Quelle action du gouvernement pour le désenclavement de la Haute-Vienne ?
Question de :
Mme Marie-Ange Magne
Haute-Vienne (3e circonscription) - La République en Marche
Mme Marie-Ange Magne appelle l'attention de Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, sur le désenclavement de la Haute-Vienne. Le 1er juillet 2017, lors de l'inauguration de la ligne LGV Paris-Rennes, le Président de la République a indiqué qu'il entendait mettre la priorité sur « les transports du quotidien » plutôt que sur des nouveaux grands projets tels que la LGV. Il a affirmé son souhait de « financer le renouvellement de [nos] infrastructures » qui sont insuffisamment entretenues. Il est important de souligner que certaines installations sont aujourd'hui particulièrement dangereuses : la ligne POLT ou encore la RN147, lesquelles desservent (tant bien que mal) le département de la Haute-Vienne, en sont de parfaits exemples. Les gouvernements précédents n'ont pas tenu toutes les promesses de sécurisation et de renouvellement de ces infrastructures. En 2017, alors que ces axes font débat depuis plusieurs dizaines d'années, les conséquences pour le territoire de la Haute-Vienne sont particulièrement inquiétantes pour ce qui concerne la création, le maintien et l'accès à l'emploi. Faute d'être convenablement reliée aux capitales nationale et régionale, la Haute-Vienne doit faire face à un défaut d'attractivité qui entraîne un sentiment de relégation chez la population. À l'intérieur du territoire, les déplacements sont particulièrement contraints avec des trains qui ne circulent pas, qui sont en retard et inconfortables, et enfin, une route nationale mortifère. À cela, s'ajoutent par ailleurs les conséquences de la loi NOTRe et la fusion des régions qui, à défaut d'anticipation de ce phénomène, entraîne un déclassement du territoire. Sont d'ores et déjà observés des départs de services dans la grande métropole, notamment pour ce qui concerne les services décentralisés et déconcentrés de l'État, lesquels entraînent le départ des cadres et des personnes diplômées. Une paupérisation de l'ancienne capitale régionale, Limoges, et des communes des alentours est déjà constatée. Au-delà de l'éternel problème des financements, il nous faut donc aujourd'hui travailler à réduire les lenteurs administratives, dépasser les déceptions et surmonter les clivages entre les élus locaux pour engager les actions indispensables à la sauvegarde des régions. Il est entendu que la course à la vitesse n'est plus la priorité du Gouvernement. Néanmoins, le désenclavement des territoires, qu'ils soient urbains ou ruraux, doit être un engagement ferme et respecté de ce quinquennat. Elle lui demande par conséquent d'expliquer quelle sera l'action du Gouvernement, en lien avec les collectivités locales, pour mettre fin à la problématique d'enclavement particulièrement inquiétante pour le territoire de la Haute-Vienne.
Réponse en séance, et publiée le 24 janvier 2018
DÉSENCLAVEMENT DE LA HAUTE-VIENNE
M. le président. La parole est à Mme Marie-Ange Magne, pour exposer sa question, n° 87, relative au désenclavement de la Haute-Vienne.
Mme Marie-Ange Magne. Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée des transports.
La Haute-Vienne souffre aujourd'hui d'un enclavement réel, qu'il soit ferré, aérien ou routier. Il appartient à l'État de fixer un cap à un territoire oublié des moyens de locomotion à grande vitesse. C’est pourquoi je souhaite aujourd'hui appeler votre attention sur le projet spécifique d'aménagement de la RN147, qui relie Limoges à Poitiers en passant par Bellac.
Monsieur le secrétaire d’État, je n'étais pas née que mes prédécesseurs interrogeaient déjà les vôtres, sur les bancs de cette assemblée, pour demander un aménagement de la RN147 en deux fois deux voies. C’est la preuve à la fois d'une préoccupation constante de la part des élus locaux et d'une inefficacité manifeste dans l'avancée de ce dossier.
Or l'attente de mes concitoyens est forte et légitime : il s'agit de sécuriser une route qui tue ; il s'agit de relier deux anciennes capitales régionales pour créer un pôle d'équilibre dans une nouvelle région administrative grande comme l'Autriche ; il s'agit de permettre, enfin, à notre territoire d'être accessible et de poursuivre ses ambitions de développement.
Le contrat de plan État-région – CPER – 2015-2020 prévoit un aménagement en deux fois deux voies de la RN147 sur 6,5 kilomètres, entre Limoges et Nieul, et un créneau de dépassement. Ce premier tronçon est encourageant : pouvez-vous confirmer que le CPER 2015-2020 sera respecté par l'État ?
Par ailleurs, un tronçon de 6,5 kilomètres sur une route de 120 kilomètres apparaît modeste. Pouvez-vous m'assurer de l'ambition de l'État de poursuivre ses engagements, au moyen des prochains CPER ou bien en soutenant un projet d'autoroute concédée ? Et à quel rythme ?
Nous savons, enfin, que c'est le financement qui pose problème : est-il envisageable de mettre en place une solution alternative à l'écotaxe, qui soit capable de fournir des financements à ce type de projets d'investissements routiers ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du numérique.
M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État chargé du numérique. Madame la députée, Mme Borne vous prie d'excuser son absence et m’a chargé de vous apporter sa réponse. Vous appelez son attention sur le désenclavement de la Haute-Vienne, lequel passe notamment par l'amélioration de ses dessertes routière et ferroviaire. Je souhaite apporter au nom du Gouvernement les réponses aux besoins légitimes d'accessibilité de ce territoire, que vous avez rappelés.
L'amélioration de la desserte routière de Limoges depuis Poitiers par la RN147 est une priorité pour l'État. Comme vous le soulignez, l'objectif de désenclavement de Limoges doit recevoir une réponse adaptée et réaliste. Or les trafics modérés sur la partie centrale de l'axe, représentatifs des échanges entre Poitiers et Limoges, ne justifient pas un aménagement continu en deux fois deux voies entre ces deux agglomérations, et encore moins un aménagement en autoroute concédée, dont le montant du péage serait difficilement acceptable pour les usagers.
Dès lors, il convient d'améliorer de façon significative le niveau de service offert sur cet axe. Dans cet objectif, Mme la ministre a commandé le 20 septembre 2017 au préfet de la région Nouvelle-Aquitaine une étude d'itinéraire qui devra traiter les enjeux de sécurité, de fiabilisation des temps de parcours pour les usagers et de réduction des nuisances pour tous les riverains. Ces études permettront d'identifier les opérations susceptibles de composer un scénario d'aménagement de la RN147 adapté aux niveaux de trafics et apportant un gain réel aux usagers. Elles permettront également de prioriser les aménagements dans un cadre soutenable financièrement pour l'État et les collectivités locales concernées. Les besoins d'amélioration porteront notamment sur les portions qui supportent aujourd’hui les trafics les plus importants, c'est-à-dire, en Haute-Vienne, entre Bellac et Limoges.
Des aménagements ont d'ores et déjà été réalisés lors des précédentes contractualisations : c'est le cas de la déviation de Bellac. D'autres sont en cours. En Haute-Vienne, une enveloppe de 67 millions d’euros, dont 46,5 apportés par l'État, a été inscrite à l'actuel contrat de plan État-région pour la réalisation d'une première section à deux fois deux voies de 5 kilomètres au nord de Limoges et d'un créneau de dépassement entre cette section et Bellac.
Les études et procédures relatives à ces aménagements sont en cours et doivent permettre un engagement des travaux d'ici à la fin de 2020. L'aménagement de l'axe RN147 entre Poitiers et Limoges trouvera naturellement sa place dans le futur programme en faveur du désenclavement que la ministre souhaite mettre en œuvre dans le cas de la loi d'orientation des mobilités.
S'agissant du volet ferroviaire, la ligne Paris-Limoges-Toulouse bénéficiera dans la décennie à venir de très lourds investissements pour régénérer l'infrastructure et renouveler le matériel roulant, particulièrement ancien. La priorité donnée par le Gouvernement à la remise à niveau du réseau structurant, après des décennies de sous-investissement, se traduit par un véritable effort de mise à niveau de l'axe afin de garantir la fiabilité du service rendu. Ainsi, près d'1 milliard d'euros seront investis par SNCF Réseau dans la régénération de l'axe Paris-Orléans-Limoges-Toulouse entre 2015 et 2025.
Tous ces investissements doivent permettre de proposer à l'horizon 2025 une desserte de qualité à l'ensemble des voyageurs de l'axe, en termes de régularité et de temps de parcours offert.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Ange Magne.
Mme Marie-Ange Magne. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, pour cette réponse. Permettez-moi cependant d'insister sur la nécessité d'apporter à la Haute-Vienne, en particulier au nord du département, une solution de désenclavement dans un délai raisonnable, comme le préconise le rapport relatif au désenclavement du Limousin et des territoires limitrophes que M. Delebarre a remis au Gouvernement en 2017.
Je vous invite, ainsi que Mme la ministre, à venir en Haute-Vienne constater l'état d'enclavement de notre territoire en vue de définir ensemble les solutions à mettre en œuvre. J'aurai plaisir à vous accueillir. Nous aurons alors l'occasion d'évoquer l'accessibilité au numérique dans le nord de la Haute-Vienne !
Auteur : Mme Marie-Ange Magne
Type de question : Question orale
Rubrique : Transports
Ministère interrogé : Transports
Ministère répondant : Transports
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 janvier 2018