15ème législature

Question N° 8744
de M. Pierre Dharréville (Gauche démocrate et républicaine - Bouches-du-Rhône )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Personnes handicapées

Rubrique > personnes handicapées

Titre > Droits fondamentaux des personnes en situation de handicap

Question publiée au JO le : 29/05/2018 page : 4425
Réponse publiée au JO le : 19/02/2019 page : 1689
Date de changement d'attribution: 31/07/2018
Date de signalement: 22/01/2019

Texte de la question

M. Pierre Dharréville alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l'obligation, pour l'État français, de garantir l'accès des personnes en situation de handicap aux droits fondamentaux énoncés dans les textes internationaux dont la France est signataire. Le Forum européen des personnes handicapées et Inclusion Europe, soutenus par un collectif de cinq associations françaises - APF France Handicap, CLAPEAHA, FNATH, Unafam, Unapei - tous handicaps confondus, ont déposé une réclamation devant le Conseil de l'Europe pour faire condamner l'État français pour violation des droits fondamentaux des personnes handicapées.  En vertu de la Charte européenne des droits sociaux qui énonce l'accès aux droits fondamentaux pour tous les citoyens et dont elle est signataire, la France doit garantir à chaque personne en situation de handicap, le droit à un accès égal et effectif à des services d'accompagnement de proximité spécifiques aux handicaps ainsi qu'à ceux dédiés à l'ensemble de la population. Cet accès doit permettre aux concernés de choisir leur lieu de vie. En 2018 en France, les personnes en situation de handicap voient leur situation sociale profondément impactée et se dégrader. Le défaut de dispositions adaptées les prive de leurs droits d'accès à des services spécialisés, à des aides personnelles, au logement et aux soins ; les expose à la pauvreté et finit, dans les faits, par les exclure de la société malgré les discours sur l'inclusion. Les familles, qui doivent assumer l'accompagnement de leur proche handicapé, sont quant à elles fragilisées socialement. Leurs droits à une protection sociale ne sont pas respectés. Les difficultés des proches aidants ont été mises en lumière avec « la mission flash » sur les aidants et la proposition de loi n° 589 pour une reconnaissance sociale des aidants qui tentait d'y apporter des réponses concrètes. Les associations représentant les personnes en situation de handicap et leurs familles réclament une politique coordonnée, transversale et d'évaluation des besoins des personnes en situation de handicap est indispensable. Elles demandent la mise en place d'un plan d'urgence qui assure un accès égal et effectif aux services sociaux, aux soins, au logement, ainsi qu'à des aides à l'autonomie. Les personnes concernées et leurs familles attendent des mesures à la hauteur de leur détresse. Le Comité européen des droits sociaux a déjà condamné la France à plusieurs reprises et pour des atteintes à divers droits. Ces condamnations ont abouti à la mise en place de différentes mesures comme les différents plans autisme ou encore la loi DALO. Mais les choix politiques à l'œuvre depuis plusieurs décennies privent les caisses de l'État de financements utiles aux développement des services publics indissociables de la mise en œuvre concrète de ces droits fondamentaux. Le Gouvernement a annoncé vouloir faire du handicap une priorité. Il lui demande quelles réponses concrètes le Gouvernement prévoit d'apporter aux interpellations des personnes en situation de handicap et de leurs familles, ainsi qu'à l'action engagée par les associations.

Texte de la réponse

L'engagement pris en 2017 de faire du handicap une priorité du quinquennat et la volonté d'inscrire celui-ci au cœur même des politiques publiques conduites par chacun des ministères s'est traduit par le rattachement du secrétariat d'Etat chargé des personnes handicapées au Premier Ministre. La feuille de route relative au handicap énonce les grands objectifs des cinq prochaines années, lesquels ont été confirmés par le Comité interministériel du handicap du 20 septembre 2017 et amplifiés par celui du 25 octobre 2018, en vue de simplifier le quotidien des personnes, et de garantir l'accessibilité de tous à tout. Les professionnels des établissements et services médico-sociaux qui accompagnent au quotidien un grand nombre de personnes handicapées et leurs familles ont une part déterminante dans la construction de cette société inclusive afin de sécuriser les parcours des personnes, dans le respect de leur choix de vie, et permettre un accès effectif aux apprentissages, à la formation et à l'emploi, à la santé et au logement, comme à l'ensemble de la vie en société. Après la progression quantitative importante de l'offre d'accompagnement des personnes - qui a presque doublé en dix ans - l'enjeu est bien de développer aujourd'hui des réponses plus individualisées et modulaires, en réponse à des besoins eux-même en évolution, et de changer d'échelle dans le déploiement de nouveaux dispositifs tels que : les pôles de compétences et de prestations externalisées (PCPE), l'emploi accompagné, l'habitat inclusif ou le fonctionnement en dispositif intégré des Instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques. Des leviers juridiques ont été mis en place à cette fin, comme la réforme des autorisations qui facilite le développement d'une offre de services inclusive à partir des établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) existants dès lors qu'il n'est plus nécessaire de disposer d'un agrément spécifique pour développer des services en milieu ordinaire. Le suivi de ce mouvement de transformation est organisé dans le cadre d'un comité de pilotage national co-présidé par la secrétaire d'Etat chargé des personnes handicapées et un président de conseil départemental, représentant de l'assemblée des départements de France en miroir de la responsabilité partagée de l'Etat et des départements en la matière. S'agissant des personnes polyhandicapées et des personnes en situation de handicap psychique des mesures spécifiques sont inscrites dans les stratégies nationales adoptées et dont le financement s'inscrit dans le cadre global de transformation de l'offre médico-sociale. Par ailleurs, un plan de prévention des départs non souhaités vers la Belgique a été mis en place depuis 2016, pour lequel une nouvelle enveloppe de crédits de 15 M€ est mobilisée en 2019 venant s'ajouter aux 30 M€ précédemment délégués pour la période 2017-2018. Un chantier vient d'être ouvert dans le cadre de la 5ème Conférence nationale du handicap intitulée « Tous concernés, tous mobilisés » lancée le 3 décembre dernier pour trouver des alternatives au départ de citoyens français en Belgique. La Conférence nationale du handicap ouvre également quatre autres chantiers : la simplification et l'amélioration de la prestation de compensation du handicap (PCH) afin de mieux prendre en compte les besoins des personnes, l'articulation entre la PCH et l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) afin d'améliorer la compensation du handicap des enfants, le pilotage et le fonctionnement des MDPH afin d'aller davantage sur des orientations vers des parcours et enfin le dernier chantier a pour objet de formuler des propositions afin d'assurer une pleine représentation des personnes en situation de handicap dans la construction des politiques publiques. Il est prévu une remise des travaux conduits dans ces différents groupes de travail d'ici la fin du premier semestre 2019. En ce qui concerne l'accès au logement, la mise en place d'un nouveau dispositif, l'habitat inclusif, introduit par la loi Evolution du Logement, de l'Aménagement et du Numérique (ELAN) permet de disposer d'un logement individuel, offrant ainsi un mode de vie librement choisi inclus dans la société, assorti d'un projet de vie sociale et partagé dans le cadre d'un accompagnement social et médico-social garantissant l'autonomie de vie. Les textes d'application de ce nouveau dispositif font actuellement l'objet d'une concertation et seront publiés dans les prochains mois. En matière de scolarisation, un plan de transformation a été lancé pour permettre à l'École de la République d'être pleinement inclusive. Les effectifs d'élèves en situation de handicap scolarisés dans les écoles et les établissements publics et privés relevant du ministère de l'éducation nationale sont en hausse de 6,9% par rapport à la rentrée 2016. Le plan de transformation du système éducatif et médico-social prévoit notamment de multiplier et diversifier les modes de scolarisation. A cet égard, la stratégie nationale pour l'autisme au sein des troubles du neuro-développement retient un plan d'action visant à favoriser l'inclusion scolaire des enfants en milieu ordinaire, de la maternelle au lycée jusque et y compris l'enseignement supérieur. Ainsi, cinq classes d'unités d'enseignement en élémentaire autisme (UEEA) ont été ouvertes dès la rentrée scolaire 2018 et 40 autres sont programmées pour ouvrir d'ici 2022, de même que 180 classes d'unités d'enseignement en maternelle autisme (UEMA). S'agissant de la prestation de compensation du handicap, le Comité interministériel du handicap du 25 octobre 2018 a retenu une mesure visant à engager la révision de la liste des produits et prestations remboursables (LPPR) par l'assurance maladie et à actualiser l'arrêté fixant les tarifs de la PCH concernant les aides techniques, en cohérence avec les évolutions de la LPPR et l'évolution des besoins. En matière d'accessibilité, l'ordonnance n° 2014-1090 du 26 septembre 2014 a mis en place un nouveau dispositif d'échéanciers : l'agenda d'accessibilité programmée, nommé Ad'AP pour ce qui concerne le cadre bâti dans lequel il est obligatoire et engage le gestionnaire d'établissement à réaliser les travaux, et SD'AP pour le domaine des transports dans lequel il est un outil d'application volontaire. Le dispositif des Ad'AP a permis de relancer la dynamique impulsée par la loi de 2005. En outre, un projet de loi d'orientation sur les mobilités sera examiné par le Parlement dans les prochains mois et comportera plusieurs mesures pour les personnes handicapées dans les transports publics. Le bilan intermédiaire de ce dispositif est engagé avec l'appui d'une mission inter inspections, confiée à l'IGF, l'IGAS et le CGEDD. Le résultats de leurs travaux sera partagé en toute transparence avec les associations représentants les personnes handicapées et transmis au Parlement. S'agissant de la disposition de l'article 64 de la loi ELAN relative au logement évolutif qui retient un seuil d'accessibilité des logements neufs de 20%, l'article L. 111-7-1 du Code de la construction et de l'habitat dispose que les décrets précisent les conditions dans lesquelles, en fonction des caractéristiques des bâtiments d'habitation collectifs neufs, 20% de leurs logements et au moins un logement sont accessibles tandis que les autres sont évolutifs, ce qui permettra d'assurer une évolution des logements en fonction des besoins des occupants, tout au long de leur parcours de vie. Par ailleurs, l'obligation d'ascenseur pour les bâtiments d'habitation collectifs neufs est abaissée à ceux qui comptent au moins trois étages, ce qui contribue à augmenter le nombre de logements accessibles aux personnes handicapées. Pour ce qui concerne l'accès à la santé, plusieurs mesures ont été prises lors du CIH du 25 octobre 2018 : - Fusionner les deux dispositifs existants en matière d'aide pour l'acquisition d'une complémentaire santé permettant aux personnes bénéficiant de l'allocation adulte handicapé (AAH) de bénéficier d'une couverture santé sans reste à charge ; - Élargir aux personnes en situation de handicap l'accès aux plateformes d'intervention départementale pour l'accès aux soins et à la santé ; - Améliorer le financement des aides techniques ; - Organiser le dépistage bucco-dentaire M'T Dents en établissements médico-sociaux accueillant des enfants et adolescents. La stratégie de transformation du système de santé - Ma Santé 2022 - comporte en outre un objectif d'amélioration de l'accès aux soins des personnes handicapées qui sera décliné au sein des nouveaux PRS. Le gouvernement a par ailleurs pleinement conscience que la reconnaissance et le soutien des aidants sont des enjeux sociaux et sociétaux croissants au regard du vieillissement de la population et de son plus fort degré de dépendance. La France compte ainsi entre 8 et 11 millions d'aidants de personnes âgées, en situation de handicap ou malades. Plusieurs actions ont été engagées ces dernières années en faveur des proches aidants : - Les plans nationaux de santé publique comportent des mesures destinées aux aidants ; - La loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement inclut des dispositions à destination des aidants : définition du proche aidant, module répit et relais en cas d'hospitalisation, congé du proche aidant, conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie, élargissement des compétences des acteurs institutionnels ; - La stratégie nationale de soutien des aidants de personnes handicapées adoptée lors du CIH de décembre 2016 et les travaux menés dans le cadre de la démarche « réponse accompagnée pour tous » abordent la question des aidants. Outre une mission confiée à Madame Dominique Gillot, Présidente du CNCPH, sur les pistes d'amélioration permettant de faciliter l'embauche et le maintien en emploi des personnes handicapées ainsi que leurs aidants, plusieurs initiatives parlementaires sont intervenues pour accompagner et soutenir les aidants. Ainsi, faisant suite à l'adoption de la proposition de loi du député Paul Christophe, un décret du 9 octobre 2018 précise les modalités d'application aux agents publics civils du dispositif de don de jours de repos non pris au bénéfice des proches aidants de personnes en perte d'autonomie ou présentant un handicap. Par ailleurs, l'article 53 de la loi du 10 août 2018 pour un Etat au service d'une société de confiance ouvre la possibilité d'engager l'expérimentation de dérogations au droit du travail dans le cadre de la mise en œuvre de prestations de suppléance de l'aidant à domicile ou de séjours de répit aidants aidés, dont le décret du 28 décembre 2018 est venu préciser les conditions. Les situations des proches aidants étant très variées, de la personne âgée qui aide un conjoint atteint de la maladie d'Alzheimer, au parent d'un enfant autiste, en passant par le salarié qui suit de près des parents vieillissants, le gouvernement a choisi d'avoir une approche structurée et globale du sujet. Enfin, la concertation nationale « Grand âge et autonomie » lancée le 1er octobre dernier comporte un atelier sur les « aidants, la famille et le bénévolat ». Cette concertation débouchera dans les prochaines semaines sur la remise d'un rapport fin février et les orientations retenues s'inscriront dans la préparation d'un projet de loi d'ici la fin de l'année 2019.