15ème législature

Question N° 95
de M. Jean-Christophe Lagarde (UDI, Agir et Indépendants - Seine-Saint-Denis )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > police

Titre > Problèmes d'effectifs de la BAC en Seine-Saint-Denis

Question publiée au JO le : 16/01/2018
Réponse publiée au JO le : 24/01/2018 page : 280

Texte de la question

M. Jean-Christophe Lagarde interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les problèmes d'effectifs que rencontrent certaines brigades anti-criminalité (BAC) de la Seine-Saint-Denis. En effet, le nombre insuffisant de tests d'habilitation organisés chaque année ne permet pas de renforcer comme il se doit les effectifs, à l'heure où nombre de fonctionnaires souhaiteraient passer cette habilitation. Certains commissariats du département sont donc dans l'incapacité d'assurer des patrouilles de la BAC sur le créneau soirée. Devant cette problématique, la hiérarchie policière envisage de mutualiser les effectifs de plusieurs commissariats limitrophes pour constituer une BAC de district sur cette plage horaire. Or en mutualisant, on diminue ipso facto le taux de présence sur la voie publique de la BAC sur chaque commune. De même, on prend le risque de ne pas atteindre certains objectifs du fait du manque de synergie entre les fonctionnaires provenant de différents commissariats, de la méconnaissance des populations et des circonscriptions dans lesquelles ils n'ont pas l'habitude de patrouiller, ainsi que des problématiques inhérentes à la fonction police (ressources humaines, moyens matériels, etc.). En conséquence, il dénonce cette décision de mise en place de BAC de district qui illustre un renoncement de l'État à assurer une présence policière minimale aux populations parmi les plus défavorisées de la Seine-Saint-Denis et l'interroge sur l'opportunité, compte tenu du nombre de fonctionnaires candidats, de mettre en place plusieurs tests de sélections BAC dans l'année pour pallier ces problèmes d'effectifs. Une mesure allant dans ce sens renforcerait de surcroît la sécurité des policiers qui ne seraient, dès lors, plus contraints d'effectuer des patrouilles à deux, alors qu'une patrouille en Seine-Saint-Denis, pour qu'elle s'effectue en sécurité, requiert au minimum trois fonctionnaires.

Texte de la réponse

EFFECTIFS DE LA BRIGADE ANTICRIMINALITÉ EN SEINE-SAINT-DENIS


M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour exposer sa question, n°  95, relative aux effectifs de la brigade anticriminalité en Seine-Saint-Denis.

M. Jean-Christophe Lagarde. Madame la ministre auprès du ministre de l'intérieur, je vous interroge à propos des difficultés que rencontrent, notamment en Seine-Saint-Denis mais pas seulement, les effectifs de la brigade anticriminalité – BAC.

Il semble que le nombre de tests d'habilitation effectués pour pouvoir travailler en BAC ne permet pas de renforcer comme il se doit les effectifs, ni même simplement de les maintenir. Dans le seul district dont dépend ma circonscription, trois des cinq équipes de BAC sont aujourd'hui dépourvues de moyens, à tel point qu'elles ne peuvent plus assurer une présence quotidienne.

C'est pourquoi manifestement la hiérarchie policière envisage dans notre département de mutualiser les effectifs de plusieurs commissariats limitrophes pour constituer une BAC de district sur cette plage horaire. En clair, on fait avec les moyens du bord et, là où trois étaient dépourvus, on va partager sur cinq et il y aura moins d'effectifs pour assurer la sécurité. De facto on diminue la présence de la BAC sur la voie publique. Plus grave encore à mes yeux, on prend le risque de ne pas atteindre les objectifs qui sont fixés aux BAC puisqu'il y aura peu de synergies entre des fonctionnaires qui ne se connaissent pas et ne travaillent pas dans le même commissariat, et surtout du fait de la méconnaissance de la population : une brigade anticriminalité qui ne connaît pas la population perd en efficacité, ce qui augmente la dangerosité de l'intervention et les risques de dérapage ainsi que les problèmes matériels et de ressources humaines inhérents à la fonction de police.

En conséquence je regrette profondément cette décision de la hiérarchie départementale. On se demande d'ailleurs à quoi sert la police d'agglomération si on est obligé de déshabiller Pierre pour essayer d'habiller Paul – et bien mal. Cela illustre le renoncement à assurer une présence policière minimale à des populations parmi les plus défavorisées de la Seine-Saint-Denis.

Je m'interroge sur l'opportunité, compte tenu du nombre de candidats, d'organiser plus de tests de sélection pour la BAC afin de pallier ces problèmes d'effectifs. Ne vaudrait-il pas mieux, madame la ministre, trouver d'autres solutions qui permettent à chaque commissariat de Seine-Saint-Denis, département le plus criminogène de France, d'avoir au moins une BAC dotée des effectifs nécessaires et de ne pas, en plus de la criminalité importante qu'il connaît, subir la quasi-disparition de la principale force anticriminalité mise à disposition par les services de police ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. Monsieur le député Lagarde, tout d'abord, au regard des problématiques de délinquance que rencontre le département de la Seine-Saint-Denis, il est en effet essentiel d'y assurer un effectif suffisant de policiers. Ainsi, en 2017, les effectifs affectés à la Direction territoriale de la sécurité de proximité de Seine-Saint-Denis se sont accrus, passant de 3 299 fonctionnaires à la fin de 2016 à 3 390 à la fin de 2017.

En ce qui concerne spécifiquement les brigades anticriminalité, la nature des missions qui leurs sont imparties exige une habilitation dédiée. Les besoins en tests d'habilitation BAC sont aujourd'hui mutualisés à l'échelle de l'agglomération parisienne – Paris et la petite couronne – et centralisés au sein de la sous-direction de la formation. Par ailleurs, la centralisation et l'harmonisation des habilitations au niveau national donnent une plus grande souplesse aux BAC puisque l'habilitation à servir au sein d'une BAC est valable pour l'ensemble du territoire.

En pratique, l'exercice au sein d'une BAC exige des qualités particulières de la part des policiers qui y sont affectés et la sélection des candidats serait tout aussi rigoureuse sur un nombre plus important d'examens. En outre, les fonctionnaires des BAC sont astreints à des obligations de renforcement de leurs compétences professionnelles. Ces sujétions s'appliquent sur tout le territoire et sont absolument nécessaires au regard de la diversité et de la sensibilité des missions assurées par ces unités.

J'ajoute que les BAC ont été intégrées en 2016 au schéma national d'intervention de lutte contre le terrorisme, en tant qu'unités d'intervention intermédiaire, ce qui les expose tout particulièrement.

Enfin, la mutualisation de certaines BAC au sein de l'agglomération parisienne ne constitue en aucun cas un renoncement de l'État mais témoigne au contraire de la volonté d'assurer un déploiement accru des patrouilles sur la voie publique, à travers la recherche de synergies. Les réflexions lancées à cette occasion s'inscrivent dans le cadre des travaux en cours et sont menées en étroite concertation avec les élus locaux, et je l'espère avec vous, monsieur le député, sur la mise en œuvre de la police de sécurité du quotidien, qui vise précisément à doter les personnels d'une connaissance plus fine de leur environnement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Je vous remercie, madame la ministre. Si les questions orales sans débat, pour parler clairement, doivent servir à quelque chose, c'est peut-être à faire remonter des informations au ministère de l'intérieur quand vos administrations le font peu.

En l'occurrence, la réponse qui vous a été préparée est le contraire de ce que nous a expliqué la direction territoriale de la sécurité. Où nous disposions de cinq BAC aux effectifs complets, trois d'entre elles en manquent maintenant. Ce sont donc deux BAC complètes et trois BAC incomplètes qui travaillent. Cette mutualisation conduit en fait à une disparition de la présence policière sur la voie publique.

Je prends l'exemple de la ville que je connais bien et dont j'ai longtemps été maire : alors qu'une BAC y circulait chaque soir, ce n'est plus possible puisque celle-ci doit se déplacer à Noisy-le-Sec, à Bondy et dans d'autres zones du district, villes que les fonctionnaires ne connaissent pas, dont ils ne connaissent pas les citoyens ni la délinquance. Leur efficacité s'en trouve diminuée, ce à quoi il me semble urgent de remédier.