

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 avril 2018

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