15ème législature

Question N° 834
de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie (La République en Marche - Ille-et-Vilaine )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > prestations familiales

Titre > Dysfonctionnements de l'interface Pajemploi

Question publiée au JO le : 03/12/2019
Réponse publiée au JO le : 11/12/2019 page : 11929

Texte de la question

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les dysfonctionnements de l'interface Pajemploi, organisme mandaté par l'État, dans le cadre du versement du complément du libre choix de garde. Mise en place en mai 2019, la réforme du CMG a eu pour conséquence de confier le calcul et le versement de cette prestation au centre national Pajemploi et non plus à la caisse d'allocations familiales et à la mutualité sociale agricole. Cependant, suite à un incident informatique durant ce transfert entre ces institutions, les données informatiques relatives à de nombreux bénéficiaires ont été perdues. Il apparaît que Pajemploi n'aurait pas adapté son système informatique pour permettre la prise en compte de cette réforme. Outre un allongement du délai de traitement des dossiers, ce dysfonctionnement a entraîné pour de nombreuses familles le non-versement du CMG, voire le prélèvement de cotisations sociales indues. Ce dysfonctionnement n'affecte pas seulement les familles, mais aussi les nourrices agréées dont la rémunération a été remise en cause. Dans sa circonscription, Mme la députée a été interpellée par une famille rennaise qui a subi ce dysfonctionnement et qui est épaulée par le collectif « Familles en lutte ». Grâce à ce collectif, un listing de 90 familles françaises dont 15 bretonnes a été transmis à Pajemploi qui s'est engagé à régulariser leur situation sous deux semaines. Ces dossiers avancent, mais il resterait encore plusieurs milliers de familles isolées. Elle souhaite également alerter sur la gestion de ce dysfonctionnement par Pajemploi, en particulier sur le manque de communication claire et précise à destination des familles et des nourrices. À ce jour, le nombre exact de familles concernées par ce problème n'est pas connu et Pajemploi refuserait de prendre un engagement précis quant à la régularisation de la situation. Malgré la mise en place d'une cellule pour accompagner les ménages lésés, Pajemploi n'a pas encore régularisé la situation de nombreuses familles qui se retrouvent dans une situation de grande précarité financière. Cette situation est d'autant plus préoccupante que Pajemploi devra, à compter du 1er janvier 2020, mettre en place le prélèvement à la source pour les particuliers employeurs. Aussi, elle souhaiterait connaître les raisons qui ont conduit à ces dysfonctionnements et les mesures qu'elle compte mettre en œuvre pour remédier à cette situation et pour s'assurer qu'elle ne se reproduise plus.

Texte de la réponse

DYSFONCTIONNEMENT DE L'INTERFACE PAJEMPLOI


Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, pour exposer sa question, n°  834, relative au dysfonctionnement de l'interface Pajemploi.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Au mois de mai dernier, le calcul et le versement du complément du libre choix du mode de garde – CMG – ont été retirés aux caisses d'allocations familiales et à la Mutualité sociale agricole, pour être confiés au centre national Pajemploi. Dans ma circonscription, le collectif « Familles en lutte » m'a alertée de graves dysfonctionnements de Pajemploi, notamment causés par ce transfert.

À la suite d'un incident technique, les données de nombreux bénéficiaires semblent avoir été perdues, plaçant 30 000 familles dans une grande difficulté, voire dans la précarité. Concrètement, l'allongement considérable des délais de traitement va à l'encontre des ambitions de la réforme, et, plus grave encore, de nombreuses familles n'ont pas pu toucher le CMG ou ont été prélevées de cotisations sociales indues. Cela a eu des conséquences graves, provoquant des découverts, de l'endettement, et pour certaines familles, l'obligation de licencier des nourrices.

Ce dysfonctionnement me fait penser aux bugs qui ont touché le RSI – régime social des indépendants – il y a une dizaine d'années, dont chacun se souvient encore.

Au-delà d'incidents techniques, qui peuvent arriver, et que nous déplorons, la gestion assurée par Pajemploi nous paraît préoccupante. En pareil cas, les familles ont besoin d'informations claires et précises, mais aussi de bienveillance. Or 8 000 familles ignoreraient encore quand leur situation sera régularisée. Pajemploi et la Caisse nationale d'allocations familiales se sont engagés à faire un point de situation aujourd'hui même, le 10 décembre. Nous espérons que les problèmes seront résolus rapidement. Une cellule d'accompagnement a certes été créée, mais il est indispensable d'accélérer le rythme et d'aider concrètement les familles.

Madame la secrétaire d'État, avez-vous connaissance des causes précises ayant entraîné de tels dysfonctionnements ? Qu'en est-il des familles dont la situation n'est toujours pas résolue ? Comment seront-elles accompagnées, et dans quel délai ? Quelles mesures entendez-vous prendre pour remédier à cette situation et pour vous assurer, autant que possible, qu'elle ne se reproduise pas ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Je vous remercie pour votre question, qui me permet de m'exprimer sur les dysfonctionnements du système de calcul des prestations pour la garde d'enfants. Le service Pajemploi + doit améliorer les conditions dans lesquelles les familles – en particulier les plus modestes – ont recours à une garde d'enfant, en leur évitant des avances de frais. En effet, le complément du libre choix du mode de garde est versé dès que la rémunération doit être payée à l'assistante maternelle ou à la garde d'enfant.

Désormais, pour toutes les familles qui le souhaitent et si leurs salariés en sont d'accord, c'est le centre Pajemploi qui verse cette rémunération pour le compte des parents, qui n'ont plus à s'en soucier. Plus de 100 000 parents ont eu recours à ce nouveau service.

Plus largement, grâce à cette réforme, les délais de versement du CMG ont été considérablement réduits pour les 800 000 familles qui emploient un assistant maternel ou recourent à une garde d'enfant pour un enfant âgé de moins de six ans.

Lors de l'installation de ces nouveaux services, des erreurs ont été détectées dans le calcul des prestations dues à 3 % des utilisateurs de Pajemploi. Pour une partie de ces familles, il n'a pas été possible d'assurer le versement du complément de libre choix du mode de garde et les cotisations sociales versées au titre de la garde d'enfant ont parfois été prélevées alors que ces familles en étaient exonérées.

J'ai conscience que ces erreurs ont eu des conséquences parfois graves pour certaines familles. Ma première préoccupation est que plus aucune famille ne connaisse des difficultés financières en raison de tels dysfonctionnements.

Dès le mois de juin, un plan d'action a été mis en place par la Caisse nationale d'allocations familiales et l'ACOSS, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, qui sont les responsables du dispositif. Des travaux ont été conduits pour corriger les anomalies informatiques ; ils ont permis de réduire le nombre de familles concernées. Les organismes empêchent les prélèvements de cotisations à tort et versent désormais des acomptes lorsque l'aide ne peut pas être calculée dans des conditions normales. Pour les familles pour lesquelles ces prestations représentent des montants importants ou qui sont en situation de fragilité financière, des aides exceptionnelles sont versées par le fonds d'action sociale de la branche famille.

La communication en direction des familles a en outre été renforcée : quarante personnes sont venues en renfort pour répondre individuellement aux questions posées par téléphone et traiter les demandes ; un numéro vert a été mis en place.

Enfin, le collectif « Familles en lutte », que vous mentionnez, a été reçu et des solutions ont été trouvées pour les familles concernées. Tous les cas mentionnés sont aujourd'hui pris en charge.

Je suis personnellement de près la situation. J'étais hier en réunion avec le directeur de l'ACOSS ; des chiffres relatifs à l'avancement du traitement des dossiers seront publiés aujourd'hui. Nous travaillons afin qu'aucune erreur ne subsiste. Les vérifications sont faites manuellement. Nous serons vigilants quant à la mise en place du prélèvement à la source, en faisant un point au 1er juin. Des points d'information seront régulièrement organisés.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Je vous remercie pour la précision de vos réponses, madame la secrétaire d'État. Je ne doute pas de la célérité de l'action des services de l'État pour résoudre ces difficultés.

Je voudrais insister sur le fait qu'à compter du 1er janvier 2020, Pajemploi devra mettre en place le prélèvement à la source pour les particuliers employeurs. Il faudrait que les erreurs soient autant que possible corrigées à cette date pour faire en sorte que cela se passe dans de bonnes conditions.