statut constitutionnel de la Corse
Question de :
M. Michel Castellani
Haute-Corse (1re circonscription) - Non inscrit
Question posée en séance, et publiée le 19 avril 2018
STATUT CONSTITUTIONNEL DE LA CORSE
M. le président. La parole est à M. Michel Castellani, au titre des députés non inscrits.
M. Michel Castellani. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. J'y associe mes collègues Jean-Félix Acquaviva et Paul-André Colombani.
Monsieur le Premier ministre, le volet corse de la réforme institutionnelle ne peut nous satisfaire. Il ne propose aucune avancée notable en termes de dévolution de compétences. Il ne permettra en rien aux élus de la Corse de mordre sur les tristes réalités de l'île. La vacuité du texte constitue un déni de démocratie face à la volonté des Corses, exprimée par des votes répétés, de voir enfin traités au fond les problèmes sociaux, culturels et donc politiques de l'île. (M. Jean Lassalle applaudit)
On nous oppose le risque de contagion. Mais au moment où la mondialisation s'impose toujours plus à nous, où l'Europe influence directement la plupart de nos lois, au nom de quel principe devrait-on considérer comme immuable l'équilibre des compétences entre l'État et les collectivités ?
Pour notre part, en tout cas, nous ne désirons nullement procéder à une escalade institutionnelle. Notre vœu est de voir la Corse accéder à l'autonomie, donc disposer des moyens de sa politique interne. (M. Jean Lassalle applaudit)
Nous sommes unis, en Corse, par un sentiment d'appartenance qui nous a permis d'agréger, des siècles durant, tant de femmes et d'hommes venus des horizons les plus divers, et nous faisons vivre notre culture commune. (M. Jean Lassalle applaudit)
Nous désirons continuer le fil de cette histoire, qui est en train de se rompre, et la loi doit nous en donner les moyens. Notre situation géographique, culturelle et sociale particulière doit être traitée par des dispositions particulières. L'égalité des citoyens face à la loi est un principe intangible, mais la reconnaissance de la diversité des territoires relève d'une autre logique tout aussi démocratique.
Je vous demande donc, monsieur le Premier ministre, ainsi qu'à votre gouvernement, à votre majorité et à tous les groupes de cette assemblée, d'accepter des amendements indispensables et de faire avancer la loi dans le sens attendu par une large majorité de Corses. Là est le véritable esprit de la démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur plusieurs bancs du groupe GDR. – MM. Jean-Félix Acquaviva, Paul-André Colombani, Jean Lassalle et Serge Letchimy applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur.
Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, l'inscription de la Corse dans la Constitution est l'une des principales revendications des élus de la collectivité de Corse, et cela depuis longtemps. Le Gouvernement a mis cette demande à son agenda et entend répondre ainsi aux aspirations légitimes des habitants de l'île. C'est le sens du discours prononcé par le Président de la République à Bastia en février dernier, dans lequel il a pris des engagements tenant au développement de la Corse et à son inscription dans la politique méditerranéenne de la France.
L'objectif de la révision constitutionnelle sera d'ancrer la Corse dans la République, tout en lui reconnaissant – oui, monsieur le député – des spécificités. L'inscription de la Corse dans la Constitution fera l'objet d'un article distinct, en l'occurrence un article 72-5, comme vous le souhaitiez.
M. Éric Straumann. On pourrait faire la même chose pour l'Alsace !
Mme Jacqueline Gourault, ministre . Cette inscription se fera néanmoins en référence à l'article 72. Il s'agira d'une reconnaissance expresse de la collectivité unique de Corse comme collectivité à statut particulier au sens de l'article 72, ce qui, comme vous le savez, sanctuarisera la collectivité de Corse.
M. Éric Straumann. Nous voulons la même chose pour l'Alsace !
Mme Jacqueline Gourault, ministre . La Constitution reconnaîtra le caractère spécifique de la Corse, comme vous l'avez souligné,…
M. Éric Straumann. M. Valls est-il d'accord ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre . …c'est-à-dire son caractère insulaire, ses spécificités géographiques, économiques et sociales.
M. Patrick Hetzel et M. Raphaël Schellenberger . Et l'Alsace ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre . Monsieur le député, cette reconnaissance permettra d'assouplir l'application du principe d'égalité au niveau constitutionnel et de procéder à des modulations. Sera ainsi ouverte une possibilité d'adapter les lois et règlements en Corse.
M. Raphaël Schellenberger. Et en Alsace ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre . Les domaines dans lesquels la collectivité de Corse pourra bénéficier de cette habilitation seront bien sûr précisés par la loi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe MODEM et sur quelques bancs des groupes LaREM et LR.)
Auteur : M. Michel Castellani
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Collectivités territoriales
Ministère interrogé : Intérieur (Mme la ministre auprès du ministre d'État)
Ministère répondant : Intérieur (Mme la ministre auprès du ministre d'État)
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 avril 2018